L’opposition critique Chavez pour une présumée violation des libertés. Le parti du président revendique que le système actuel a été le plus participatif de l’histoire
Assis à des tables d’écoliers, dix membres des conseils municipaux du quartier 10 de Enero, à Caracas, débattent de la création d’une entreprise de manutention des ascenseurs pour le voisinage. Les conseillers, qui l’auront créée, en seront les propriétaires. Ils pourront compter sur le financement et l’appui technique du gouvernement national et de ses institutions. La nuit est tombée. Les participants de la réunion vont discuter des statuts de la société qu’ils souhaitent créer.
« Ce qui est sûr, c’est qu’elle sera administrée par la communauté », souligne Darwin Jaimes, conseiller de Las Palmas 1320. « Aucun gouvernement ou homme d’affaires ne pourra prendre possession de l’entreprise ». Cette aspiration n’habite pas seulement ce traditionnel quartier de Caracas. Depuis l’approbation des lois dites du pouvoir populaire en décembre 2010, de nombreuses initiatives similaires ont été enregistrées.
Les partis de l’opposition critiquent ce nouveau modèle qui permet à l’État de repasser directement à ces organisations de quartier des recours et des attributions. Ils estiment que ce mécanisme vide les administrations régionales et municipales, dans lesquelles ils conservent une forte présence et que ce mécanisme centralise plus de pouvoirs entre les mains de l’exécutif national.
Les défenseurs de cette politique ne se donne même pas la peine de réfuter la thèse de la purge des anciens corps administratifs. « Nous voulons remplir le pays de communes », affirme Aristóbulo Istúriz, de 66 ans. Il est vice-président de l’Assemblée Nationale et du Parti Socialiste Uni du Venezuela (PSUV), principal parti du chavisme. « L’état capitaliste bourgeois est hiérarchisé. L’état fédéral commande le régional, qui l’emporte sur le municipal, qui domine le quartier. En-dessous de cette structure bureaucratique, il y a le peuple, loin du pouvoir. Notre stratégie consiste à abattre cette pyramide et à la rendre horizontale ».
Selon les données officielles, il existe déjà 46 000 communes à travers le pays. Chacune d’entre elles réunit des zones de quartier déterminé, dans lesquelles vivent entre 150 et 400 familles. Le conseil de la commune est élu au suffrage populaire. Dans les zones rurales et parmi les populations indigènes, la base de démarcation est plus petite. Le conseil débat des questions sociales de sa localité et de l’organisation des services publics. Mais cet organisme fait en outre partie d’un nouveau système économique. Il peut créer des entreprises communales, comme celle du 23 de Enero, constituer des sociétés mixtes avec des hommes d’affaires, ou des coopératives. Plusieurs communes peuvent s’unir et créer un projet commun.
La commune, selon la législation approuvée par le parlement, est la nouvelle unité élémentaire de l’État fédéral. Malgré une forte résistance de l’opposition, plusieurs instruments d’imposition communale ont été réglementés. Ils incluent une partie des impôts locaux et régionaux, des subventions nationales, des barèmes pour certains services. Les infrastructures publiques de tout genre – écoles, centres de santé, aires de loisirs – peuvent passer sous sa tutelle.
« Nous voyons la décentralisation comme le transfert des ressources vers les endroits où se trouvent les problèmes, à travers les communautés organisées », proclame Aristóbulo Istúriz. « Le vieux concept de démocratie représentative et exclusivement politique nous poussait à la centralisation. Ce qui créait des strates bureaucratiques de pouvoir. Maintenant nous forgeons des espaces de participation où le peuple vit. Les personnes ne se sentent plus fragmentées, elles se sentent une partie de l’État national ».
L’opposition
L’opposition ne voit pas d’un bon œil cette voie. Elle essaie de traiter tout ce qui remet en question la démocratie représentative comme une attaque au régime démocratique en général. Pourtant le pluripartisme existe. Treize élections ont été scrutées par des observateurs internationaux. La majorité des médias est contrôlée par la droite. Mais les adversaires de Chavez insistent, au Venezuela et à l’étranger, à brosser le portrait d’une espèce de tyran mou.
Face à cette perte accélérée de pouvoir, la réaction de ces segments de la société compte sur l’engagement de différentes entités qui naviguent en orbite des puissances occidentales, à commencer par la Maison Blanche. Il y a des signaux évidents de mécontentement, lancés spécialement par les États-Unis, quant à la consolidation d’un processus qui défie son hégémonie en Amérique latine mais aussi au sein du délicat noyau des nations exportatrices de pétrole.
Finalement, les groupes conservateurs n’ont pas seulement été dégradés dans l’administration nationale. Le président, fort d’une majorité parlementaire et de victoires successives dans les urnes, leur a arraché des positions dominantes dans les cours de Justice, dans les forces armées, dans la diplomatie et dans d’autres sphères de l’État. Chavez n’a jamais caché son intention de mener une révolution politique, de forme « démocratique et pacifique, mais pas sans arme ». Faisant allusion à son intention de se protéger de putschs internes ou des menaces étrangères.
À plusieurs reprises, le président vénézuélien a évoqué l’effondrement de Salvador Allende, président socialiste chilien entre 1970 et 1973, qui devait servir de leçon à la gauche. Pour implanter les transformations sociales en respectant l’ordre constitutionnel, la gauche doit inhiber la possibilité que ses ennemis recourent à des soulèvements militaires ou des opérations internationales. Allende est tombé quand l’armée s’est unie aux partis de droite, qui avaient perdu du terrain dans les urnes, et a conduit le coup d’État commandé par le général Augusto Pinochet. En avril 2002, Chavez a presque vécu la même chose. Renversé par une insurrection civico-militaire, articulée par la droite et les principaux médias, il a récupéré le pouvoir en 48 heures grâce une ample mobilisation populaire et à la réaction d’officiers légalistes.
Les membres de l’opposition considèrent cependant que ces changements à la tête des pouvoirs de l’État affecte l’ordre démocratique et menace même les droits de l’homme. Aucune institution internationale de poids n’a entériné cette dénonciation. Le Venezuela est toujours considéré comme un pays qui respecte pleinement les règles démocratiques. Même l’Organisation des États Américains (OEA) dont le siège est à Washington ne remet pas en cause cette évaluation.
Droits économiques et sociaux
Professeur d’histoire de métier et ancien maire de Caracas sous la IV République (le régime qui a précédé l’accession de Chavez au pouvoir en 1999), Isturiz conteste de façon pédagogique les insinuations qui portent sur la faible teneur démocratique du processus mené par Chavez. « Il y a deux conceptions de la démocratie, il est normal qu’elles soient confrontées l’une à l’autre », souligne-t-il. « L’une d’elle, d’origine libérale, se limite à garantir les libertés et les droits politiques. Elle n’a aucun contenu social et elle circonscrit le rôle du citoyen au vote, qui délègue le pouvoir à ses représentants. Nous avons fait un bond vers un concept plus large, la démocratie participative, qui inclut les sauvegardes politiques, mais incorpore aussi des droits économiques et sociaux, en plus de créer des institutions qui favorisent une action politique permanente de la citoyenneté ».
Pour le dirigeant du PSUV, la conception participative prédomine depuis la Constitution de 1999, qui a fondé la V République. Cela est mis en évidence par certains articles qui démontrent la prédominance de cette tendance. « Dans la Carte de 1961, il était dit que la souveraineté réside dans le peuple, qui l’exercerait par le suffrage pour les organes du pouvoir public », indique-t-il. « La nouvelle loi majeure va plus loin, car elle affirme que la souveraineté ne peut pas être transférée et qu’elle peut être exercée de forme indirecte, via le vote, ou de forme directe à travers des mécanismes créés par initiative populaire ».
Les ennemis de Chavez l’accusent de saper les fondements démocratiques. Cependant, il est difficile de trouver une institution qui ait été révoquée lors des 14 dernières années. Les Bolivariens ont maintenu intacts les mécanismes de la démocratie représentative, mais ils ont aussi ouvert de nouvelles sphères et espaces de décisions qui sont étrangers à la pensée plus conservatrice.
En vérité, le Venezuela peut arborer certains attributs constitutionnels assez rares. Sa Constitution prévoit des référendums et des plébiscites qui peuvent être convoqués par le Parlement, par le gouvernement ou par la simple volonté autonome des citoyens. Dans ce cas, il faut que la pétition réunisse 20 % des électeurs. Ces consultations, en plus d’être impositives et irrévocables, peuvent aussi interrompre le mandat de parlementaires et de gouvernants. Le président a déjà affronté cet atout pour la démocratie, en 2004. Il a préservé son mandat avec 60 % des voix.
Aucun pays affilié à la démocratie occidentale ne possède de réglementations d’une telle envergure dans son répertoire constitutionnel. Certains analystes interprètent ces dispositifs comme des moyens d’asservir les institutions à partir de la furie plébiscitaire manipulée par un chef d’État populiste. Pour les Chavistes, cependant, ce sont des armes dans la besace du président qui a misé sur la rupture avec la vieille politique. Celle des accords parlementaires et d’accommodement avec les intérêts filtrés par la bureaucratie étatique. Bien que, dans la pratique, tout soit plus confus et précipité, le choc des idées est bien réel sur le terrain.
Le débat, cependant, ne laisse pas la droite vénézuélienne très à l’aise. Proposer la réduction de la participation politique pourrait s’avérer un positionnement électoral risqué et en contradiction avec ces forces politiques qui veulent se présenter comme les champions de la démocratie contre un leader soi-disant autoritaire. Vues les circonstances, l’opposition semble préférer un discours qui condamne d’éventuelles manipulations ou de restrictions dans la mise en œuvre des garanties constitutionnelles.
« Il n’y a pas d’égalité de conditions politiques », réclame Leopoldo Lopez, du parti Vontade Popular (Volonté Populaire). Il est l’un des leaders du MUD (Mesa de Unidade Democratica), alliance de partis qui soutient Henrique Capriles dans la course à la présidentielle. « L’utilisation de recours publics, dans le domaine des communications, est tendancieuse. Le jeu, bien que démocratique, est déséquilibré ».
Pour le PSUV, ces critiques prédisent que l’opposition pourrait se préparer à mettre en doute la légalité des élections en cours et ne pas reconnaître les résultats d’octobre. Durant les derniers mois, de fait, plusieurs délégations des partis de droite ont voyagé en Europe et aux États-Unis avec pour objectif de faire part de leurs préoccupations concernant la régularité des élections présidentielles. Et ce malgré le système de vote électronique vénézuélien considéré parmi les plus sûr au monde. Chavez affirme fréquemment qu’il respectera les résultats des urnes, quel qu’en soit le verdict. Les socialistes exigent de leurs adversaires le même engagement.......
Source : http://www.legrandsoir.info/dossier-venezuela-les-annees-chavez.html
14/09 19:40 - El Frances Loco
Propagande chaviste en plein ! Quelle façon de manipuler la vérité...mais il ne vous est pas (...)
14/09 16:47 - El Frances Loco
Entre autres...sachez que les habitants ne sont pas propriétaires, comme c’est indiqué, (...)
14/09 06:15 - El Frances Loco
14/09 06:11 - El Frances Loco
Le meilleur moyen d’être informé et de se rendre compte de ce qui se passe c’est (...)
14/09 05:46 - El Frances Loco
Non, c’est vrai, c’est du vécu je peux le confirmer, j’y vis et je peux en (...)
14/09 04:59 - El Frances Loco
Agoravox utilise les technologies du logiciel libre : SPIP, Apache, Ubuntu, PHP, MySQL, CKEditor.
Site hébergé par la Fondation Agoravox
A propos / Contact / Mentions légales / Cookies et données personnelles / Charte de modération