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Commentaire de Martine Schwarts

sur Le « fear marketing »


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Martine Schwarts (---.---.16.49) 26 octobre 2005 12:19

Fear marketing, en français : mise en scène de la peur... L’idée ne serait-elle pas de persuader les citoyens que nos sociétés doivent devenir de plus en plus sécuritaires ? Voilà un moyen astucieux de contrôler les populations, avec leur assentiment en plus ! Et, plus grave encore, de les empêcher de penser par elle-même, trop obsédées par la sécurité de leurs biens et de leur personne. Pourtant, quand on y pense, en dépit de la vache folle, de la grippe aviaire, de toute cette insécurité à laquelle nous serions tous exposés quotidiennement, la durée de vie ne cesse de s’allonger et les conditions de vie de s’améliorer (je parle évidemment pour les pays développés, d’ailleurs les plus confrontés à cette espèce de psychose liée à l’insécurité et à la peur de tout). En effet, pourquoi cette peur de la mort, de la maladie, de l’agression, disons-le, de l’autre et de l’inconnu tout simplement ? Dans les zones moins riches, il n’y a pas une telle mise en scène de la peur puisque celle-ci fait partie du quotidien (on vit avec l’idée de la mort et de la violence et, souvent, on en est victime d’ailleurs). Alors que dans nos pays, privilégiés, on ne peut pas dire que ce soit le règne de l’insécurité. Pourtant les citoyens aspirent au « risque zéro ». Quand j’ai quitté ma famille à tout juste 19 ans (quittée réellement : je m’assumais financièrement) je n’avais peur de rien, ni de prendre le métro habillée en jupette à minuit, ni de changer de travail quand j’en avais assez de ce que je faisais ou de mon boss, ni de me retrouver au chômage (pourtant je ne suis pas bardée de diplôme bien que j’ai continué mes études en travaillant) ni de discuter avec des inconnus en pleine rue, ni même du sida puisqu’il suffisait de sortir couvert... Bref, je vivais à Paris, j’avais un job sympa, je me sentais libre, la vie devant moi et plutôt en sécurité. Je ne me posais même pas la question de la sécurité. Je n’avais pas peur du lendemain et je n’étais pas obsédée par l’idée que personne ne paierait ma retraite quand je serais vieille ! Cela ne m’a pas empêché de vivre pleinement, même si j’ai vécu des coups durs, comme tout le monde. Etais-je un cas particulier ? Une irréductible optimiste ? Je ne le pense pas. La plupart de mes amis aussi faisaient preuve de la même insouciance. Aujourd’hui, presque rien n’a changé en ce qui me concerne... si ce n’est que j’ai un peu vieilli bien sûr. Sans avoir été surprotégée (et professionnellement, j’ai choisi la difficulté et cela m’a réussi) je m’en suis plutôt bien sortie. C’est vrai, aujourd’hui, je n’ose guère aller traîner du côté de St-Ouen ou de St-Denis, ni dans ces endroits « qui craignent ». Mais peut-être me suis-je tout simplement embourgeoisée ? La vie était-elle plus sûre ou plus facile il y a 10 ou 20 ans, en particulier pour une femme, même moderne ? Je ne crois pas. Je pense que ce sont les mentalités qui ont changé, en France du moins. Les jeunes générations sont éduquées avec l’idée que tout est danger : le travail, les autres, l’alcool, la cigarette, l’automobile, l’avion, la vie de couple,... Au lieu de voir le côté positif des choses, tout est objet de craine. La peur paralyse et empêche de penser intelligemment. La peur est le contraire de la responsabilisation. Elle suscite des réactions incontrôlables et agressives vis-à-vis des autres, elle rend intolérant, rasciste, égoïste et antisocial car elle conduit à un repli sur soi, souvent limité à sa « tribu ». Ceux qui n’appartiennent pas à ce cercle fermé en sont exclus. Bien sûr, chacun a bonne conscience parce qu’il aura généreusement donné pour le tsunami ou le téléthon, ou je ne sais quelle autre cause humanitaire. Cela empêche de se poser des questions sur ce qui se passe juste à côté de chez soi... La question à se poser est : à qui profite le crime ? Mais nous connaissons tous déjà la réponse n’est-ce pas ?

ps : à ceux qui me reprocheront de faire l’apologie de la cigarette, de alcool ou de l’automobile, je précise que je n’ai pas dit qu’il fallait en abuser, encore moins fumer et boire au volant... Consommer avec modération et rouler en respectant son prochain n’a jamais tué personne...


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