Constatant avec amertume que la grande manifestation des Kurdes du samedi 16 février dernier à Strasbourg fut interprétée comme une « manifestation pro-terroriste » pour satisfaire sans doute une meute de lecteurs apeurés par un blogueur* bien plus mal informé que suffisamment documenté pour traiter de la question, je me dois de réagir face au négationnisme affiché dans cette bafouille qui vise purement et simplement à nier les efforts parlementaires européens visant à parvenir à une solution de paix et de justice politique et sociale au Kurdistan à l’heure où de nouveaux pourparlers s’engagent entre le chef du gouvernement turc Erdogan et le représentant des Kurdes, Abdullah Öcalan, emprisonné depuis 25 ans sur une île où il est maintenu à l’isolement... La situation est tendue entre le peuple kurde et et les négociateurs politiques qui ne le représente pas dont il est toujours à redouter de la Turquie qu’elle fasse le maximum pour effectuer le plus de pressions possibles dans des négociations dont elle serait la seule interlocutrice, se substituant aux représentants des associations kurdes et des partis démocratiques légalement reconnus en Turquie comme le BDP (Parti pour la Paix et la Démocratie)... Alors qu’est prévue l’établissement d’une feuille de route pour arriver à une solution pacifiste dans les régions occupées par le peuple Kurde, non pas seulement en Turquie mais aussi en Irak, en Syrie et en Iran, il semblerait qu’une solution unilatérale se dessine au lieu de susciter la création d’une table des négociations bilatérale où les kurdes tiendraient leur place car ce ne sont sûrement pas les mots d’ordre de l’OTAN, de l’Union européenne et de l’ONU derrière lesquelles profite Erdogan pour parvenir une fois de plus à un cessez-le-feu qui parviendront à terrasser les revendications des populations kurdes... Même si les groupes de travail, salués au passage par un Barack Obama qui a balancé un communiqué allant dans le bon sens des souhaits d’Erdogan, se félicitent d’une telle avancée, ce n’est pas sans cacher tout un panel de renoncements auxquels les Kurdes devraient se soumettre. Ne nous y trompons pas mais à chaque processus de cessez-le-feu engagé par les autorités kurdes, les chefs d’État-major de l’armée turque ont toujours refusé ce genre de trêve allant même jusqu’à menacer de combattre jusqu’au dernier des guérilleros positionné dans les montagnes kurdes, marquant ainsi par l’irrespect odieux de leurs menaces, l’obstacle majeur au processus de démocratisation en Turquie relatif à la problématique de la question kurde ! Ce n’est pas l’histoire qui me contredira mais le 17 mars 1993 déjà un premier cessez-le-feu décrété par le PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan) est adressé au Président de la République de la Turquie Turgut Özal. S’en suivrons 85 jours d’accalmie avant que les hostilités reprennent... Le 15 décembre 1995 un nouveau cessez-le-feu est proclamé par ce même PKK avec le soutient des autres organisations kurdes qui durera près de deux mois au cours desquels il sera salué par le Parlement européen comme l’émanation d’une réponse à l’appel qu’il avait lancé deux jours plus tôt... Le 1er septembre 1998 un troisième cessez-le-feu est refusé par les gouvernements turcs successifs... Enfin, le 2 août 1999, un quatrième cessez-le-feu répond à l’appel d’Abdullah Öcalan qui ordonne le retrait de la guérilla kurde au Kurdistan de Turquie ce qui devait ouvrir sur la paix pour marquer la volonté des Kurdes en faveur de la fraternité entre les peuples et débouche sur une période de calme relatif puisque la Turquie profite de cette opportunité en l’utilisant pour faire croire à une victoire de son armée qui aurait vaincu la rébellion kurde (! ?)... C’est ainsi que n’a jamais été respectée la volonté des masses favorables à la paix et la démocratie pour la Turquie. Disant non à la démocratisation, l’État turc en profite pour engager une sévère répression sur le mouvement kurde.