@Lord Franz,
Vos remarques sont extrêmement pertinentes. Les Japonais travaillent à mettre au point des « poupées gonflables » extrêmement sophistiquées ; elles ne tarderont pas à disposer, vers le milieu du siècle, comme toutes les machines cybernétiques, d’une sorte de conscience (de bons auteurs s’intéressent déjà à la question d’un droit des machines) et je ne vois pas pourquoi on interdirait de se marier avec un compagnion ou une compagne de cette sorte, même si les possibilités de reproduction d’un tel couple paraissent pour le moins problématiques.
La difficulté, c’est bien effectivement que les arguments, dans le débat actuel, restent tout à fait archïques, et des deux côtés. Ce qu’on pourrait peut-être reprocher à votre point de vue, c’est qu’il plane dans les hauteurs de la spéculation. Vous vous mettez dans la position d’un dieu qui regarderait les hommes de très loin et rigolerait de leurs pitoyables errances. Or, si tout est possible, il faut bien quand même, à un moment donné de l’histoire, se prononcer sur la réalité concrète et faire des choix, même si on ne peut guère ignorer que la question de leur légitimation restera problématique. La « déconstruction culturelle » vous paraît « inexorable » ; votre regard est un peu comme celui du sage de Lucrèce, qui « contemple du bord le naufrage ». Vous me direz sans doute que j’interprète en traduisant « déconstruction » par « naufrage ». Valéry concluait souvent ses discussions intellectuelles en disant à peu près : de toute façon, on s’en fout. Pourquoi pas, après tout ?