@schweizer.ch
Vous écrivez : « Pourquoi ne pas admettre que ces
peuples n’ont aucune culture démocratique... ».
J’ai été extrêmement déçu, comme beaucoup, par la victoire
des Frères musulmans en Egypte et en Tunisie, mais je m’en voudrais,
lorsque les masses de ces pays paraissent prendre conscience de leur
erreur, de leur dénier la possibilité d’évoluer. La France de
Louis XV, héritière des institutions de la monarchie absolue, est
beaucoup moins démocratique qu’une monarchie anglaise très admirée
par les philosophes. Cela ne nous empêchera pas, près d’un siècle
après les horreurs du terrorisme révolutionnaire, de mettre sur
pied un système républicain qui est certes loin d’être parfait
mais qui nous préserve tout de même des situations abominables
qu’on peut observer actuellement dans tout le Moyen-Orient.
Ma comparaison avec l’Allemagne des années 30, contrairement à
ce que vous écrivez, s’impose de la manière la plus évidente et
vous m’en administrez la preuve en disant que ceux qui ont tenté de
résister en Allemagne à la montée du nazisme n’avaient « aucune
légitimité démocratique ». C’est-à-dire que vous tombez à
pieds joints dans le travers que je dénonce. Est-ce à dire en effet
que si vous aviez vécu à cette époque-là vous vous seriez abstenu
de les soutenir ? Parce qu’on peut toujours se réclamer de la
« morale », mais vous le savez bien, comme moi et comme
Péguy ironisant sur Kant : « la morale a les mains pures,
mais elle n’a pas de mains » ! Quand on veut s’opposer à
une forme de tyrannie, la dénonciation vertueuse ne suffit pas.
J’ajouterai que dans plusieurs débats que j’ai suivis ces
derniers jours sur des chaînes d’information continue, j’ai entendu
au moins deux ou trois fois des gens qui sont engagés sur place dans
les mouvements politiques en cours comparer le comportement des
Frères, des salafistes et des islamistes en général, à celui des nazis. Si, dans les réunions
du Hezbollah ou du Hamas on se salue en levant le bras droit, la
paume de la main vers le sol, ont peut tout de même douter qu’il
s’agisse là d’un simple hasard. Il y a longtemps qu’on parle en
Europe du développement d’un islamo-fascisme. J’observe avec
satisfaction qu’il ne s’agit pas d’un pur fantasme et que cette
analyse est partagée par un nombre de plus en plus grand de ceux qui
sont quotidiennement confrontés à ces sortes d’horreurs.