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Commentaire de easy

sur Hopper et le pomp-art


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easy easy 1er décembre 2012 16:20

Le Caravage, par rapport à Michel-Ange Sixtine, c’est l’idée que le peintre-spectateur, n’émet pas de lumière propre et qu’il ne voit donc pas tout. (Le sujet peint a des arrières pensées, surout quand il se met la main au cul avec un sourire en coin)
La source de lumière du Caravage est de nature indéterminée (A part dans un tableau sur cent où il y a des rais qu’on peut accorder au soleil qui donne à travers une fenêtre) et sa nature n’a donc pas grande importance. Ce qui compte c’est que la chose n’est plus éclairée que sous un angle qui n’est pas celui du peintre-spectateur.
Il ne peint pas du tout la nuit mais seulement la pénombre soit d’intérieur de logement soit factice.
Il n’y a donc de lumière que sur partie des personnages et le reste est dans le noir. Sans aucun jeu de lumières (pas de rais, pas de croisements de rais) 



Tout autre est le luminarisme.
Le luminarisme c’est, à la limite, montrer ce qui se passe sous la surface d’un lac clair et agité où il y a plein de rais qui se croisent et où ce sont les rais eux-mêmes qui deviennent le spectacle et non les objets sur lesquels ils s’accrochent. C’est la lumière forte sur un lit de lumière plus douce qu’on observe.

Le luminarisme c’est les lumières et non plus la lumière.
D’où le grand recours aux reflets (impressionnistes), aux filtres colorés (Picasso période bleue), aux superpositions d’images (Chagall) et aux anamorphoses (Dali) 

D’où l’importance énorme accordée désormais aux éclairages dans les spectacles et à nos écrans qui ne sont plus des lumières reflétées mais des lumières sources qui bougent.

Quand on regarde une étoile, alors qu’elle est réellement en halo, nous y voyons des rais parce que notre oeil produit des aberrations. Et si Van Gogh peint un ciel de nuit tout en rais circulaires, c’est parce qu’il exploite le droit aux aberrations visuelles. Ce que ne fait pas du tout le Caravage (Il colle des ailes à ses sujets -toujours des êtres humains- mais c’est une aberration canonique abrahamique, non personnelle).

Les aberrations visuelles, les illusions d’optique (et de la pensée) les anamorphoses, les chimères des cabinets de curiosité, seront très, très travaillées à partir de 1800 et de manière athée. Picasso, Poe, Dali, Breton, Magritte, Vasarely, Bottero, Duchamp, tout ça c’est le monde des aberrations optiques et mentales individuelles. C’était la réponse des athéiste aux anciens qui se permettaient de peindre sans vergogne -car selon un standard collectif- des anges ou des types allongés sur des nuages.
 

L’arrivée de la lumière artificielle et surtout des projecteurs (lentille + réflecteur parabolique) qui a transformé notre vie en la rendant très nocturne y compris pour les gueux, a obligé les artistes à considérer la nuit, les jeux de lumière et les aberrations.

La lumière artificielle est devenue transcendante ou porteuse de transcendances.

Nuits blanches.
 
On ne dessine de belles étoiles qu’avec des rais (alors que ces rais n’existent que dans nos yeux) et il suffit désormais de montrer, les phares d’une voiture dans la lande ou les fenêtres éclairées d’une chaumière isolée, pour imaginer et ressentir déjà mille choses. Le seul rai d’une torche qui bouge dans un bois, provoque déjà la plus grande des émotions. On peut faire un film saisissant rien qu’avec une danse de rais de torche comme images.

Et c’est à la suite de la puissance que nous avons accordé à la lumière que nous nous sommes mis à concevoir des yeux lumineux (rouges tant qu’à faire). On en voit moins de nos jours mais en 1930-60 bien des BD avaient des héros dont les yeux émettaient des rais ou quelque sorte de rayon.

A part quelques représentations de cauchemar en 1800 où quelque cheval ou démon avait des yeux presque lumineux, on n’aura jamais vu ça avant que les voitures aient des phares électriques (les lanternes des fiacres n’émettaient qu’une lueur diffuse, celle qu’émet une bougie, un feu de bois). Les phares d’une voiture ou d’un phare maritime, c’est toute autre chose et les graveurs (sans doute parce qu’ils bossent en N/B) ont probablement été les premiers à le montrer, à rendre le rai magique.

Ce n’est plus la lumière de dieu qui nous éclaire (et nous prend en faute dirait le Caravage), c’est l’homme athée qui éclaire le cul de dieu.


Le clair-obscur des peintres d’avant 1800 servait à dire que l’homme avait des arrières-pensées, ce qui a été un grand progrès vers la vérité, mais il n’est pas comparable au luminarisme.

Il n’est pas orthodoxe d’associer les cartes postales de Noël avec maisons aux fenêtres lumineuses (+ collage de strass) au luminarisme mais à mon sens, elles en découlent ainsi que les films du genre Avatar ou Prométhéus en leurs images faites de seules lumières (genre hologrammes) 

Enfin, ce luminarisme et ses extensions telle que je les vois, c’est à mon sens ce qui a fait le plus grand schisme (non voulu mais effectif) avec l’art du Moyen-Orient qui n’a pas du tout embarqué dans cette nouvelle façon de considérer la lumière.

Je veux dire qu’au regard de l’évolution de l’art occidental depuis l’arrivée de la lumière électrique, tous les autres secteurs du monde sont restés comme artistiquement figés sur le coup et n’ont commencé à suivre le mouvement qu’avec bien du retard.

Les premiers jouets lumineux sont apparus en Occident (avec les piles). Dito les guirlandes.

Les guerres se font encore avec des balles et des bombes mais elles sont désormais guidées par quelque rai.


Hopper c’est bien entendu un fond sceptique comme la plupart des artistes des deux derniers siècles (il est impressionné par Pompéi-Hiroshima), mais son moyen d’expression passe par Le Corbusier (ou Frank Lloyd Wright) pour poser les principes de perspectives (à fort sens d’avenir) et pour les cadres (où l’artiste dit « Voilà ce que je regarde ») ainsi que par le luminarisme auquel nous sommes encore très sensibles.


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