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Commentaire de JC. Moreau

sur Charlie Hebdo en procès, une chronique de l'intégrisme ordinaire


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JC. Moreau (---.---.100.110) 10 février 2007 19:51

@Walbator

Sans doute le niveau auquel vous situez mon esprit provient-il moins d’une lecture attentive de mon propos que de la noblesse du principe que vous entendez défendre, à savoir l’anti-racisme. Sans doute devrais-je donc, comme il est de coutume désormais lorsque l’accusation de racisme a retenti, procéder à quelque révélation généalogique, agrémenter mes arguments de bribes de mon roman familial, voire vous citer quelques amitiés aux consonances d’alibis... Bref, vous fournir certificat de bonne moralité. Je n’en ferais évidemment rien, soucieux de ne point trop ébranler votre foi en l’indéfectibilité de l’anti-racisme, qui malencontreusement devient sous votre plume une idéologie plus qu’un idéal, un réflexe politique plus qu’une intelligence sociale. L’anti-racisme, sous votre plume, me semble être un état d’esprit où les réponses précèdent impérativement les réponses. Ceci étant dit, que reste-t-il de votre propos, une fois expurgé du procès d’intention, si ce n’est une triste variation sur le thème du « Qui n’est pas avec moi est contre moi ! », symptôme manichéen par excellence, ne souffrant pas plus la nuance que la contradiction, cette dernière étant nécessairement offense. Vous semblez donc me faire grief de ne pas reconnaître comme légitime l’action intentée par Monsieur Boubakeur et consorts, postulant que mon opinion sur la présente affaire serait nécessairement identique pour tout autre procès intenté par quelque autre musulman. Or, il n’en est rien, à titre d’exemple, les actions intentées à la suite des incendies de Mosquée et les peines prononcées à cette occasion ont à mes yeux toute légitimité, et mériteraient d’être également appliquées dans une même sévérité à tous les actes de même nature. Par ailleurs, il me semble avoir assez clairement explicité les faits, les fondements logiques et les ressorts juridiques et sur lesquels se fonde mon opinion, qui se trouve par ailleurs être partagé par un procureur de la République. En d’autres termes, mon analyse de l’affaire ne vaut que pour cette affaire. Considérer que l’opinion que j’ai émise sur ce procès est un avis de portée générale relève, au mieux, d’une lecture malencontreuse de mon article, au pire d’une extrapolation de votre part dont je ne puis être comptable. Enfin et surtout, si l’on s’attarde sur la caricature qui à vos yeux pose problème, à savoir celle du prophète Mahomet coiffé d’une bombe allumée en guise de turban, j’aimerais vous en livrer ma propre interprétation. A mon sens, celle-ci avait pour but de symboliser la menace que le terrorisme fait peser sur le prophète, et donc sur l’Islam, en dévoyant la profession de foi du musulman (l’inscription apposée sur la bombe). Voici une interprétation, une réception de la caricature parmi tant d’autres possibles. Ne pas la considérer, c’est arrêter à la seule sainteté du personnage représenté. Chercher à obtenir la condamnation d’une caricature au seul motif qu’elle ait pu offenser, indirectement, une partie du public, c’est chercher à soumettre le pluralisme d’opinion à la tutelle du sacré. D’autres s’y sont essayés, à commencer par l’Eglise catholique, et ont connu les mêmes déconvenues judiciaires. Mais il est vrai que ces derniers ne pouvaient alors user de l’anti-racisme comme sésame de leurs revendications religieuses.

PS : S’agissant de vos réticences sur la légitimité du ministre de l’Intérieur à intervenir dans ce procès, je me permets de vous rappeler qu’étant au surplus ministre des cultes, il a pour fonction d’assurer la « police des cultes », c’est-à-dire d’assurer la tranquillité publique à l’occasion de l’exercice d’un culte ou des manifestations extérieures d’une religion. A ce titre, il était donc habilité à témoigner sur le contenu de la liberté religieuse dans le cadre des libertés fondamentales, cela ne constituant pas à mon sens une ingérence. Néanmoins, s’agissant du même individu en sa qualité de présidentiable, lorsqu’il évoque la possibilité d’imposer le prêche dans les mosquées en langue française exclusivement, cela constitue à mes yeux une violation manifeste de la liberté de culte, que rien ne justifie si ce n’est une suspicion maladive vis-à-vis de l’Islam. Tout cela pour vous dire que la laïcité, à mon sens, n’est pas synonyme d’indifférence envers les religions, mais a pour raison d’être l’organisation les antagonismes entre les différentes formes de croyances, de répartir les contenir dans le cadre de l’exercice des libertés fondamentales.


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