Mais non, la connaissance, c’est le vice. Quand Eve a goûté le fruit de la connaissance, elle s’est faite expulser du paradis
Tu raisonnes à partir de ta propre compréhension des textes bibliques, qui n’est pas celle que l’Eglise a eue au cours du temps. Dès lors, il ne faut pas s’étonner que tu parviennes à la conclusion que tu voulais au début de ton raisonnement. Pas très « scientifique », comme méthode, n’est-ce pas ?
Le fruit que Eve a goûté n’est pas le fruit de la connaissance, mais le fruit de l’arbre de la connaissance du Bien et du Mal. C’està dire que la séparation avec Dieu arrive quand Adam et Eve veulent décider aux-mêmes, par leurs propres forces, de ce qui est bien ou mal.
Et Giordano Bruno, qui a compris l’héliocentrisme, s’est fait cramer sur un bûcher
Bof, si Bruno a subi le bûcher, ce n’est pas parce qu’il aurait professé l’héliocentrisme. Et je pense que si Bruno avait vécu de nos jours, on l’aurait mis en hôpital psychiatrique, ce qui n’est pas forcément un meilleur traitement.
Qu’as-tu contre les désirs ?
Les désirs ont ceci de particulier qu’ils augmentent à mesure qu’on les satisfait. Par conséquent, à force de les satisfaire indéfiniment, on finit par ne plus jouir du tout, car nos désirs sont démesurés par rapport à ce que nous pouvons nous permettre. Nous vivons actuellement dans l’ère de cette illimitation théorique, dans laquelle la seule manière de poursuivre la course effrénée de la satisfaction de nos désirs est de faire tomber les repères civilisationnels qui sont un frein à cette escalade. La satisfaction du désir ne devient plus que performance transgressive, et le plaisir disparaît. Où cela nous mène, cela a très bien été décrit par Sade. Lis Les 120 journées de Sodome et tu verras l’accomplissement le plus parfait de l’idéologie des Lumières et du libéralisme.
J’affirme donc que les désirs doivent être satisfaits avec modération, pour la plupart, et maîtrisés pour d’autres. On se fait amplement assez plaisir en prenant un peu, de temps en temps, de ce sont on a envie, et en apprenant à maîtriser ses désirs on n’obéit pas qu’à son animalité. On devient un homme rationnel et raisonnable, avec une volonté libre et qui n’est pas asservie par ses désirs.
Mélanger le monde inerte, régi par la mécanique, et la recherche d’un consensus dans le partage des ressources dans la société humaine, a déjà provoqué pas mal de dégâts.
Je n’ai pas dit que je désirais mélanger ces deux domaines. Sinon j’aurais proposé d’appliquer l’équation de Navier-Stokes à la démographie ou à l’économie. Je suis loin d’être un physiocrate : comme tu dis, ces doctrines politiques issues des Lumières ont été bien trop néfastes.
Ce que je dis c’est qu’en tirant une conclusion épistémologique d’un domaine particulier de la science, on trouve un support de réflexion pour d’autres domaines, qui permettent des les éclairer sous un nouveau jour, et pourquoi pas d’y faire des découvertes.
La complexité du comportement des fluides (que l’on est encore loin de savoir modéliser correctement)
Le problème est qu’on a une équation (Navier Stokes), qui est censée régir le mouvement de tout fluide, mais qu’on ne sait pas la résoudre (équation non-linéaire). La mécanique des fluides, c’est le monde de la non-linéarité, du chaos déterministe, de la sensibilité aux conditions aux limites. Savoir ça, ça nous préserve des philosophies déterministes qui voudraient toujours réduire le réel à deux petites coordonnées pour mieux le maîtriser. Nous apprenons grâce à elle que le monde est complexe, et c’est une très bonne nouvelle.