et je rajouterais
//C:/DOCUME%7E1/GABAIX%7E1/LOCALS%7E1/Temp/msohtml1/01/clip_image001.gif" height="2" width="522">LE samedi 6 avril 1974, l’agronome René Dumont, toujours en vadrouille
aux quatre coins de la planète, revient d’Alger. A l’aéroport d’Orly, où il débarque en djellaba, deux hommes
l’attendent, Georges Krassovsky
et Brice Lalonde. Ils lui expliquent que, Pompidou venant de défuncter
subitement et l’élection présidentielle approchant, le mouvement école tout juste naissant a décidé d’y
participer et que ses représentants ne voient qu’un seul candidat possible : lui. Dumont demande une nuit de réflexion, au terme de laquelle il accepte.
Certes, il ne fait pas l’unanimité chez les
écolos : « L’on sent que M. Dumont est
un converti de fraîche date », fait remarquer le précurseur Bernard Charbonneau, dans « La Gueule ouverte » (n° 21). Mais, ayant découvert
sur le tard les méfaits
du productivisme et de
l’agriculture
moderne, Dumont a
fait son mea culpa et a livré, dans « L’utopie ou la mort », une
critique argumentée, écologique, tiers-mondiste du monde comme il va.
Au cours de sa brève campagne, Dumont dénonce « la poursuite absurde de la
croissance industrielle » et
lance en feu
d’artifice une série d’idées nouvelles. Rechercher un type de société à basse
consommation d’énergie. Construire de nouvelles villes ne dépassant
pas 100 000 habitants (« Au-delà, les inconvénients l’emportent sur les
avantages »). Arrêter
les industries d’armement. Restreindre « la
construction démente de voitures individuelles
». Réduire la durée du travail :
« En se
contentant du niveau de
vie de 1920, avec l’équipement de
production dont nous disposons aujourd’hui, il suffirait de travailler
quatre heures par jour, de 25 à 40 ans ». Manger moins de viande
(« Pourquoi
fabriquer des protéines avec les protéines ? C’est absurde »). Supprimer la publicité. Bloquer la croissance de consommation énergétique (« En doublant tous les dix ans,
elle nous condamne
à recourir
à l’énergie nucléaire »). Réduire la croissance de la population dans
les pays riches en supprimant les
allocations familiales après le deuxième
enfant. Diminuer les pouvoirs de
l’Etat et des bureaucrates. Décréter la croissance zéro de l’agglomération
parisienne. Empêcher la spéculation
foncière en municipalisant les sols. Engager partout la plus grande autonomie
possible de toutes les entreprises, de toutes les régions, communes, de tous quartiers, villages : « Il est très important
que les gens participent aux décisions qui
les concernent. » Obtenir, notamment d’EDF, une gestion tripartite : les consommateurs,
les ingénieurs et les ouvriers (et les représentants de l’intérêt national). Instaurer une médecine préventive : « 80 % des médicaments sont inutiles
! » Refuser toute
centrale nucléaire. Stopper
le bétonnage des terres fertiles. « L’écologie implique un
changement complet des structures de production. »
Comme on le voit, il y avait à
boire et à manger. Pourquoi ce bref rappel historique ? Simplement pour montrer que, il y a trente-huit ans, l’écologie politique était plus radicale, offensive, inventive que
celle d’aujourd’hui.
Celle qu’incarne Eva
Joly, qu’on entend si peu et mal qu’elle a, nous dit « Le Monde » (29/1), « disparu
des radars de la présidentielle »...
Jean-Luc Porquet