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Commentaire de SATURNE

sur Cette nuit-là, à bord du Costa Concordia


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SATURNE SATURNE 18 janvier 2012 10:59


 

Bonjour Argo,


« N’attendez pas le jugement dernier, il a lieu tous les jours », disait Camus dans « la Chûte ».


Il y a eu cette nuit-là, là bas, comme une apparence de jugement dernier de la comédie humaine : les bons, les méchants, les justes, les ordures...

Le jugement continue, non pas ici -c’est à votre honneur- mais ailleurs, dans la presse, au procès qui aura lieu.


Car naturellement, les juges auront à juger, c’est leur métier. C’est d’ailleurs pourquoi ils ont tendance à se prendre pour des Dieux.

Parce que normalement, hormis le Christ, personne n’a pour mission de juger les vivants et les morts, n’est-ce pas...


Ce Capitaine, si pitoyable cette nuit-là, peut étre était-il brillant d’habitude. Peut étre, si on relançait les dés, en pleine mer, un autre jour, quand tout le monde est sûr d’y passer, aurait-il été flamboyant à la poupe, distribuant les ordres, partant le dernier à la baille...

Ce couple de Coréens en voyage de noces, sauvés après 2 jours dans leur cabine.. S’ils n’avaient pas été occupés en cabine à faire ce qu’on fait et refait d’ordinaire en voyage de noces.. S’ils avaient eu 30 ans de plus, s’ils avaient été en train de diner, au restaurant, comme les vieux, avec un gilet de sauvetage pour deux, dans le grand bordel...Le mec aurait-il donné son gilet à la fille ? Ou l’inverse ? Hein ?

Qui le sait ? Et ce seraient pourtant les mémes.

Ce qui est sûr, c’est que ce naufrage laisse des survivants. Tant mieux. Tant pis pour le Capitaine, qui n’aura pas trop du temps qu’il lui reste pour y repenser. Qui se foutra peut étre un jour à la baille, ou une corde sous le menton, un soir d’hiver...


Des survivants, c’est ce qu’il n’y a pas eu dans le Rio-Paris. L’équipage sera jugé post-mortem ( il l’est déjà...). Le commandant de bord qui se serait reproché toute sa vie d’étre allé se reposer en cabine, méme s’il en avit le droit. Et les petits jeunes aux manettes.. Le copi qui avait le manche et qui a persisté, presque jusqu’au bout, à cabrer, croyant avoir du décrochage par survitesse. Et l’autre, qui avait compris qu’il fallait piquer pour reprendre de la vitesse et de la portance car c’était un décrochage de sous-vitesse, et qu’on n’a pas écouté.. Il serait-là aujourd’hui à dire « je vous l’avait bien dit qu’on allait à la baille... »

Là c’est différent. Il y a des survivants, des témoins.

Et pourtant, c’est pareil. Qui jugera les vivants et les morts ?
Moi, je ne sais fichtre pas comment j’aurais réagi. En héros, si j’avais embarqué sur cette croisière avec un cancer du poumon pour un dernier tour de piste. Facile.
En chien défendant son instinct de vie si j’avais 25 ans et plein d’espoir pour tout le reste.
Oui, facile.


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