@Alinea :
Pour vous
répondre, je reprendrai les images d’Easy (soit donc la réserve et les fers ou
chaînes).
Pour vouloir sortir de sa réserve, ou se libérer de ses fers ou chaînes :
encore faut-il en avoir conscience : ou plus précisément faire l’expérience des
limites : que ce soit percevoir les frontières de la réserve, ou la contrainte
de ses fers ou chaînes : donc être à même de faire l’expérience singulière du
Réel, de Soi, de l’Autre, du Monde, etc…
Une vache (sacrée ou non) ne connaît que sa pâture et son berger : en cela,
elle est très différente d’un aurochs ou d’un bison.
Que veux-je dire ? et bien que la civilisation approchant de son apogée (à
savoir donc esquisse et mise en place d’un système aussi total que global) : le
Contrôle qui fût son principal moteur pourra s’en passer dès lors que le
dernier espace lui échappant sera sien : dernier espace étant l’espace intime
individuel : partant de là, pas plus la vache n’imagine-t-elle le monde sans son
berger, pas plus ne pourrait-elle survivre longtemps sans lui : pas plus
l’individu post-civilisé n’imaginera-t-il, ni fera-t-il l’expérience qu’il
existe ou a existé un autre monde que celui que le Contrôle lui propose ou
impose. Aussi, imaginer que sous un banyan synthétique, un futur éveillé décide
de libérer les hommes, et combattre le Contrôle est certes possible, mais probable :
cela dépendra de l’épaisseur finale de la toile-écran (ou « maya ») en
train de se tisser : l’homme complètement domestiqué ne devinera pas plus les
limites de sa réserve, ne ressentira pas plus les contraintes de ses fers, que
la vache ne se met à agir ou penser tel un auroch…
La différence essentielle du Contrôle actuel est qu’il se passe de toute
incarnation (d’où l’idée que nous approchons de l’accouchement par la
matrice-maman Civilisation d’un monstrueux nouveau né : le Contrôle total :
intérieur et extérieur) : il émerge indépendant et avec ses qualités propres,
comme le paroxysme du processus de civilisation : et il n’est pas étonnant
qu’aujourd’hui, dans cette phase finale, ce soit la Culture (venue en premier)
qui soit la cible dernière (après la Politique, la Religion, etc…). Historiquement,
le contrôle social (par les élites politiques et/ou religieuses) employaient la
culture comme medium de contrôle en s’accaparant producteurs/productions culturels
afin d’affirmer son assise : aujourd’hui : ce n’est plus le cas : la Culture étant
le dernier rempart : puisqu’elle est autant singulière que singularité : elle est
l’expérience singulière du Monde, de Soi, de l’Autre, du Réel, etc… que ce soit
à l’échelle d’un groupe, d’une société, d’un individu, etc… plus la toile-écran
s’épaissit, plus la Fiction se substitue au Réel, plus le Particulier s’affirme
face au Singulier : plus l’expérience singulière produit et productrice de la
Culture s’efface et donc la Culture avec elle…Ne reste que le Contrôle et des
coquilles vides privées de toute singularité et expérience « réelle » .
Des vaches qui craignent de s’éloigner
du berger, et n’iront jamais au fin fond de ces obscures forêts et dangereux
marais où leurs aurochs ancêtres aimaient à se promener…à vrai dire, pas sûr qu’elle ait même l’idée qu’ils puissent exister...La Domestication n’a jamais conçue que l’Homme puisse lui échapper perpétuellement.