Cette nouvelle disposition administrative ne risque évidemment pas de changer le monde d’une manière vraiment révolutionnaire. J’en entends parler ici pour la première fois et je m’en réjouis, partageant tout à fait le point de vue des féministes qu’on traîne ici dans la boue d’une manière bien injuste et sans argumenter, comme s’il suffisait d’observer qu’on a scandaleusement bouleversé un ordre des choses destiné à perdurer jusqu’à la fin des temps pour emporter l’adhésion du lecteur.
Il suffirait pourtant d’ouvrir le Littré pour se rendre compte que l’usage de « Mademoiselle » a beaucoup varié. Il signalait moins, sous l’ancien régime, une différence sociale qu’une différence de sexe.
« Autrefois, écrit Littré, titre qu’on donnait à toute femme mariée qui n’était pas noble, ou qui, étant noble, n’était pas titrée ». C’est la première définition. Il ajoute plus bas que c’était aussi le titre qu’on donnait à la fille de Monsieur, frère du roi, « tant qu’elle était fille ».
La seconde définition est la suivante :
« Aujourd’hui, titre qu’on donne ordinairement aux filles »
C’est-à-dire à celles qui, selon la morale du temps, sont censées être restées vierges et, en attendant le mariage, restent sous l’autorité du pater familias. Les moeurs ont changé, Dieu merci, et cette supposition d’une parfaite innocence sexuelle ferait aujourd’hui bien sourire. Le mariage étant tombé en désuétude, et chacun, homme ou femme, étant désormais libre de ses choix, je ne vois pas qu’il y ait lieu de distinguer désormais entre celles qui sont passées par la mairie et celles qui vivent en concubinage ou partagent des moments de leur vie avec un ou plusieurs amants.
Je trouve absurde qu’on féminise les noms des fonctions, qu’on dise Madame La ministre ou qu’on parle d’écrivainE, comme si les fonctions sociales avaient un sexe. C’est aussi absurde que si on voulait changer le genre des objets et, quand on est une femme, de vouloir monter dans une « avionne » pour traverser l’Atlantique. Dans le cas présent, cette nouvelle disposition s’imposait vraiment et il faut s’en réjouir. Au reste, il y a déjà longtemps, si on n’est pas un plouc, qu’on appelle « Madame » toute femme qu’on ne connaît pas, sans jamais lui faire de question sur son statut, ce qui serait équivoque et grossier.