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Commentaire de HERVE

sur « Re-Bonjour, Monsieur ! »


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HERVE 3 septembre 2011 09:05

28 mars 2008

http://www.bakchich.info/Monsieur-Monsieur-bientot-devant,03149.html

Monsieur Monsieur bientôt devant le juge

JAMES BONDERIE | vendredi, 28 mars 2008 | par Laurent Léger

James Bond peut dormir sur ses deux oreilles, Jacques Monsieur ne devrait pas lui voler la vedette. Trafics d’armes, liaisons dangereuses avec les services secrets du monde entier, les soupçons abondent. Pourtant ses compatriotes belges doutent de ses compétences de super 007. Son procès nous le dira, il débute lundi 31 mars, à Bourges.

A Bourges, où l’on fabriqua des missiles Exocet et des avions de chasse, on s’intéresse à l’industrie militaire. Mais les affaires de défense qui seront évoquées au tribunal local, lors du procès qui démarre lundi 31 mars 2008, devraient dévoiler des commerces moins reluisants. Ceux des trafics d’armes pratiqués à destination de théâtres de guerre sous embargos, d’États peu recommandables ou de rébellions.

En Croatie, en Bosnie, au Congo-Brazzaville, en Iran et ailleurs, Jacques Monsieur, un Belge qui fut installé à La Celle Condé, aux Amourettes, une charmante demeure berrichonne, exerçait des talents d’intermédiaire et de courtier en armements. A force de fréquenter les agents de la DST, de la CIA ou du Mossad, le service d’espionnage israélien, quand il ne prenait pas le thé avec les dirigeants d’Elf, voire les mollahs iraniens, qui furent longtemps de bons copains, il avait « oublié » de quémander les autorisations nécessaires à son joli métier…

C’est en 1986 que Monsieur attire pour la première fois l’œil des autorités de plusieurs pays. Tout commence avec une mystérieuse valise, interceptée par les douanes belges. Appartenant à David Benelie, un curieux personnage, la valise est remplie de documents concernant l’achat-vente d’armements, de papiers vierges suisses et sud-africains, de négatifs de cachets de douane.

On y trouve aussi des papiers de la société de Jacques Monsieur, avec qui Benelie fait du business, et un certificat de non réexportation – un document qui certifie que les armes achetées sont livrées au bon destinataire - falsifié. La valise leur vaudra à tous les deux leur première interpellation. « L’enquête révèlera l’appartenance de Benelie au Mossad, les services secrets israéliens », écrit la police belge dans l’un des premiers documents officiels consacrés au trafiquant.

Les trafics de Monsieur Jacques

Ce Benelie reste une énigme : il utilise son vrai nom, David Azoulay, né en 1938 au Maroc, ou alors celui de David Benelie, né en France ou à Casablanca en 1945… L’homme détient la double nationalité, israélienne et sud-africaine, c’est un ancien du secteur militaro-sécuritaire israélien.

Ex-officier de l’armée israélienne, et ancien chef de la sécurité de la compagnie aérienne El Al en Afrique, il utilisera un bureau dans les locaux de Jacques Monsieur. Son frère, haut gradé du Mossad, aurait contribué à l’enlèvement du criminel nazi Eichmann, en Argentine. Il est entré au service de Marc Rich, le célèbre trader dont la gigantesque fraude fiscale fut effacée par le président Bill Clinton à la veille de son départ de la Maison-Blanche, en 2001.

Voilà les fréquentations de Jacques Monsieur dans les années 1980. En 1985, lui et Azoulay-Benelie ont vendu à la Chine des lance-grenades fabriquées en Belgique, alors que la destination officielle était les Pays-Bas. En route, les lance-grenades s’étaient métamorphosés en « matériel de signalisation maritime ».

Ça sera souvent le cas avec Monsieur. Les documents nécessaires aux commerces d’armements internationaux manquent, ou des États qui lui font confiance lui procurent des certificats de complaisance. Il fait ami-ami avec les présidents ou leurs ministres, c’est bien pratique pour faire du business dans des pays à régime faible. Quand il le faut, des comptes bancaires à Dubaï – tels ceux de la puissante famille d’Ali Nategh Nouri, alors président du Parlement iranien - ou ailleurs reçoivent quelques belles gratifications, histoire de fluidifier la négociation commerciale…

Installé en France, Jacques Monsieur masque son activité derrière une pseudo exploitation agricole. En réalité, ce sont des obus de mortier, des munitions au phosphore, des fusils et autres joujoux qui sont promus et vendus depuis son bureau, au premier étage des Amourettes. Une poignée de proches ou de collaborateurs se retrouvent avec lui au tribunal pour «  commerce de matériels de guerre, armes et munitions des quatre premières catégories sans l’autorisation du ministre de la Défense ».

Les copains d’abord

Parmi ses amis, il y a Patrice Bourges, fils de l’ancien ministre français de la Défense Yvon Bourges (sous Giscard), bon connaisseur des spécifications techniques des matériels, qui sert aussi d’intermédiaire. « On veut utiliser ses contacts à Chypre, en Turquie, ou en Algérie pour proposer 276 tonnes de cartouches ou des lunettes de tir israéliennes », relate une synthèse de police de 1997. Il aurait, selon le réquisitoire du parquet de Bourges, touché une somme pas bien importante : 7500 euros ! Patrice Bourges assure qu’il s’agit de simples frais remboursés… Au juge, il a expliqué que son boulot consistait notamment à vérifier si les acheteurs des armes de Jacques Monsieur disposaient des autorisations. Mais lui, par contre, n’avait pas pensé demander les siennes à Monsieur. Patrice Bourges a, depuis, été recruté à MBDA, la société de missiles, dans l’orbite du géant aéronautique EADS.

On trouve aussi Jean-Claude Uthurry-Borde (fidèle collaborateur de Monsieur pour les affaires croates et congolaises, intermédiaire avec la Côte d’Ivoire, le Togo et le Burkina Faso) et Pierre Ferrario (intervenu avec la Croatie et pour une vente de mitrailleuses au Qatar).

Cette affaire provoqua quelques tiraillements dans la Françafrique : Lissouba ayant perdu la guerre, son successeur Denis Sassou N’Guesso refusa de payer les hélicos. Les équipes africaines d’Elf, André Tarallo et Jack Sigolet, proches des Congolais, avancèrent une partie de l’argent pour régler la facture au trafiquant. Le tout sur fond de menaces, de pressions et chantages divers de tous les côtés…

Pas si 007 que ça

Car les relations troubles avec les services secrets sont au cœur de l’affaire Monsieur. Gageons que dans la salle du tribunal de Bourges se glisseront, la semaine prochaine, quelques barbouzes anonymes. A moins que ses avocats n’obtiennent gain de cause : ils ont demandé le huis clos, comme cela avait été le cas lors de son procès belge…

Jacques Monsieur et ses amis, comme Pierre Ferrario, assurent le cœur sur la main que « toutes les actions qu’il avait menées avaient reçu l’aval de la DST », selon le réquisitoire du parquet. Pour les Belges, les choses sont à peu près claires : Monsieur n’est qu’un simple « informateur » des services secrets, contrairement à ses affirmations selon lesquelles il serait un véritable agent, un « 007 » au service du roi des Belges, du gouvernement français, des services israéliens et de la CIA américaine. Un sacré programme !


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