Enfin sur le racisme anti-noir : si il avait été plus avantageux d’importer
des esclaves Indiens ou Chinois (d’ailleurs lorsque l’esclavage fut aboli ou
que le Pacifique devint une zone d’échange Amériques/Asie) dans les Caraïbes ou
aux Etats-Unis : très rapidement coolies indiens ou chinois arrivèrent : leur
situation ne différait pas tant dans la pratique que la condition d’esclave) s’il avait été plus facile de prendre des
esclaves Maures ou Turcs : la situation aurait abouti à la même chose : à savoir que
le temps passant, l’idée que tel groupe qui a été asservi pour telle ou telle
raison, en raison de telles ou telles circonstances, etc… est/était « naturellement » destiné à
l’être : le discours raciste arrive(ra) après par la "force des choses et
de l’habitude" afin de rationaliser le modèle en place : modèle né de
circonstances historiques et géographiques particulières dans ce cas précis :
l’Afrique était pour son malheur juste en face des Amériques…
Bref la »colour line" ne s’est pas imposée uniquement ou
directement en fonction de la couleur de la peau ou des « vertus »
supposées du Noir que tel ou tel préconçu leur prêtait (ensuite les Noirs en dehors
de l’espace ibérique étaient inconnus de la plupart des Européens : le racisme
anti-noir ) : il y a eu avant tout un ensemble de raisons pratiques, politiques
et religieuses ( croyants vs infidèles/païens) mais aussi économiques : a) l’existence d’un
marché de l’esclavage en Afrique Occidentale (pré-existant à la traite transatlantique :
les esclaves noirs étaient connus depuis des siècles dans la péninsule ibérique) :
« facile d’accès » et avec une distance Afrique>Amériques plus
courte que pour d’autres potentiels marchés de traite (donc pertes amoindries
(en temps et esclaves perdus) et bénéfices accrus) et facilité de « remplacement »
rapide (taux de mortalité élevé notamment dans le domaine sud-américain et dans
les premiers siècles de la traite : après « l’élevage d’esclaves » sur
place sera privilégié) b) peuples ayant
développé maitrise et techniques agricoles compatibles avec les cultures dans
les colonies, et avec le climat et l’environnement (à nouveau ici meilleure
rentabilité économique si les esclaves disposent du B.A.BA en agriculture pas
le cas des Amérindiens par exemple) enfin c) les guerres interafricaines (dont
la traite fut souvent une cause majeure : courses aux armements européens entre royaumes
africains, souvent stimulée par les négriers lorsque le marché semblait se
tarir ou que des monarques ou groupes africains montraient quelque velléité de
suspendre ce commerce) et donc d) des raisons religieuses qui faisaient que
grosso modo tout le monde non-chrétien (dans le cadre de la traite
transatlantique, il s’entend) pouvait être asservi.