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Commentaire de Bovinus

sur Communisme et libéralisme : deux faces d'une seule et même médaille


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Bovinus Bovinus 6 septembre 2012 13:29

Désolé de pas avoir répondu plus tôt, je n’étais pas dispo.

Vous déniez l’utilité de la science car elle produit de grands maux dites vous du moins en gros et en résumé .Permettez moi de ne pas être d’accord avec cette assertion .

Ah ! on y arrive enfin. C’est tout le fond de la question ! Prenez une fourchette métallique. C’est fait pour manger, mais on peut aussi tuer quelqu’un avec. Néanmoins, ça reste tout de même relativement compliqué si l’agressé est en bonne forme physique ; au pire, il peut s’enfuir. On peut en conclure que le concept de la fourchette est tout de même assez peu dangereux, beaucoup moins en tout cas que ne le serait celui de l’arme nucléaire.

Le nucléaire, on nous en a vanté les louanges aux débuts de son développement. Maintenant qu’on a un peu plus de recul, on s’aperçoit que finalement, c’est beaucoup moins merveilleux qu’on aurait pu le penser. Sans même parler du problème du nucléaire militaire, les soucis posés par le nucléaire civil (retraitement des déchets, coûts extrêmement élevés d’entretien et de démantèlement des centrales en fin de vie, sans parler des risques encourus en cas de dysfonctionnement). Tout bien pesé, finalement, le gain qualitatif par rapport à de « simples » centrales au charbon, au fuel ou au gaz est très largement relativisé.

Les implants, entendons-nous bien, je ne les condamne pas d’avance ; ce que je dis, c’est que cette question nécessiterait une très sérieuse réflexion eu égard aux possibles conséquences néfastes qui pourraient en découler. C’est très simple, en fait : il suffit de peser ce que cela apporterait de bon, et ce que cela pourrait provoquer de mauvais (en termes de coût humain et social, évidemment). Si il s’avérait que les coûts dépassent les gains, eh bien, il conviendrait probablement d’en conclure que c’est une champ d’application qui ne vaut pas tellement le coup.

La même réflexion pourrait être appliquée aux transplantations d’organes. On nous en parle comme si c’était une percée fantastique de la médecine, alors qu’il apparaît comme très probable que cela ne concerne qu’un nombre d’individus extrêmement faible (par rapport à des fléaux tels que le cancer ou les nouvelles pandémies).

Ce n’est qu’en ce sens qu’il faut comprendre ma critique de la science, il ne s’agit pas d’une position de principe. Rien n’est aussi simple qu’il apparaît au premier abord, surtout avec le vivant. Prenez le cas des vaccins, par exemple. Il apparaît aujourd’hui comme tout à fait établi que le recours trop fréquent aux vaccins affaiblit (globalement) le système immunitaire d’une population, et la rend paradoxalement beaucoup plus vulnérable aux mutations virales, qui est un processus naturel et certain. Le recours à la vaccination augmente la population, mais diminue sa résistance et sa capacité globale à résister aux infections, ce qui l’expose à une diminution drastique en cas d’arrivée d’une souche de virus mutante. Au vu de ce qui précède, la question de savoir si le recours à la vaccination doit être automatique ou non est beaucoup moins simple qu’il n’y paraît au premier abord.

On voit un mécanisme similaire à l’œuvre avec les pesticides : ceux-ci n’éradiquent jamais complètement une population de parasites. Un certain pourcentage survit, développe des résistances naturelles au pesticide auquel cette population est exposée, puis se met à proliférer. Résultat : non seulement le pesticide devient complètement inefficace sur le long terme, mais de plus, contribue à l’apparition de populations particulièrement résistantes et virulentes. La réponse de l’industrie chimique consiste alors à produire des pesticides plus puissants, ce qui, au final, exerce un impact indéniable sur les populations humaines, qui sont jusqu’à preuve du contraire le consommateur final. On peut alors se demander si, dès le départ, il était bien utile et bien censé de recourir aux pesticides, d’autant plus qu’il existe quasi-systématiquement des techniques naturelles pour empêcher les parasites de manger les cultures. La question est d’autant plus lourde de nos jours, alors que l’on assiste au dépérissement inexpliqué des colonies d’abeilles domestiques en de très nombreux pays (majoritairement occidentaux, toutefois). Si ce mécanisme continue, les pertes pour la planète seraient colossales, et certainement telles que tout ce qui fut gagné en productivité grâce aux produits chimiques, même sur tout le siècle précédent, apparaîtrait comme ridicule face aux conséquences de la disparition de ce chaînon vital de nos écosystèmes.

Votre paragraphe sur Rousseau est tout à fait pertinent, je l’aurais cité moi-même si vous ne l’aviez fait. La question de fond, c’est en effet bien de savoir où le recours au naturel donne de meilleurs résultats que le recours au « social » (autrement dit, à la « science » ; d’ailleurs, j’aurais plutôt mentionné le « Discours sur les origines de l’inégalité parmi les hommes » que le « Contrat social »). Je pense qu’après les derniers siècles de « progrès » forcené, l’heure est venue de faire une pause et de dresser un bilan. Tout n’est certainement pas à jeter, mais les conséquences d’une mauvaise utilisation de nos propre découvertes nous dépassent bien trop souvent pour qu’on puisse continuer à s’y plonger de façon aussi irresponsable.

C’est bien, au fond, une question de « sagesse ». La différence entre vous et moi, c’est que vous avez, semble-t-il, confiance dans la capacité humaine à faire preuve de sagesse. Moi, aucune.

Or, l’humanité a accédé à un tel niveau de puissance technologique, que le risque d’auto-destruction est devenu intolérable eu égard aux capacités de « raison », de « sagesse » ou de « bon sens » démontrées par l’humanité. Du temps des guerres napoléoniennes, et même encore du temps de la 2ème guerre mondiale, le pire que l’humanité aurait pu faire eut été d’exterminer quelques millions de ses propres représentants. Aujourd’hui, les enjeux sont différents, puisque nous sommes devenus capables d’exterminer la totalité de ces derniers, et même, ce qui serait pire encore, de détruire la planète entière, ou en tout cas, de la rendre invivable pour une longue période de temps (à notre échelle, bien sûr). Il en résulte qu’on ne peut plus poser la question de notre rapport à la technologie et à la science avec la même désinvolture qu’autrefois.


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