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Commentaire de Furax

sur Leur morale et la nôtre (1938) Léon Trotsky


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Furax Furax 31 mai 2012 21:08
Attaque de Kronstadt par l’Armée rouge
Attaque de Kronstadt par l’Armée rouge.

Le premier assaut, le 7 mars, fut un échec. Les soldats de l’Armée rouge doivent attaquer sur plusieurs kilomètres de glace, sous les obus et la mitraille de Kronstadt. Des grappes entières de soldats périssent noyés dans l’eau glacée ; percés par les obus, des régiments s’affolent et se débandent. « Après que le Golfe eut avalé ses premières victimes, » l’historien Paul Avrich relève que « certains des soldats rouges, y compris un corps de Peterhof Kursanty, commencèrent à passer aux insurgés. D’autres refusèrent d’avancer, malgré les menaces des canonnières à l’arrière qui eurent ordre de tirer sur les hésitants. Le commissaire du groupe nord signala que ses troupes voulurent envoyer une délégation à Kronstadt pour connaître les demandes des insurgés. » L’historien trotskiste Jean-Jacques Marie conteste cette version ; il attribue la menace de tirer sur les hésitants à Pétritchenko, et relève que les régiments qu’il cite n’arriveront sur place que le lendemain.

La nuit du 16 au 17 mars, « la troïka extraordinaire d’Aleksei Nikolaev » arrêta plus de 100 meneurs de l’insurrection, dont 74 sont publiquement abattus. L’assaut final eu lieu le 17 et, une fois les forces bolcheviques entrées finalement dans la place, « les troupes attaquantes prendront vengeance pour leurs camarades tombés dans une orgie de sang11 ». Après 10 jours de constantes attaques, la révolte de Kronstadt est finalement été écrasée par l’Armée rouge.

Suite de la répression ; bilan

La répression ne se termina pas ici. Des prisonniers emmenés à Pétrograd furent exécutés au long des mois qui suivirent. « Ce massacre prolongé fut dirigé ou autorisé par Dzerjinski. (...) La responsabilité du Comité central bolchevique aura été simplement énorme [et] la répression qui s’ensuivit... inutilement barbare. »12)

Les pertes bolcheviques sont estimées à plus de 10 000 morts. Aucun chiffre fiable sur les rebelles tués, exécutés par la Tchéka plus tard ou déportés dans des camps de prisonniers n’est disponible. Nicolas Werth indique que la répression a fait des milliers de victimes13. Après l’écrasement de la révolte, 4836 marins de Kronstadt furent arrêtés et transférés en Crimée ou dans le Caucase. Lénine ordonnera le 19 avril qu’ils soient finalement envoyés aux camps de travail obligatoires (appelés plus tard goulags) des régions d’Arkhangelsk, de Vologda et de Mourmansk. Huit mille marins, soldats et civils s’échapperont vers la Finlande en marchant sur la glace. Les équipages du Petropavlovsk et du Sébastopol combattirent jusqu’au dernier, de même que les cadets de l’école de mécanique, du détachement de torpilles et de l’unité des communications. Un communiqué statistique de la section spéciale de la Troïka extraordinaire du 1er mai déclara que 6528 rebelles furent arrêtés, 2 168 exécutés (33 %), 1 955 condamnés au travail obligatoire (dont 1486 pour cinq années), et 1 272 libérés. Les familles des rebelles furent déportées en Sibérie, considérée comme « seule région appropriée » pour eux.

Après que la révolte eut été anéantie, le gouvernement bolchevique réorganisa la forteresse. Alors qu’il avait maté la révolte au nom du « pouvoir aux soviets », le commandant militaire nouvellement désigné pour Kronstadt abolit complètement le Soviet local et réorganisa la forteresse « avec l’aide d’une troïka révolutionnaire » (c’est-à-dire un comité de trois hommes spécialement désignés)14. Le journal de Kronstadt fut renommé « Krasnyi Kronshtadt » (Kronstadt Rouge) et déclara dans son éditorial que « les dispositifs fondamentaux » de Kronstadt étaient ramenés à la « dictature du prolétariat » alors que leurs « phases initiales » avaient été simplement faites de « restrictions à la liberté politique, de terreur, centralisme, discipline militaire et direction de tous des moyens et des ressources vers la création d’un appareillage offensif et défensif d’État. »15. Les vainqueurs commencèrent à éliminer toutes traces de la révolte, la place d’ancre devenant « Place révolutionnaire » et les cuirassés rebelles Petropavlovsk et Sébastopol étant rebaptisés respectivement Marat et Commune de Paris.


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