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Commentaire de rakosky

sur Tragédie grecque et comédie européenne


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rakosky rakosky 6 novembre 2011 14:39

@marc gerone

Le 12 août, le gouvernement Berlusconi a publié un projet de décret pour mettre en œuvre le plan d’austérité de 48 milliards de restrictions budgétaires sur deux ans.

A la suite de l’annonce de ce plan, la CGIL a lancé un appel à la grève générale le 6 septembre pour « modifier » le plan de Berlusconi. Appel contre lequel se multiplient, à droite comme à « gauche », les pressions en vue de le faire retirer.


Fin juin, au moment où le gouvernement s’apprêtait à mettre en œuvre les mesures de rigueur imposées par l’Union européenne, et en particulier celles imposées par le sommet des 24 et 25 mars derniers, la spéculation financière s’abattait sur l’Italie. Surgissait tout à coup le spectre de la faillite.

En l’espace de quelques heures, toutes les palinodies de Berlusconi, Tremonti, Draghi (le futur président de la Banque centrale européenne) selon lesquelles la situation de l’Italie était « saine, n’avait rien à voir avec la Grèce ou le Portugal », étaient balayées. A la place, le président de la République, Giorgio Napolitano, lançait un appel à « l’unité nationale immédiate pour sauver le pays ».

Début juillet, Berlusconi et le gouvernement se mettaient à l’ouvrage pour « répondre aux marchés, pour sécuriser les investisseurs ». Autrement dit, pour répondre aux exigences des spéculateurs. Et, pour eux, il ne pouvait y avoir qu’une seule réponse : engager un plan encore plus drastique que celui qui était prévu.

Le « nouveau » plan pour « calmer les marchés » comportait notamment des coupes à hauteur de 46 milliards d’euros, somme la plus élevée jamais vue depuis 1992 : blocage des salaires dans la fonction publique (salaires déjà bloqués et amputés de 4 % cette année) avec une perte d’environ 8 000 euros par travailleur entre 2011 et 2013 ; augmentation de l’âge de départ à la retraite ; coupes de 3,2 milliards dans le budget des communes et des régions ; augmentation et mise en place de franchises sur les médicaments, les examens et les prestations de santé et les visites médicales ; fermeture de dizaines d’hôpitaux ; suppression de dizaines d’écoles et de milliers de postes de fonctionnaires s’ajoutant aux 140 000 déjà supprimés ces trois dernières années…

Pour faire passer un tel plan, le gouvernement avait besoin de l’« unité nationale » de tous les partis, de tous les syndicats. Ce soutien n’a pas tardé à arriver…

Tout en déclarant qu’il ne partageait pas « certaines » mesures de ce plan, le Parti démocrate (« gauche ») ajoutait aussitôt qu’il « ne s’y opposerait pas ».

De plus, le gouvernement s’assurait du silence de la plus grande organisation syndicale italienne, la CGIL qui, avec la CISL et la UIL, avait signé quelques jours auparavant un « pacte » avec la Confindustria (le syndicat patronal), renouant avec l’unicité syndicale rompue en 2009, pacte qui permet de remettre en cause les conventions collectives nationales et le Code du travail, au moyen d’accords d’entreprises dérogatoires.

De sorte que le plan Berlusconi pouvait être approuvé à la mi-juillet, en moins de 24 heures, par les députés et les sénateurs. A tel point que certains journaux parlaient de « miracle ». 

Une fois le plan entériné sous les applaudissements des capitalistes, de l’Union européenne, du président de la République, de Draghi et du FMI, le gouvernement et l’« opposition » donnaient l’impression d’avoir retrouvé leur sérénité.

Illusion de courte durée : le 20 juillet, l’attaque sur les titres d’Etat italiens repartait à toute allure. La Bourse de Milan s’effondrait à nouveau 

Le message était clair : les spéculateurs et les capitalistes ne jugeaient pas les mesures suffisantes. Ils en réclamaient encore plus.

Et, encore une fois, le gouvernement Berlusconi et l’« opposition » se retrouvaient unis, autour du président de la République, pour discuter d’un deuxième plan.

Mi-août, ce deuxième plan était présenté au Parlement convoqué en session d’urgence (du jamais vu). Etaient présentées les mesures suivantes : liquidation des contrats de travail nationaux, suppression d’environ 1 000 communes (sur 8 000), suppression de dizaines de provinces, suppression de milliers de postes supplémentaires dans la fonction publique, augmentation de l’âge de départ à la retraite pour ceux qui avaient déjà droit à la retraite, augmentation de l’âge de départ à la retraite pour les femmes, privatisations, nouvelle augmentation des franchises hospitalières…

S’ajoutait à cela une « réforme » de la Constitution visant à y insérer l’obligation de l’équilibre budgétaire, comme l’impose l’Union européenne. Enfin, suppression de la fête du 1er Mai et de celle du 25 avril (libération du fascisme), symboles de la lutte des travailleurs et de la conscience de classe.

Loin d’exiger le retrait de ce deuxième plan, l’« opposition » élaborait des « amendements » et affirmait sa disponibilité à discuter dans le détail des mesures « pour sauver le pays ». 

Rien n’y faisait cependant : le 20 août, après deux jours de « calme », l’effondrement boursier s’amplifiait de plus bel. Le gouvernement annonçait d’autres liquidations d’immeubles, d’argenterie, de terrains…

Le deuxième plan meurtrier présenté le 15 août doit maintenant être voté par le Parlement (début septembre). Mais l’impasse totale de cette situation politique et économique provoque jusqu’au sein du gouvernement Berlusconi, au sein de son parti, au sein du PD, de la Ligue du Nord, des tensions, des divisions, des menaces de rupture. C’est le reflet, d’un système politique en décomposition, en proie à la panique et qui voit les bases de son pouvoir se dérober. C’est l’expression surtout de la lutte de classe elle-même qui s’exprime par des canaux plus ou moins directs, comme celui de la révolte des communes et des provinces qui devraient être supprimées.

Gouvernement et « opposition » ont une peur énorme que la classe ouvrière, par-dessus laquelle on a essayé de passer pendant la période des vacances, ne « descende dans l’arène » avec toute sa force, sa colère, son potentiel de lutte 

Et en effet, malgré les vacances, la pression qui s’exerce sur les syndicats en général et sur la CGIL en particulier a conduit les dirigeants de celle-ci à appeler à la grève générale pour le 6 septembre.

Certes, les mots d’ordre sur lesquels est appelée cette grève générale posent d’énormes problèmes (ils demandent à « modifier le plan » ; l’appel explique qu’« il n’y a pas que les travailleurs qui doivent payer  »…). Et la signature du pacte avec la Confindustria représente un véritable obstacle pour ouvrir une perspective. Reste que l’appel à une grève générale à moins d’une semaine de la rentrée est largement ressenti par les travailleurs comme une ouverture contre la politique anti-ouvrière qui s’abat sur eux.

D’où le déchaînement, à droite comme à « gauche », contre la grève, d’où les pressions incessantes sur la direction de la CGIL pour qu’elle retire son appel .

Cet été nous apporte, si besoin était, une confirmation : le paiement de la « dette » et la loi des « marchés » — guidés par l’Union européenne et le FMI — nous mènent au désastre. Plus que jamais il n’existe qu’une issue et une seule : non au paiement de la dette ! Retrait de tous les plans entérinés et en discussion


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