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Commentaire de hommelibre

sur La mort de Don Juan et l'émergence du tyran sexuel


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hommelibre hommelibre 21 octobre 2011 00:13

Il y a plusieurs versions de Don Juan. Différents auteurs se sont emparés du mythe et l’on façonné. La version de Molière est à ma connaissance la moins violente, quoique je ne les connaisse pas toutes. Celle de l’anglais Shadwell est la pire. Don Juan devient un tueur je crois à chaque acte. Le personnage y est axé uniquement sur la violence et le saccage des règles de la société. Peut-être est-ce la version extrême du rebelle dans l’esprit de son auteur ? Pas pour moi.

La version mise en musique par Mozart est aussi assez rude.

Il faut se placer dans une perspective d’une époque où la société commence à s’émanciper de la terreur de l’Inquisition et de la mainmise de l’église sur les esprits. Désobéir, transgresser les loi, était faire reculer l’oppression. Même si au final il reste puni : on n’est pas encore à l’époque où l’on peut s’affranchir entièrement du jugement divin tel qu’il était alors.

Mais Don Juan n’est pas un héros dans le sens où il est aussi détestable qu’attirant. Les héros sont parfaits, pas lui. Ce qui est aussi à relier au refus de l’idéalisation religieuse de l’humain. Lui tentait de vivre sans hypocrisie mais avec le pire et le meilleur de lui-même. C’est un anti-héros.

Autre aspect : le besoin de vivre une jouissance immédiate, qui préfigure l’extrême de l’individualisme qui va se développer par la suite. De nombreux personnages de la littérature de ces derniers siècles vont dans le sens de la désobéissance et de la transgression. Les chants de Maldoror de Lautréamont, Rimbaud, Baudelaire, Madame Bovary, Lorenzaccio, et d’autres, vont au-delà des codes de leur monde. Cette tradition est puissante et a contribué à l’avancement de la notion de liberté individuelle.

Il y a différentes lectures de Don Juan. Elles vont varier selon la version de l’histoire. J’ai beaucoup de peine avec les versions les plus violentes. Je pense même qu’elles ne collent pas avec le séducteur. Un séducteur se prouve en permanence qu’il est attirant, il est fortement narcissique. Le consentement de la femme valide sa compétence de séducteur, il en a besoin. Or tuer ou violer ne prouve rien du tout. Il n’a donc aucun intérêt à tuer ou à violer. Le libertinage assumé par le personnage n’a pas de lien avec le viol, car le libertinage est un jeu. Shadwell a intitulé sa pièce « Le libertin ». Mais c’est pour moi une étrange conception du libertinage.

Une synthèse rapide du libertinage intéressante est celle de wikipedia :

  • dans sa version d’origine, le libertin est celui qui remet en cause les dogmes établis, c’est un libre penseur (ou libertin d’esprit) dans la mesure où il est affranchi, en particulier, de la métaphysique et de l’éthique religieuse (exemple : Dom Juan de Molière) ;
  • le sens qui prévaut de nos jours se réfère au libertin de mœurs, c’est-à-dire celui qui s’adonne aux plaisirs charnels (voire à la sexualité de groupe) avec une liberté qui dépasse les limites de la morale conventionnelle et de la sensualité bourgeoise normale, mais aussi avec un certain raffinement cultivé

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