Comme cela a été dit, l’Iran est l’objet d’un encerclement militaire en règle.
Les Etats-Unis ne peuvent se permettre de laisser subsister hors de leur contrôle une telle réserve de pétrole, comme l’Irak d’ailleurs, qui avait signé des pré-contrats d’exploitation avec des compagnies chinoises, russes et... françaises.
Reste que l’opinion américaine, très marquée par le désastre irakien, n’est pas prête à cautionner un nouveau déploiement de troupes au sol (le traitement de la Libye le montre bien), du moins si l’on en croit les sondages. Ces mêmes sondages montraient d’ailleurs qu’au plus fort de la fièvre patriotique de mars-avril 2003, moins de 25 % de la population cautionnait les menaces que proférait Rumsfeld à l’encontre de l’Iran (Sondage CNN/USA Today/Gallup du 10 avril 2003, cité in Jeffrey M. Jones, « Public
Sees Much Work for US as War Nears End », Gallup News Service, 11 avril 2003)
Pour autant, la situation est, sur le plan des mentalités américaines, assez différente des années qui ont suivi le Vietnam et la plus grave défaite militaire du pays. Désormais, l’armée est professionnalisée (depuis 1973), et l’idéologie militariste n’a fait que se renforcer grâce aux nouveaux canaux de diffusion que constituent d’innombrables chaînes de télévision (séries et films tournés avec le soutien du Pentagone,
publicités à la gloire des soldats, reportages confectionnés par les services de propagande de l’administration et diffusés comme des informations journalistiques...), les jeux vidéo de guerre (America’s Army, Kuma War ou Battlefield qui fait évoluer ses joueurs dans les rues de Téhéran), la tradition de variété patriotique (Daryl Worley et ses succédanés), sans même parler du sport et des partenariats qui lient l’armée aux
grandes fédérations ), etc.
En bref, la campagne médiatique actuelle, similaire à celle qui cibla l’Irak (jusqu’à l’invention d’une connexion Iran-11 septembre 2001), doit, à terme, faire basculer l’opinion vers un soutien à une guerre d’Iran, d’autant plus facilement que la seule condition de ce soutien est, pour les Etats-uniens et toujours selon les sondages, l’attestation d’une volonté iranienne de se doter de l’arme atomique... Restera alors à rappeler l’affaire des otages de l’ambassade de Téhéran (en 1979, les pancartes « let’s bomb Iran fleurissaient dans les défilés »patriotiques« ), de souligner la présence du pays parmi ceux de »l’Axe du Mal« , et d’en inventer d’autres, dans la lignée des couveuses koweitiennes.
Il semble d’ailleurs probable qu’un soulèvement de la population iranienne serve de prétexte à une nouvelle intervention humanitaire, rendue possible par les retraits d’Irak et d’Afghanistan.
Pour s’en convaincre, il suffit de lire les »
manifestes" du Project for a New American Century consacrés à l’Iran, qui rappellent furieusement ceux produits par ce think tank à partir de 1998. D’ici cinq à dix ans - le temps pour le pouvoir de jouer sur l’amnésie populaire et à la propagande de marquer les esprits au fer rouge, l’Iran devrait subir le sort réservé à l’Irak.