Faisons-nous un petit plaisir alors.
Le poème dans son intégralité : (pensée et non pensées)
Voilà les feuilles sans sève
Qui tombent sur le gazon,
Voilà
le vent qui s’élève
Et gémit dans le vallon,
Voilà
l’errante hirondelle .
Qui rase du bout de l’aile :
L’eau
dormante des marais,
Voilà l’enfant des chaumières
Qui glane
sur les bruyères
Le bois tombé des forêts.
L’onde n’a
plus le murmure ,
Dont elle enchantait les bois ;
Sous des
rameaux sans verdure.
Les oiseaux n’ont plus de voix ;
Le soir
est près de l’aurore,
L’astre à peine vient d’éclore
Qu’il
va terminer son tour,
Il jette par intervalle
Une heure de
clarté pâle
Qu’on appelle encore un jour.
L’aube n’a plus
de zéphire
Sous ses nuages dorés,
La pourpre du soir
expire
Sur les flots décolorés,
La mer solitaire et
vide
N’est plus qu’un désert aride
Où l’oeil cherche en vain
l’esquif,
Et sur la grève plus sourde
La vague orageuse et
lourde
N’a qu’un murmure plaintif.
La brebis sur les
collines
Ne trouve plus le gazon,
Son agneau laisse aux
épines
Les débris de sa toison,
La flûte aux accords
champêtres
Ne réjouit plus les hêtres
Des airs de joie ou
d’amour,
Toute herbe aux champs est glanée :
Ainsi finit une
année,
Ainsi finissent nos jours !
C’est la saison où
tout tombe
Aux coups redoublés des vents ;
Un vent qui vient
de la tombe
Moissonne aussi les vivants :
Ils tombent alors par
mille,
Comme la plume inutile
Que l’aigle abandonne aux
airs,
Lorsque des plumes nouvelles
Viennent réchauffer ses
ailes
A l’approche des hivers.
C’est alors que ma
paupière
Vous vit pâlir et mourir,
Tendres fruits qu’à la
lumière
Dieu n’a pas laissé mûrir !
Quoique jeune sur la
terre,
Je suis déjà solitaire
Parmi ceux de ma saison,
Et
quand je dis en moi-même :
Où sont ceux que ton coeur aime ?
Je
regarde le gazon.
Leur tombe est sur la colline,
Mon pied
la sait ; la voilà !
Mais leur essence divine,
Mais eux,
Seigneur, sont-ils là ?
Jusqu’à l’indien rivage
Le ramier
porte un message
Qu’il rapporte à nos climats ;
La voile passe
et repasse,
Mais de son étroit espace
Leur âme ne revient
pas.
Ah ! quand les vents de l’automne
Sifflent dans les
rameaux morts,
Quand le brin d’herbe frissonne,
Quand le pin
rend ses accords,
Quand la cloche des ténèbres
Balance ses
glas funèbres,
La nuit, à travers les bois,
A chaque vent qui
s’élève,
A chaque flot sur la grève,
Je dis : N’es-tu pas
leur voix ?
Du moins si leur voix si pure
Est trop vague
pour nos sens,
Leur âme en secret murmure
De plus intimes
accents ;
Au fond des coeurs qui sommeillent,
Leurs souvenirs
qui s’éveillent
Se pressent de tous côtés,
Comme d’arides
feuillages
Que rapportent les orages
Au tronc qui les a portés
!
C’est une mère ravie
A ses enfants dispersés,
Qui
leur tend de l’autre vie
Ces bras qui les ont bercés ;
Des
baisers sont sur sa bouche,
Sur ce sein qui fut leur couche
Son
coeur les rappelle à soi ;
Des pleurs voilent son sourire,
Et
son regard semble dire :
Vous aime-t-on comme moi ?
C’est
une jeune fiancée
Qui, le front ceint du bandeau,
N’emporta
qu’une pensée
De sa jeunesse au tombeau ;
Triste, hélas !
dans le ciel même,
Pour revoir celui qu’elle aime
Elle revient
sur ses pas,
Et lui dit : Ma tombe est verte !
Sur cette
terre déserte
Qu’attends-tu ? Je n’y suis pas !
C’est un
ami de l’enfance,
Qu’aux jours sombres du malheur
Nous prêta
la Providence
Pour appuyer notre cœur ;
Il n’est plus ; notre
âme est veuve,
Il nous suit dans notre épreuve
Et nous dit
avec pitié :
Ami, si ton âme est pleine,
De ta joie ou de ta
peine
Qui portera la moitié ?
C’est l’ombre pâle d’un
père
Qui mourut en nous nommant ;
C’est une soeur, c’est un
frère,
Qui nous devance un moment ;
Sous notre heureuse
demeure,
Avec celui qui les pleure,
Hélas ! ils dormaient hier
!
Et notre coeur doute encore,
Que le ver déjà dévore
Cette
chair de notre chair !
L’enfant dont la mort cruelle
Vient
de vider le berceau,
Qui tomba de la mamelle
Au lit glacé du
tombeau ;
Tous ceux enfin dont la vie
Un jour ou l’autre
ravie,
Emporte une part de nous,
Murmurent sous la poussière
:
Vous qui voyez la lumière,
Vous souvenez-vous de nous ?
Ah
! vous pleurer est le bonheur suprême
Mânes chéris de quiconque
a des pleurs !
Vous oublier c’est s’oublier soi-même
:
N’êtes-vous pas un débris de nos coeurs ?
En
avançant dans notre obscur voyage,
Du doux passé l’horizon est
plus beau,
En deux moitiés notre âme se partage,
Et la
meilleure appartient au tombeau !
Dieu du pardon ! leur Dieu !
Dieu de leurs pères !
Toi que leur bouche a si souvent nommé
!
Entends pour eux les larmes de leurs frères !
Prions pour
eux, nous qu’ils ont tant aimé !
Ils t’ont prié pendant leur
courte vie,
Ils ont souri quand tu les as frappés !
Ils ont
crié : Que ta main soit bénie !
Dieu, tout espoir ! les
aurais-tu trompés ?
Et cependant pourquoi ce long silence
?
Nous auraient-ils oubliés sans retour ?
N’aiment-ils plus ?
Ah ! ce doute t’offense !
Et toi, mon Dieu, n’es-tu pas tout amour
?
Mais, s’ils parlaient à l’ami qui les pleure,
S’ils nous
disaient comment ils sont heureux,
De tes desseins nous
devancerions l’heure,
Avant ton jour nous volerions vers eux.
Où
vivent-ils ? Quel astre, à leur paupière
Répand un jour plus
durable et plus doux ?
Vont-ils peupler ces îles de lumière ?
Ou
planent-ils entre le ciel et nous ?
Sont-ils noyés dans
l’éternelle flamme ?
Ont-ils perdu ces doux noms d’ici-bas,
Ces
noms de soeur et d’amante et de femme ?
A ces appels ne
répondront-ils pas ?
Non, non, mon Dieu, si la céleste
gloire
Leur eût ravi tout souvenir humain,
Tu nous aurais
enlevé leur mémoire ;
Nos pleurs sur eux couleraient-ils en vain
?
Ah ! dans ton sein que leur âme se noie !
Mais
garde-nous nos places dans leur cœur ;
Eux qui jadis ont goûté
notre joie,
Pouvons-nous être heureux sans leur bonheur ?
Etends
sur eux la main de ta clémence,
Ils ont péché ; mais le ciel est
un don !
Ils ont souffert ; c’est une autre innocence !
Ils ont
aimé ; c’est le sceau du pardon !
Ils furent ce que nous
sommes,
Poussière, jouet du vent !
Fragiles comme des
hommes,
Faibles comme le néant !
Si leurs pieds souvent
glissèrent,
Si leurs lèvres transgressèrent
Quelque lettre
de ta loi,
Ô Père ! ô juge suprême !
Ah ! ne les vois pas
eux-mêmes,
Ne regarde en eux que toi !
Si tu scrutes la
poussière,
Elle s’enfuit à ta voix !
Si tu touches la
lumière,
Elle ternira tes doigts !
Si ton oeil divin les
sonde,
Les colonnes de ce monde
Et des cieux chancelleront :
Si
tu dis à l’innocence :
Monte et plaide en ma présence !
Tes
vertus se voileront.
Mais toi, Seigneur, tu possèdes
Ta
propre immortalité !
Tout le bonheur que tu cèdes
Accroît ta
félicité !
Tu dis au soleil d’éclore,
Et le jour ruisselle
encore !
Tu dis au temps d’enfanter,
Et l’éternité
docile,
Jetant les siècles par mille,
Les répand sans les
compter !
Les mondes que tu répares
Devant toi vont
rajeunir,
Et jamais tu ne sépares
Le passé de l’avenir ;
Tu
vis ! et tu vis ! les âges,
Inégaux pour tes ouvrages,
Sont
tous égaux sous ta main ;
Et jamais ta voix ne nomme,
Hélas !
ces trois mots de l’homme :
Hier, aujourd’hui, demain !
Ô
Père de la nature,
Source, abîme de tout bien,
Rien à toi ne
se mesure,
Ah ! ne te mesure à rien !
Mets, à divine
clémence,
Mets ton poids dans la balance,
Si tu pèses le
néant !
Triomphe, à vertu suprême !
En te contemplant
toi-même,
Triomphe en nous pardonnant !
11/05 23:39 - Mor Aucon
Très beau texte qui n’a rien d’impudique puisqu’il parle vrai et dont je ne (...)
07/05 23:10 - Valeska
Si ça peut amuser un dingo de service pourquoi pas ... Je t’avouerais que dans le fond, (...)
07/05 20:18 - Gerard Lucon
@ Valeska, suite a ta reaction tu as gagne un -1 .. j’ai donc plusse pour revenir a zero (...)
07/05 19:10 - Valeska
@Gerard. Je vous rassure, vous n’êtes pas un cas unique, dés que je poste un com, dans la (...)
07/05 17:14 - chapoutier
bonjour Ariane de tout cœur avec vous et vos proches. les mots sembles toujours insipides (...)
07/05 12:46 - Gerard Lucon
@ Ariane, Morice qui a l’habitude de cartonner meme les gens qui le soutiennent a ete « (...)
Agoravox utilise les technologies du logiciel libre : SPIP, Apache, Ubuntu, PHP, MySQL, CKEditor.
Site hébergé par la Fondation Agoravox
A propos / Contact / Mentions légales / Cookies et données personnelles / Charte de modération