Morice, je suppose que vous êtes un intellectuel, donc un universitaire, avec une formation de type janséniste, talmudique, d’exégèse, d’argumentation, de casuistique, de maïeutique, vous êtes un puritain, vous travaillez dans le monde des lettres, des chiffres, des abstractions, vous méprisez les ornement, le luxe, vous cherchez toujours le sens, vous êtes un scientifique, votre critère est la vérité et votre logique fondée sur la logique, le sylogisme.
Il y a d’autres gens qui travaillent dans le monde des formes, des figures, des arts,des représentations, leur critère est la vraisemblance, leur logique fondé sur la rhétorique, l’analogie, les figures de style, leur but est de rendre le beau, de toucher.
Quand le syndicat des bouchers (ou es instituteurs) fait une publicité générique pour la boucherie (ou l’instruction), pour faire le boucher on ne prend pas un vrai boucher parce qu’il n’aurait pas l’air d’un vrai boucher, mais un mannequin ou un acteur qui sera beaucoup plus vrai parce qu’il jouera le boucher en général, l’idée que tout le monde a du boucher, il sera le type du boucher. Prendre le vrai boucher de la boucherie la plus proche aurait été moins vrai que de prendre quelqu’un qui n’a jamais travaillé une seconde dans une boucherie.
Dans le domaine de la représentation, on ne cherche pas le vrai véritable, mais le vrai vraisemblable. Un tract avec une illustration est une représentation, dans la représentation plus large du pouvoir politique : le message doit être vrai, mais il reste une représentation, donc un simulacre, des signes, des mots, des figures, des photos qui simulent et représentent la réalité.
Comme pour le théâtre ou la peinture, c’est l’artifice, le jeu des artifices qui permet le mieux d’atteindre et de représenter la vérité, de la rendre avec naturel.