Bonsoir Patrick
Vous énoncez beaucoup de choses justes, pourtant je voudrai compléter votre intervention
Par exemple, vous semblez supposer qu’autrefois – et sans dater cet autrefois – on enseignait de manière systémique, c’est-à-dire en créant des passerelles entre disciplines. Or, cela n’a été le cas que pendant une période où un homme pouvait détenir la totalité des connaissances de son univers connu : de l’antiquité au siècle d’Erasme. Les hommes qui disposaient de ces connaissances s’appelaient philosophes.
Or, comme il y a des chercheurs qui trouvent, au fil du temps, la somme des savoirs détenus par l’humanité s’est considérablement enrichie, si bien qu’aujourd’hui, même le spécialiste de sa discipline ne maîtrise qu’une toute petite partie de sa spécialité. Oui, il y a eu division du savoir comme il y a eu division du travail, avec les avantages et inconvénients que l’on connaît.
On m’objectera qu’il n’y a pas si longtemps, la France ne connaissait que deux filières, la filière classique et la filière moderne. Pourtant, au sein de chacune d’elles, l’enseignement n’a jamais été systémique.
Or, on observe aujourd’hui, dans les collèges et lycées, des passerelles entre matières, répondant en cela aux vœux de Joël de Rosnay.
Le rêve émancipateur de la 3è République ne fut qu’un rêve parce que par nature, l’éducation est un formatage des esprits pour qu’ils correspondent aux besoins du moment, et puissent s’adapter à leur environnement.
L’éducation est une reproduction des modèles (conséquence des neurones miroirs), pour autant, elle n’interdit pas l’innovation, sans cela, des scientifiques ne se seraient pas élevés contre des modèles obsolètes au regard des nouvelles découvertes. Comme l’écrivain qui imite des modèles reconnus avant de créer son style personnel, et pourquoi pas, une école comme le surréalisme.
Je ne crois pas que dans la vie professionnelle « il en va autrement », contrairement à ce que vous écrivez. Les choses sont aussi cloisonnées que dans la vie scolaire. On ne va pas par exemple demander à un comptable de rédiger le slogan de la prochaine campagne publicitaire. Il y a une telle exigence de performance que la vie professionnelle demande des spécialistes. Donc, vie scolaire = vie professionnelle.
Quoi que cette identité soit le reflet de la culture française qui se base sur les titres. On ne soupçonnera pas qu’un titulaire d’une maîtrise en géographie puisse s’occuper de la négociation-relation-client. En France, on se base sur le titre et le réseau.
Or, dans les pays d’inspiration anglo-saxonne, il en va autrement. On considère qu’un étudiant qui sort d’une université dispose d’un bagage suffisant pour exercer des fonctions auxquelles son université ne l’avait pas préparé. Et cela est aussi le cas pour les professeurs, comme j’ai pu en faire l’expérience. Bref, on vous demande si vous vous sentez capable d’enseigner telle matière en plus (ou en remplacement) de votre matière de prédilection, et si vous répondez par l’affirmative, on vous met à l’essai. Ce n’est qu’ensuite que vous passez de nouveaux diplômes pour être plus crédible parmi la communauté scientifique. D’ailleurs, un étudiant qui suit un cursus en mathématiques pourra très bien valider des cours en histoire de la cuisine grecque, ou tout autre cours proposé par son université. Le choix est infiniment plus vaste qu’en France.
Cette mobilité est une donnée culturelle qui n’est pas inhérente au système scolaire anglo-saxon, parce qu’il n’existe pas de différence fondamentale with le système français qui expliquerait ce facteur. Le français est très enraciné, aristocrate, et il cloisonne les choses. C’est plus une constatation qu’une dénonciation, il y a du bon et du moins bon dans chacun des systèmes.
L’école est à l’image de la société. Si une société ne propose pas le plaisir de travailler, l’école ne proposera pas de plaisir d’apprendre. Si une société ne laisse pas de place à la mobilité et à la créativité, l’école ne fera pas de place à la mobilité et à la créativité. Dans la vie professionnelle, les cadres – y compris les cadres supérieurs - d’aujourd’hui se sentent par exemple défaits de toute responsabilité parce que les décisions sont prises par les plus hautes instances dirigeantes et exécutées par la main d’œuvre. Le cadre est un fusible, ce qu’il vit très mal. A société verticale, école verticale.
Bref, je crois que le problème est beaucoup plus complexe que vous ne le laissez paraître, et l’école n’en porte pas la plus grande responsabilité. Elle répond aux exigences des politiques, avec plus ou moins de résistance, or le degré de complexité et d’interpénétration des problématiques (économiques, sociales, etc.) implique de la part des pouvoirs dominants de ne pas être concurrencés. Pour être plus clair : un esclave qui sait lire se rebelle.
Pour conclure : l’excellence du modèle français d’autrefois n’était pas supérieur à d’autres (modèle anglais ou allemand par exemple) - où sont les études comparatives ? - ; c’est un mythe sur lequel les détracteurs actuels aiment se reposer pour mieux abaisser le modèle français d’aujourd’hui qui n’est guère inférieur aux autres (à l’exception peut-être du modèle de Singapour et de Shangaï dont l’efficacité réelle se fera surtout ressentir d’ici 20 ans), même s’il demeure largement perfectible.
Egalement, autrefois les élèves et étudiants ne passaient pas 7 heures par jours devant un écran de télévision, d’ordinateur, de téléphone portable, etc.
Bien cordialement
26/11 09:48 - DSKprésident
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26/11 09:18 - lauraneb
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25/11 23:15 - non667
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25/11 15:16 - mcjb
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25/11 12:21 - Tristan Valmour
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