Arrêtez de chercher midi à quatorze heures.
Un minimum de connaissances en histoire américaine permettrait de placer le « Patriot Act » en perspective, sans recourir à des références fumeuses à Pearl Harbor.
Malgré toutes les garanties constitutionnelles, le gouvernement fédéral U.S. peut prendre des mesures liberticides s’il estime qu’une situation d’urgence les rend nécessaires.
L’antécédent le plus éloquent est la Guerre de Sécession (1861-1865) au cours de laquelle l’administration Lincoln a suspendu les libertés, notamment l’habeas corpus, autorisé la détention sans jugement, invoquant même des prétextes étonnants comme l’impossibilité de réunir un jury car ceux qui devaient siéger étaient plus utiles sur le front que dans la salle (ce qui a permis de garder en prison le général Stone, tête de turc des abolitionnistes militants, pendant toute la guerre). De plus, par son Ordre Numéro 1, Lincoln autorisait l’exécution de tout combattant ennemi non revêtu de l’uniforme des forces conventionnelles de la Confédération. En somme, faisant du guerillero sudiste le lointain ancêtre du « combattant ennemi » qui n’a pas droit à l’état de prisonnier de guerre. On peut citer aussi le droit d’arraisonner tout navire sur les mers sans égard envers le pavillon pour monter à bord et arrêter tout émissaire confédéré. Cette mesure faillit provoquer un conflit avec la Grande Bretagne, pourtain au sommet de sa puissance. Pour finir, Liconln institua le papier-monnaie à cours forcé.
CERTES, il s’agissait de mesures présentées comme temporaires, et elles ont été dûment révoquées à la fin de la guerre. Le Patriot Act aussi s’inscrit dans cette tradition - seulement le terme de ’guerre contre le terrorisme’ ne laisse présager aucune limite dans le temps.
Mais la notion de mesures dictatoriales rendues nécessaires, pendant un temps donné, par un danger exceptionnel était présente dès les origines des USA, et explique l’hommage rendu à la figure de Cincinnatus, ce vertueux Romain qui assuma deux fois la charge de dictateur avant de retourner à sa charrue.