Pour mettre un terme à ce faux débat,
je recopie ci-dessous un paragraphe d’une analyse de Pierre-André
Taguieff dont il constitue la plus idéale illustration. C’est dans
« Prêcheurs de haine – traversée de la judéophobie
planétaire », paru en 2004. Page 309.
Taguieff n’est pas juif. Au lecteur
curieux, je ne saurais trop recommander la lecture du récent bouquin
de Jacques Tarnéro : « Le nom de trop – Israël
illégitime », paru en 2011 chez Armand Collin. Le bouquin de
Taguieff comporte plus de mille pages, celui de Tarnero 260.
« Pour les nouveaux antijuifs –
conscient ou non, déclarés ou fuyants -, tous les malheurs du monde
s’expliquent par l’existence d’Israël. Celle-ci incarne par
excellence la causalité diabolique, « Israël est coupable »,
« Les sionistes sont coupables », « Les Juifs sont
coupables » ; les accusations s’enchaînent et tendent à se
confondre. Et l’israélophobie va de pair avec une palestinophilie
inconditionnelle. Dans certains milieux d’extrême gauche (où les
militants des mouvements « antimondialisation »,
principale forme de recyclage du projet communiste et de la
mythologie « anti-impérialiste », sont particulièrement
actifs), le Palestinien a remplacé le Prolétaire. L’engagement
révolutionnaire tend à se réduire à un engagement inconditionnel
en faveur du « camp palestinien ». Le mythe manichéen
fonctionne : pauvres contre riches, faibles contre puissants, dominés
contre dominants. Dans ce cadre interprétatif, le Palestinien a
toujours raison, quoi qu’il puisse faire : même les plus sanglants
des attentats relevant du terrorisme dit « aveugle », où
des Juifs sont tués en tant que Juifs (femmes,enfants et bébé
compris), sont décryptés selon le slogan du terrorisme « arme
des pauvres » et justifiés au nom de la « juste »
révolte des « dominés ». Aux pires massacres commis par
des terroristes palestiniens sont trouvées des circonstances
atténuantes, les « belles âmes » de la « gauche
progressiste » se montrant particulièrement inventives en la
matière. Et, par une analogie devenue ordinaire, le « jeune »
d’une banlieue française, s’il est issu de l’immigration maghrébine,
peut jouer le rôle de l’exclu-révolté, celui du Palestinien à la
française, pure incarnation d’un fantasme révolutionnairement
correct(*). Beurophilie rime avec palestinophilie, dans l’espace
médiatique où ces fictions du Bien ou de la Juste Révolte sont
indéfiniment mises en scène. Un sommaire dualisme manichéen est
aux principe des préférences, des choix et des engagements : le
supposé faible a toujours raison, le supposé fort a toujours tort ;
le dominant est toujours méchant, le dominé est toujours vertueux ;
le fort/dominant est par nature haïssable, le faible/dominé est
nécessairement admirable. Les « idiots utiles » de
l’islamisme se recrutent pour l’essentiel dans les milieux du nouveau
gauchisme (où se rejoignent chrétiens tiers-mondistes, trotskistes
et communistes), à travers l’engagement propalestinien […]. Une
nouvelle fois, au nom des « pauvres et/ou des opprimés ou des
victimes, un discours de haine se diffuse, qui se fixe principalement
sur Israël traité comme un Etat en trop. Les violences terroristes
sont transfigurées en « actes de désespoir » dus à des
« humiliations » répétées et commis par des
« pauvres » contre des « riches » dominateurs
: c’est ainsi que sont effacées les principales dimensions du
terrorisme antijuif, la pulsion fanatique, la visée stratégique et
le projet politique régulateur (l’islamisation du monde). »
(*) Le bouquin de Taguieff est paru en
2004. Voir, depuis, les explications sociologisantes du crime de
Mehra dans la presse. Certaines, sur AgoraVox, confinaient presque à
l’absolution.