Mr Hamiche, sauf votre respect, il me semble que vous n’avez pas saisi le fond et le sens de mon message.
Vous dites, et je cite :
« Mais il dit aussi à quel point vous avez, comme tous les Algériens, subi le lavage de cerveau opéré par les révisionnistes qui présentent la guerre d’Algérie comme une guerre d’émancipation alors qu’elle fut d’abord une guerre civile révolutionnaire menée contre leur peuple par des irresponsables communistes »
Votre évidente partialité vous conduit forcément à refuser ce fait. D’où le terme, avancé telle une certitude, de « révisionniste » qui pourtant pourrait s’appliquer à merveille à ceux qui nient ce que la colonisation a produit de négatif, et sa triste conséquence. La guerre d’Algérie est ce que la France, durant bien longtemps a refusé de nommer comme telle, allant jusqu’à la présenter dans les cours d’histoire comme « le drame algérien ». Une guerre, ni plus ni moins, comme d’autres nations combattants pour leur liberté l’ont connue.
Je ne vous apprends rien en vous disant que la Guerre d’Algérie, n’est pas une légende. Qu’il y ait eu des enjeux politiques dans lequel deux pouvoirs, Etat Français, et FLN ont protégé leurs intérêts au mépris d’un peuple désormais divisé, c’est incontestable. Mais qu’il faille pour autant ignorer et éluder le fait que la guerre d’Algérie soit le fruit de décennies d’injustice dans laquelle le peuple algérien était maintenu, à dessein, dans un système où il n’était en réalité point considéré comme un citoyen français mais comme un individu de seconde zone, ce ne serait que pure mensonge.
Mr Hamiche, vous dites, et je vous cite :
« il me suffit seulement de rappeler que en sept ans de guerre, les fellaghahs ont tué 20 000 soldats, 14 000 harkis et 150 000 civils qui avaient le tort d’être fidèles à la France, de refuser leur racket, ou d’avoir une tête qui ne leur plaisait pas, y compris des enfants pour avoir prise sur leur parents »
C’est tristement drôle, mais vos propos pourraient aussi bien s’appliquer à tous les fellaghah également tués et torturés, ces civils parfois des paysans apostrophés et ne sachant même pas s’exprimer dans la langue du colon, tirés comme des lapins ainsi que leur bétail, des familles rassemblées un soir sans crier gare auxquelles on raflait de jeunes adolescents alignés et fusillés, un jeune homme sur lequel des chiens ont été lâchés sous les yeux de son propre père pourtant médaillé de verdun...
J’arrêterai ici la liste non exhaustive de ces exactions car mon but n’est pas de les aligner pour prouver de quelle côté il y en a eu le plus. Mais de déplorer la conclusion logique et déplorable de toute forme de colonisation.
Vous parlez révisionnisme, politique, chiffres. Je vous parle d’humains, de témoignages, de vécu. N’y a t-il que les harkis pour dire leur vérité ? Ce qui me dérange dans vos propos, c’est le parti prix. Un fait historique qui n’est considéré que de votre point de vue. Dans ma famille, il y avait des harkis. Ils n’ont jamais égorgé personne, ou s’ils ont tué, ce n’était pas des civils mais des moudjahidin. Mais il y eu aussi, ailleurs, des harkis égorgeurs, délateurs, et pilleurs de vivres.
Idem pour les fellaghah que vous assimilez systématiquement à des égorgeurs d’enfants. Devrais-je aussi décreter que tous les harkis ont des égorgeurs d’enfants ? Certes non.
Vous dites : « les autres, ceux qui se sont rués à la suite des pieds-noirs qu’ils avaient chassé d’Algérie, comme un chien suit la main qui tient la gamelle, et ceux qui continuent de mendier des visas, ceux-là sont méprisables. »
Peut-être, mais pas que. Votre vison partiale de l’histoire vous mène à éluder le fait que la France après l’indépendance, ayant besoin de bras pour tenir la pelle et la pioche, a délibérément fait appel à ces « autres ». De même, vous oubliez que certains se trouvaient déjà depuis fort longtemps sur le territoire français, le leur donc, et qu’ayant fondé une famille sur ce sol y sont restés, y ont travaillé, y ont souffert ou y ont ri. Encore une fois, tout n’est pas aussi carré et simple que cela. Sinon, la France aurait dû depuis bien longtemps rompre avec l’Algérie y compris lorsqu’il s’agissait de signer certains contrats. Qu’on le veuille ou non, la colonisation, plus que des bienfaits, a crée ses « immigrés », ses « dé-paysés », ses binationaux ( et j’en fais partie) qui contrairement à ce que vous décrétez, ne vouent pas tous la France aux gémonies, mais l’aiment et la respectent au-delà des divisions, des parti-prix, des pleurs et des cris que ce triste fait historique à produits.
Ce dont on peut être fièr(e), ce n’est pas d’être fils/fille de harkis ou de moudjahidine, mais plutôt du comportement de nos anciens en tant que tels, et dans un tel contexte. Je ne me vois pas juger les uns et les autres en les étiquetant « harkis » ou « moudjahidin » comme si tout se résumait à de simples termes. Ce sont les agissements qui déterminent les hommes, de ces agissements dépendront la fierté qui m’animera ( ou pas). Et en cela, je suis fière de mes anciens.
Pour finir je vous conseille, si vous me permettez, ce livre : « Nos père ennemis » écrits par hélène Erlingsen et Mohammed Zerouki.
Communiquer, par-delà les divergences, c’est peut-être cela qui fait de nous des êtres civilisés.
Je vous souhaite une bonne soirée.