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Commentaire de Etienne Ravis

sur Mariage homo, Gay Pride et plume dans le cul


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Etienne Ravis 5 décembre 2012 00:04

Je souhaiterais, Madame, ou Monsieur, revenir sur votre article que je trouve bien creux du point de vue de l’argumentation. C’est pourquoi je souhaite le reprendre point par point.

« La menace est en effet réelle de voir des couples homosexuels pousser la porte de l’adoption. »

Les couples homosexuels ne pousseront aucune porte. Ils en franchiront le seuil, tout au plus, lorsque et si le gouvernement s’en charge, lui, de la pousser, c’est-à-dire d’autoriser l’adoption. Quant à considérer que c’est une « menace », voilà un point de vue bien subjectif. Mais soit, c’est votre article.

« Nous vivons déjà une époque secouée de violents spasmes sociétaux, avec des changements majeurs dans les schémas familiaux standards. »

Les « violents spasmes sociétaux » étant difficiles à ne pas dénoter, je n’y reviendrais pas. En ce qui concerne les « changements majeurs dans les schémas familiaux standards », j’avoue ne pas voir de quoi vous parler. Éclairer le lecteur sur ce point pourrait être une bonne chose.

« Est-il bien utile de vouloir mettre encore de l’huile sur le feu ? »

Il est vrai que rajouter une couche de tension sociale n’était peut-être pas chose très judicieuse. Cependant, à l’heure où vous écrivez, l’huile a déjà été jetée. Le mariage et l’adoption font débat dans beaucoup de médias et les avis de tous bords vont et viennent, j’en prends exemple votre article. Vous argumentez donc rétroactivement. 

 « Et n’est-ce pas encore un faux débat qui n’aurait que le mérite, encore une fois de diviser pour mieux régner ? »

Sûrement le seul argument, bien que posé sous forme de question, avec lequel je suis assez d’accord. On peut en effet se demander si concentrer l’attention du public sur ce problème-là n’est pas un moyen de détourner son regard de problèmes de société plus profond.

« Il faut avoir complètement perdu la raison pour imaginer qu’un enfant puisse s’épanouir sans avoir un concept qui soit appelé « Papa » et un autre « Maman », dés sa plus tendre enfance. Et ce même si la présence physique de l’un des deux n’est pas effective. »

Ah bon ? Je vous paraphrase : un individu quelconque, qui « imagine » seulement un enfant épanoui sans un concept de « Papa » et de « Maman » a donc complètement perdu la raison. Les familles monoparentales, ainsi que les orphelins, ne sont pas rares. Est-ce de la « folie », ou plutôt de la « perte de raison complète », pour vous reprendre, que de simplement « imaginer » qu’il y en a quelques-uns d’entre eux (à qui il manque au moins l’un des deux « concepts ») qui puissent être épanouis ? J’apprécierais beaucoup de voir une expertise psychiatrique qui taxe d’aliénés les gens susceptibles de seulement imaginer quelque chose de tel.
D’ailleurs, il suffirait de trouver un seul orphelin épanoui, pour prouver qu’il reste quand même possible d’imaginer cette situation sans pour autant avoir perdu la raison.

« On veut encore jouer les apprentis sorciers...sans savoir. Nous devons admettre que, dans l’absence de certitudes totales, je dis bien totales, que cela ne nuise pas au psychisme de l’enfant, nous devons nous interdire de tenter autre chose que ce qui a été prévu pour nous par la nature. »

Entièrement d’accord. Vous louez un principe de précaution au service du « psychisme de l’enfant ». Mais c’est un principe, surement pas une loi de la nature. La question reste entière, on peut en débattre : qu’a-t-il été prévu pour nous par la nature ? La nature a-t-elle prévu pour nous que nous nous devons d’élever nos enfants par une personne de chaque sexe ? Tout ce que nous savons n’existe que de manière empirique : en effet, dans la majorité des ethnies humaines, les enfants sont élevés par un homme et une femme qui sont généralement ses géniteurs. C’est une loi empirique, pas une loi de la nature.

« Ce n’est pas pour rien qu’il n’y a qu’un seul moyen de procréer. Il s’appelle aussi l’Amour. N’est-ce pas cela au fond que nos dirigeants cherchent à tuer ? »

Vous avancez ici un magnifique sophisme : il n’y a qu’un seul moyen de procréer (c’est tout-à-fait vrai originellement, bien qu’aujourd’hui la science sache le faire in vitro), il s’appelle aussi l’Amour. Eh bien, sachez qu’on peut procréer sans Amour. Les femmes enceintes d’un viol seront les premières d’accord. Et l’on peut également, j’imagine, être amoureux sans avoir la capacité de procréer. C’est le cas de tous les couples homosexuels qui se disent amoureux, bien que vous n’êtes, bien sûr, pas obligé(e) de les croire.
Quant à mettre la procréation en lien direct de cause à effet avec l’adoption des enfants (« Ce n’est pas pour rien que… »), c’est très douteux. D’autant que cela stipule également le refus de l’adoption pour un couple hétérosexuel stérile, et donc également incapable de procréer. Au passage, ce couple hétérosexuel stérile, peut-il être amoureux, bien qu’incapable de procréer ? Suivant votre logique, non.

« Non contents d’avoir détruit lentement mais surement la cellule familiale au cours des dernières décennies, ils s’attaquent maintenant à ce qu’il y a de plus sacré et de plus beau en nous...en fait de plus divin : le pouvoir de donner la vie. »

Sur la destruction de la « cellule familiale au cours des dernières décennies », encore une fois, j’apprécierais de savoir ce que vous évoquez exactement.

Par ailleurs, selon vous, on s’attaquerait au pouvoir de donner la vie. Je ne comprends pas en quoi. Cela signifierait le mettre à mal, diminuer ce pouvoir, l’abîmer, le réduire. 

En quoi le fait d’autoriser les homosexuels à se marier (qu’on soit pour ou contre) ou bien d’adopter des enfants (qu’on soit pour ou contre) amènerait-il à s’attaquer au pouvoir de donner la vie ? Les hétérosexuels qui veulent avoir des enfants auront toujours autant le « pouvoir » d’en avoir, et ce indépendamment du fait que les homosexuels aient ou non le droit d’adopter ceux qui n’en ont pas, et/ou celui de se marier. Encore un faux lien de cause à conséquence.

« Et ce au prix aussi de manifestations >>culturelles<< (c’est une idée d’Etienne Chouard que de mettre entre chevrons inversés les mots « novlangue », et je crois que je vais la mettre en pratique) telles que la Gay Pride. Les rares fois où je me suis attardée (époque lointaine où je regardais encore la télévision) à jeter un oeil à ce triste spectacle, j’ai remercié le ciel de ne pas habiter dans les parages. »

Libre à vous de considérer la Gay Pride comme il vous plaît, je n’ai pas de commentaire à faire là-dessus.

« Comment les parents rentrant de l’école avec leurs enfants leur expliquent-ils pourquoi les « deux messieurs tout nus » - et très visiblement pleins de substances illicites - « s’embrassent dans la rue » (version soft bien sûr, vu qu’il y en a qui se sodomisent carrément sur place) ? Très bonne question mon enfant... »

L’exhibitionnisme est puni par la loi. La consommation de substances illicites également, ainsi que le fait de se « sodomiser [...] sur place ». Si vous avez assisté à de telles démonstrations dévergondées je ne saurais qu’être de votre avis sur le côté déplorable et honteux de la chose. Malheureusement, en l’absence de sources évoquant ce genre de débordements, m’est-avis que ce que vous décrivez est douteux (en ce qui concerne l’exhibitionnisme et la sodomie). Par ailleurs, je veux bien admettre qu’il existe une certaine consommation de substance illicite lors de la Gay Pride, mais cela n’a pas de lien direct avec la population qui défile. Car c’est malheureusement aussi le cas lors de bon nombre de rassemblements en général : manifestations, concerts… Cela vous gêne-t-il autant ?

Si oui, alors vous feriez mieux de blâmer les forces de l’ordre qui tolèrent ceci, plutôt que les homosexuels qui font la même chose que les autres.

Si non, alors dans le tableau que vous décrivez, le fait que ces individus aient consommé des substances interdites n’est qu’un moyen d’enfoncer le clou de la persuasion émotive.

Et enfin, sur le fait qu’ils s’embrassent… Eh bien, ils en ont tout-à-fait le droit ! On peut s’embrasser sur la voie publique, c’est permis, nous sommes en république. Si l’individu que vous décrivez ou si vous-même avez des difficultés à expliquer ceci à vos enfants, à leur expliquer que ces gens sont homosexuels, alors le problème vient de vous, pas d’eux, ils sont dans leur droit.

« Qu’ils puissent vivre et avoir les mêmes droits que les autres, je suis entièrement d’accord. »

Tant mieux.

« Mais se marier n’est pas un droit, c’est un devoir et un contrat que l’on signe devant Dieu. A la base. Puis par la suite devant l’Etat. »

Si l’on est croyant, oui, c’est devant Dieu. Sinon… Eh bien non ! La loi de Dieu ne s’applique qu’à ceux qui y croient, pas aux autres. Par contre, la loi de l’Etat s’applique à tout le monde, croyants et non-croyants. Or, en République française, par la loi de séparation des Eglises et de l’Etat de 1905, ce dernier « ne reconnaît […] AUCUN culte ».

« Il exige que ceux qui choisissent de s’y soumettre respectent ce qu’il implique. Et la première des choses, c’est qu’il faut être un HOMME et une FEMME pour s’unir. »

Je ne crois pas que personne ait jamais demandé à ce que les homosexuels puissent se marier à l’Eglise. La loi de Dieu est ce qu’elle est, mais encore une fois, elle ne regarde que ce qui y croient. Donc là n’est pas la question. La République française, elle, ne reconnaît pas la loi de Dieu, et pour l’instant en effet, du point de vue législatif, il faut être un homme et une femme pour pouvoir se marier.

Pour l’instant, oui. Mais justement, les lois sur le mariage ont vocation à changer. Et c’est bien en partie l’objet de votre article, non ? Vous ne pouvez donc pas utiliser le fait que c’est inscrit aujourd’hui sous ces termes dans la législation, pour argumenter contre le fait que le gouvernement veuille les changer, puisque c’est justement tout l’objet du débat.

Je vous remercie d’avance si vous prenez le temps de me lire.
Cordialement,
Etienne.

 


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