Outre le court-termisme des dirigeants (qui les amène à caresser dans le
sens du poil la majorité, ou à ne pas entrer en rupture avec une
situation bien établie - dans notre cas, la dominance de l’électricité
nucléaire en France), on ne peut écarter une suspicion d’influence
significative de la part du lobby du nucléaire. De nombreux articles
mettent en évidence la puissance de ce lobby, qui aurait par exemple
réussi jusqu’ici à tuer dans l’œuf tout émergence (et tout
subventionnement sérieux) d’une filière de production d’énergie
renouvelable digne de ce nom. A long terme cela nous pénalisera
sérieusement via-à-vis de nos voisins (Danemark, devenu leader mondial
de l’éolien, mais aussi Allemagne).
Un de mes amis, éminent
professeur de finances, me disait, il y a quelques mois : "La question
n’est pas de probabiliser un accident nucléaire (car faible proba x fort
coût = faible coût en espérance), mais de savoir si le pays pourrait
survivre à une catastrophe nucléaire - c’est à dire regarder le coût
total d’un tel accident". Il prédisait que si la France vivait un
Tchernobyl (donc un accident), le pays (le gouvernement, l’Etat) n’y
survivrait pas, le coût étant impossible à supporter...
Ce à quoi
j’avais répondu : "On peut aussi prendre le problème sous l’angle du
coût réel du kWh, lequel devrait comprendre le remboursement des sommes
très lourdes investies par l’état pour développer le nucléaire
(amortissement), le coût du traitement et du stockage des déchets, les
coûts environnementaux (qui ne sont d’une façon générale que très
rarement pris en compte), le coût de démantèlement futur des centrales,
et... la prime de risque.
La prime de risque ? Supposons qu’on arrive
à calculer ce qu’il en coûterait d’assurer le pays contre une
catastrophe de type Fukushima en vallée du Rhone ou à Nogent sur Marne.
Est-ce qu’une telle prime au kWh aurait un sens ? Autrement dit, est-on
prêt à échanger notre vie actuelle perdue (évacuation totale et durable
de Paris, par exemple) contre de l’argent ?
On notera d’ailleurs
qu’en ce qui concerne Fukushima, le gouvernement japonais a reconnu
récemment qu’il avait sérieusement envisagé la perte de Tokyo. Ca fait
froid dans le dos..."
J’en profite pour vous livrer un lien vers un article provocant : l’humanité sous-estime-t-elle le risque de sa propre extinction ? paru dans le monde du 13/03/12, et qui invite à la réflexion sur nos choix technologiques.