Un bon compte-rendu, relativement objectif, mais je me permettrai tout de même de la commenter quelque peu, car il oriente les faits de façon assez malhonnête, dissimule certains éléments et ignore certaines conclusions. En somme, de la vulgaire désinformation, comme toujours avec vous, si bien qu’on ne sera pas vraiment surpris.
Ce que vous dites au sujet du KPRF (PC russe) est très certainement vrai, la plupart des petites gens et la partie inférieure de la classe moyenne regrette amèrement l’URSS, et votent par conséquent PC. La personnalité la plus consensuelle en Russie est de loin Staline, ce qui est assez révélateur.
Néanmoins, tout ceci ne donnera rien de bon pour la Russie et pourrait même s’avérer contreproductif. Les manifestants, quels qu’ils soient, ont raison sur la forme, mais tort sur le fond. En premier lieu, on retrouve dans l’opposition tout et n’importe quoi : des fascistes, des libéraux, des conservateurs, des communistes, des homos (constitués en véritable groupe politique), des démocrates et des occidentalistes de tout poil, incompatibles et irréconciliables par nature. En supposant que par extraordinaire, ils parviennent à renverser le régime, cela ne peut que déboucher sur une catastrophe, ce qui est arrangerait bien Washington, Londres et Paris. Il est donc évident qu’ils y sont mêlés, d’une façon ou d’une autre, et d’ailleurs, un terreau de mécontentement réel est un ingrédient indispensable pour une opération de déstabilisation réussie.
C’est pour cela que les gens lucides et patriotes, poutinens ou non, appellent fort logiquement à soutenir Poutine, en dépit de ses travers et de ses incohérences : il n’y a tout simplement pas d’alternative pour le moment (c’est, entre autres, la position de l’historien Nikolaï Starikov ). Le monde (y compris nous, Français) a besoin actuellement d’une Russie ferme et stable, et il vaudrait mieux pour nous tous, à plus forte raison pour les Russes eux-mêmes, qu’ils évitent de reproduire le scénario de 1917.
Enfin, n’oublions pas non plus que si mettons demain, il se produisait un renversement de régime en Russie, l’émergence d’une pseudo-démocratie de marché à l’occidentale est la chose la moins probable, il serait largement plus vraisemblable que se mette en place un régime de type marxiste-socialiste ou bien carrément fasciste (c’est une hypothèse sérieuse).
Et tout cela, nos braves « pingouins » et « hamsters » démocrates, naïfs et politiquement myopes, sont incapables de le capter. Mais vous, si, ce qui fait de vous un menteur. Or, ce que vous ne dites pas, c’est que malgré ses propres défauts et les tares du système qu’il a mis en place, Poutine, au contraire d’un Gorby, analyse très bien la situation et fera tout ce qui est en son pouvoir pour éviter d’en arriver à une nouvelle période d’anarchie. C’est pourquoi il laisse les apparatchiks se gaver et l’opposition exister ; ainsi il n’a pas à redouter une fronde des uns, tout en canalisant l’énergie des autres. Son plus grand mérite est d’être garant d’une indéniable stabilité en Russie ainsi que dans le monde, grâce à sa politique étrangère. Si il est renversé ou quitte le pouvoir, ce qui attend les Russes n’est rien moins qu’une nouvelle décennie 1990. Et nul n’en a envie, sauf peut-être Washington et sa cour de valets.
Quant à ceci :
Au vu de ce qui se passe vraiment ici, mon sentiment sur votre article et qu’il
reflète un large délire paranoïaque qui imagine une Amérique qui serait
organisée, passionnée par le monde extérieur et capable d’avoir des stratégies
de long terme minutieuses, éventuellement efficaces et consensuelles d’un bout
a l’autre de l’echequier politique.
Les États-Unis, avec la Chine et peut-être encore l’Allemagne sont probablement les dernières puissances à pratiquer encore une véritable géopolitique. D’autant plus qu’il est évident que l’Amérique est « passionnée par le monde extérieur », pour la simple et bonne raison que tous ses intérêts s’y trouvent : énergie, matières premières, finances, industrie, et même l’armée. Ce n’est pas parce que chez nous c’est le bordel et qu’on est pas fichus de faire quoi que ce soit sur la durée que c’est forcément le cas partout. Il n’y a pas « délire paranoïaque » là-dedans, il n’y a qu’une analyse assez plausible des faits.
En fait, vous êtes en train de nous dire, en substance : « Ne cherchez pas à comprendre et à analyser quoi que ce soit, ce serait devenir parano et conspirationniste. Chacun sait que la politique étrangère se fait au gré des aléas électoraux, de la pluie et du beau temps, de contingences de toute sorte et, bien entendu, de la corbeille. La démocratie et l’Amérique, c’est le bien, tout le reste, c’est le mal. Poutine est un dictateur et il doit partir. »
Soit vous nous prenez clairement pour des cons, soit vous en êtes un vous-même, mais ayant constaté que vous êtes capable d’écrire des choses raisonnables, j’en doute.