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Commentaire de Tristan Valmour

sur L'univers des profs...


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Tristan Valmour 6 février 2013 15:55

Rosemar,

Je crois que vous auriez du accentuer votre article sur les spécificités du métier d’enseignant. Parce que, franchement, un comptable ou un menuisier ont aussi besoin d’être concentrés, sinon il y a une erreur fatale dans le bilan ou un doigt coupé ! La responsabilité civile, voire pénale, est engagée dans de nombreuses professions si on fait une erreur. Bref, beaucoup de ce que vous dites s’applique à bien d’autres professions.

Parmi les spécificités du métier, il y en a effectivement une que vous avez citée, mais que malheureusement vous n’avez pas développée : la fatigue que l’on éprouve lorsqu’on parle. Le son résonne dans la boîte crânienne et quand on enseigne pendant 6h, à la fin de la journée on est tout simplement épuisé. La station debout provoque à terme des dommages physiques, et on pourrait en multiplier. Il fallait donc dire que comme les métiers manuels, le métier de prof a des répercussions sur le corps. C’est aussi un métier physique. Quand on a 25 ans, ça va encore, mais après, c’est plus difficile.

Vous auriez aussi du insister sur la fatigue nerveuse de gérer des adolescents pour les profs du secondaire, et même aujourd’hui des étudiants, vu que ces derniers ont de plus en plus une attitude inacceptable en amphi. Finalement, il n’y a que quelques lycées d’élite et prépas de renom (parce qu’aujourd’hui les prépas se multiplient et leur niveau baisse) où les élèves sont corrects. Mais, encore une fois, les éducateurs pour enfants difficiles ont une fatigue nerveuse plus importante, et ne se plaignent pas trop.

Sur la concentration pour la préparation des cours, vous y allez un peu fort. Bien sûr qu’il en faut, mais rien ne vous interdit de faire une pause, boire un thé ou un café, d’écouter un disque, etc. Soyez honnête, préparer son cours n’est pas un fardeau, c’est plutôt cool. Corriger les copies, c’est autre chose. En plus, vous n’avez personne sur votre dos pour surveiller ce que vous faites chez vous. Votre surveillant, c’est le cahier de texte numérique.

Ce métier permet d’apprendre beaucoup, c’est vrai, et c’est même la raison qui a incité les profs à devenirs profs : l’amour de la discipline qu’ils enseignent. Les vacances sont la seconde raison mais loin derrière, et le désir d’être avec des jeunes, la troisième raison. Mais attention, il y a bien d’autres professions où l’on apprend beaucoup. On retrouve dans ce que vous écrivez le grand travers des profs : se prendre pour des intellectuels et même croire disposer de ce monopole. Les commerçants n’aiment pas les profs parce que ces derniers savent toujours mieux qu’eux. Alors, pour plagier un excellent prof de philo, Michel Gourinat, je dirai qu’un prof de philo n’est pas un philosophe. MG disait même qu’on ne faisait pas de la philosophie en terminale, mais de l’histoire de la philosophie. Comme on ne fait pas de maths, mais l’histoire des maths. Alors, s’il y a bien une chose insupportable, c’est que les profs se montent le melon. Ils n’ont plus le monopole du savoir, comme les journalistes n’ont plus le monopole de l’information. D’ailleurs, à mon sens, l’évolution du métier d’enseignant dans le secondaire devrait conduire ces derniers à étudier comment utiliser le savoir pour qu’il devienne connaissance (cf les théories de la cognition, de l’information).

Quant au prof de fac, franchement, généralement, ils enseignent parce qu’ils sont obligés de le faire. Ils préfèrent se consacrer à leurs recherches et enseigner est même considéré comme dégradant. Ca, c’est la réalité vue de l’intérieur, objective et sans langue de bois.

Je ne tape pas sur les profs, mais énonce quelques vérités. Comme je pourrai dire que les maîtres chiens travaillent 3 jours par semaine ; les dockers des îles (et peut-être d’ailleurs) gagnent beaucoup d’argent sans beaucoup travailler ; les pharmaciens jouent à tetris quand il n’y a pas de clients ; les entrepreneurs se plaignent de ne pas avoir de droit au chômage mais ils ne cotisent pas pour cela, les entrepreneurs font souvent du black et certains ne se paient pas beaucoup pour ne pas être ponctionnés mais touchent le pactole quand ils revendent leur entreprise (c’est leur retraite) et s’ils se plantent c’est qu’ils n’ont pas été bons ; beaucoup d’employés de commerce se tournent les pouces quand il n’y a pas de client ; de nombreux employés utilisent le matériel de l’entreprise pour leurs fins personnelles, volent dans la caisse (ou quand ils sont chefs de rayon d’un hyper, ils commandent un appareil très cher qui ne se vendra pas, puis ils le soldent et un de leurs copains le rachète à vil prix), enfin bref, on peut continuer l’énumération des dysfonctionnements à l’infini.

Les profs ne sont pas roses, mais les autres non plus. Par conséquent, on peut reconnaître les faiblesses de ce corps et les aimer en même temps.


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