• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de gérard

sur Un médecin attaque un confrère en justice pour la mort de sa fille


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

gérard (---.---.101.41) 14 octobre 2005 15:59

Gérard (coordonnées complètes sur site aviam-languedoc.org)

Depuis quelques jours je continue à suivre les échanges sur ce forum. J’ai d’ailleurs relevé le message d’insulte anonyme destiné à un anonyme. Attitude que je ne peux admettre dans sa forme. Au pire, le docteur Boden ne mérite que la compassion qu’il ne semble pas avoir pour les autres. Une seule chose à son argumentaire (pourtant il y en a d’autre mais à quoi bon...) je vous cite « seuls 14 procés étaient justifiés ». « SEULS » cinq lettres (tient, comme Monsieur de Cambronne) lourdent de sens. Vous rendez vous compte que même 14 sur 1000 valaient une réaction mon pauvre Monsieur ! !

Tout en restant axé sur le drame d’Amélie et de ses parents, je constate qu’il s’enrichit de réflexions sur les erreurs médicales. Et j’ai le sentiment que là encore, et plus particulièrement les professionnels de la médecine, s’enferment dans le travers classique : vouloir faire passer l’idée qu’on les accuse d’être responsables de tous les accidents médicaux. CE QUI EST PARAFAITEMENT FAUX. Il y a d’énorme nuances. C’est le principe de reconnaissance qu’a précisément mis en place la loi Kouchner, l’ONIAM , et les Commissions Régionales de Conciliations et d’Indemnisations (CRCI) : un accident médical peut être un aléa thérapeutique(donc non fautif), comme il peut avoir pour origine une erreur médicale, laquelle ne sera pas forcément reprise comme une faute médicale. Les propos de Madame LAPEYRE sont pleins de bon sens, hormis le fait qu’elle fait amalgame. Et ce travers a été habilement orchestré par les compagnies d’assurances dés le vote de la loi de mars 2002.

Or quel était entre autres l’esprit de la loi : permettre à toutes les personnes qui se considéraient victimes d’une erreur médicale grave (supérieur à IPP 24% : vous médecins savaient que ce n’est pas rien dans les suites de la vie d’un être humain) de bénéficier d’une procédure spécifique DE CONCILIATION permettant d’écourter les délais d’indemnisations et les coûts de procédure. Il n’a jamais été question de faire en sorte que, dés lors qu’un patient se considérant victime introduisait une action via ces commissions, il serait indemnisé les yeux fermés sans étude de sa requête. La procédure judicaire classique s’appuie sur un pilier du dossier : l’expertise médicale. Les CRCI s’appuient sur un pilier du dossier : l’expertise médicale. La procédure judiciaire classique fait comparaître le professionnel mis en cause devant un tribunal de juristes qui, et ils le reconnaissent volontiers, ne sont pas médecins. Ils font donc appel à la barre à des témoins à charge et à décharge, sont présents également les avocats du médecin, de l’établissement de soins s’il est en cause, des compagnies d’assurances de l’un et l’autre. Ce sont rigoureusement les mêmes qui peuvent s’exprimer également lors des séances des CRCI, mais en face d’eux ils ont 1 magistrat professionnel, des représentants : des médecins, des établissement de soins, des compagnies d’assurances, des usagers (qui sont issus en général d’association de victimes, malades ou autres). Lorsque toutes les parties se sont exprimées devant cette Commission, elles sortent. Dés lors, la discussion s’engage entre les membres de la Commission sur la base à la fois des arguments qui viennent d’être développés, et surtout, du rapport d’expertise. Ensuite seulement, un vote est suggéré et chaque voix porte. C’est ce vote qui motivera la décision de l’ONIAM. L’instauration de cette institution n’a EN AUCUN CAS pénalisé la profession. Bien au contraire, puisque un nombre représentatif de médecins et de leurs assureurs peut s’exprimer et objecter : ce qui n’est pas le cas lors d’une procédure judicaire. Les professionnels sont loin d’être perdants dans cette procédure nouvelle. Par contre, elle a les avantages suivants :
-  diminuer le délai de la procédure : les CRCI peuvent clôturer un dossier dans un délai de 12 mois théoriques (la réalité les porte plutôt vers les 15 mois). Cette notion paraît peut être secondaire, mais si vous vous imaginez handicapé pour x années dans l’incapacité d’exercer votre profession, ou obligé de modifier votre structure environnementale (perte de votre emploi, amputation par exemple, mais ce ne sont qu’exemples) et faire l’avance des frais de procédure, ce progrès est énorme et juste.
-  Diminuer les coûts : l’expertise ne coûte rien au demandeur, seul l’accompagnement d’un « sachant » (avocat, médecin de recours, ou conseil) à l’expertise, SURTOUT à l’expertise, et en CRCI (lorsque vous avez devant vous un aréopage de X personnalités qui vont décider de votre avenir, il est préférable de se sentir accompagné), peut éventuellement être une charge financière. Dans la procédure classique, tous les actes de l’avocat, toutes ses diligences, l’expertise etc, sont à votre charge. Bien sur, il y a l’aide juridictionnelle ou les compagnies d’assurances qui sont sensées vous couvrir, mais ces « alibis » (développer les carences de l’AJ ou des contrats « défenses recours » de certaines compagnies d’assurances feraient l’objet d’un volume avec des exemples rien que sur le sujet).
-  Confier l’étude des dossiers à une structure spécialisée dans ce type de dossier.
-  Soulager le système judiciaire, que le politique s’ingénie à déborder pour qu’il ait moins de temps à consacrer à leurs affaires (ex : la validité des radars automatiques).

Ce qui est une réalité objective c’est que
-  la loi Kouchner a donné la possibilité à « la France d’en bas » d’accéder à la reconnaissance de son statut de victime lorsque cela était justifié. J’aimerai que des professionnels opposent leur objection à cette possibilité pour les « petits ». Pourquoi n’auraient ils pas droit à cette justice ?? j’espère des réponses.
-  elle a permis d’écourter les délais de la procédure : vital pour certaines victimes.
-  Elle n’a en aucun cas pénalisé les médecins, bien au contraire : ils ont en face d’eux une commission où leurs pairs sont présents. Ils bénéficient de la même base argumentaire : le rapport d’expertise contradictoire.
-  Elle a permis aux victimes d’accidents médicaux non fautifs (mais avec lien de causalité établi) d’être indemnisés de leur préjudices graves. Ce qui n’était pas le cas jusqu’alors devant une juridiction classique.
-  En aucun cas, elle n’a augmenté le montant des indemnisations, ni même, ce qui peut paraître paradoxal et en dépit des prédictions des assureurs, leur nombre. Je vous invite sur ce sujet à prendre connaissance d’un rapport qui figure sur notre site et qui produit quasiment le contraire.
-  Le raisonnement des compagnies d’assurances revenait à admettre que beaucoup d’erreurs médicales ne donnaient pas lieu à poursuite faute de moyens des victimes ET QU’ELLES LE SAVAIENT.

Une réalité objective : les assureurs ont crié au loup lors du vote de cette loi, et tous les professionnels (à quelques exceptions prés) ont plongé. Résultat : les assureurs ont allégrement augmenté les primes d’assurances des professionnels. Les spécialistes ont revendiqué de ce fait une augmentation de leurs honoraires, l’état a suivi, la sécurité sociale, donc la solidarité nationale, déjà malade, paye, Le déficit augmente, et qui s’en sort bien ? les compagnies d’assurances privées sur le dos de la collectivité. Mesdames et Messieurs de la Médecine, vous avez été instrumentalisés et j’admets que ce sera à vie difficile à admettre. Le « panurgisme » auquel se réfère Monsieur l’Expert vous a également contaminé...sous une autre forme.

Arrêtons ce discours de « celui-ci contre celui là » essayons de faire ensemble évoluer ce facteur de vie et de modernité : la vrai médecine, pas la « médecine business ». Il y a infiniment moins de professionnels aux motivations foncièrement vénales que de professionnels dévoués, mais il faut que ces derniers, jeunes en devenir ou routards, tentés d’argumenter au nom ou sous la pression de l’omerta, cesse ce jeu obsolète du chat et de la souris.

Tout ce que j’écris ici s’appuie sur des éléments tangibles, vécus avec preuves et non pas théorisées ou supposés : je peux répondre à toute forme de contestation subjective sur ce forum comme en particulier à l’adresse du site rappelée plus haut. Nous avons dans notre association des éléments écrits de ce qui est exposés dans ces lignes. Si je développais tout l’argumentaire, la capacité du forum ne suffirait pas. Un peu de sérieux et d’impartialité, c’est tout ce que je demande aux professionnels...et aux autres.

Tous les médecins ne sont pas, très loin s’en faut, des COLNET (pour ceux qui ne connaissent pas taper le nom sur un quelconque moteur de recherche) toutes les victimes ne sont pas des chercheurs de profits. La volonté de ne pas faire d’amalgame doit fonctionner dans les deux sens.

J’ai discuté il y a peu avec un Professeur universitaire qui argumentait sur un problème de moyens, fort probable au demeurant. Mais dans ce cas, qu’ils l’expriment tous clairement, et les patients, dés lors qu’ils sont reconnus aussi comme acteurs de santé et non comme adversaires, participeront à leur revendication sans la moindre arrière pensée. C’est l’intérêt de tous, c’est l’intérêt d’une société de progrès, plus que l’omerta et l’embrouille.

Merci de m’avoir lu, merci surtout d’éviter les insultes : elles ne sont pas constructives ni d’une part, ni de l’autre. Si vous avez des difficultés à admettre mon argumentaire, vous en aurez peut être moins en lisant le site référé en haut....je reste disponible.

Mais surtout, n’accusez pas les victimes. N’oubliez pas : le bulletin de l’Ordre (et le Conseil de l’Ordre ne conteste pas) avoue 10000 à 25000 victimes d’IEG/an (25 à 68/jours). Sortez de cette omerta d’un autre âge, ou admettez que « un décés sur X mille n’est qu’un sacrifice sur l’autel d’Esculape (ou Asclepios) », et vous confirmerez une inquiétude légitime.

AUCUNE CIVILISATION, AUCUNE CULTURE, AUCUNE STRUCTURE N’A JAMAIS PU EVOLUER SANS ADMETTRE SES ERREURS.


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès