• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de Lucknow

sur Le “cas” Soral, parfait Ovni dans le champ médiatico-politique


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Lucknow 1er août 2011 12:35

Excellentes idées exposées ici. Pour ma part, je pense qu’il faut aussi réintégrer la dimension historique d’un regard sur l’Orient qui est quelque chose de construit sur la longue durée, avec tous les phénomènes de permanence consciente ou inconsciente que cela suppose. 

L’Orient a été longtemps une source d’inspiration pour l’Occident, lorsqu’il s’est constitué en tant que tel, quelque part entre le 5ème et le 12ème siècle (large, mais pas envie de rentrer dans des débats historiographiques sans fin). L’Occident est à ses débuts pauvre, sans tradition somptuaire des élites (ce qui influe aussi sur les perceptions au delà d’un socle de plus grande richesse économique), à la remorque sur le plan de la science dans ce qu’elle a d’abstrait (même si l’Occident était dans tout ce qui était techniques appliquées très dynamique dès le début, voir « La révolution industrielle du Moyen-Age » de Gimpel), en position de celui qui récupère sur le plan culturel, ce qui est visible dans l’art carolingien et les rituels politiques, ou plus tard lors du temps des traductions via l’Espagne et la Sicile. A cela, il faut ajouter la réactivation de cet imaginaire lorsque l’Europe se remet à explorer vers l’est, notamment au 13ème siècle. L’Orient est sensé être tout ce que l’Occident n’est pas, par un effet de miroir inversé. Il est vu comme riche (voir les récits des chroniqueurs lors du pillage de Byzance en 1204 comme Villehardouin), plein de pierres et de marchandises fabuleuses, comme un pays de cocagne, il est aussi une sorte de déversoir où s’épanouissent toutes les frustrations qui existent dans une société occidentale médiévale très encadrée et contrôlée (ce sont des mondes où l’on imagine cannibalisme et liberté sexuelle qui va jusqu’à l’inceste). Il y a aussi une faune imaginaire de dragons, de créatures semi-humaines, qui contraste avec une faune occidentale réelle qui est vue comme moins excitante. Enfin, l’Inde est paradisiaque, c’est à la fois le lieu supposé du royaume du prêtre Jean et les quatre fleuves paradisiaques sont tous dans un Orient relativement éloigné (Nil, Gange, Euphrate et Tigre), surtout qu’ils sont situés assez à l’Est dans les cartes de type Beatus), et en même temps, c’est aussi un lieu où l’innocence originelle du Paradis terrestre a survécu, ce qui se voit dans les romans d’Alexandre qui ont fleuri au M Age. Pour en avoir lu, j’ai le souvenir d’une atmosphère où le surnaturel et l’inattendu sont bien plus directs que dans les romans arthuriens (arbres qui parlent, cloche de plongée). Pour ceci, voir notamment, « L’Occident médiéval et l’Océan Indien : un horizon onirique », de Jacques Le Goff, dans « Un autre Moyen-Age, p 269 à 287. Cette vision me semble toujours influer sur les perceptions de l’Orient comme destination »originelle", même si elle a pu évoluer et se mélanger à d’autres types de perception, notamment l’orientalisme plus tardif, sur lequel je ne connais pas grand chose. 

Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès