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Commentaire de Jean-Philippe Immarigeon

sur Gouverner avec ou sans Dieu


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Jean-Philippe Immarigeon Jean-Philippe Immarigeon 23 février 2007 12:19

Bonjour,

Je ne ferai de remarque que sur votre introduction, étant donné que tout le reste est un recopiage de ce que Jean-François Colossimo a écrit dans son « Dieu est américain. De la théodémocratie en Amérique », que Tocqueville avait déjà clôt le sujet en 1835 en stigmatisant la confusion mentale des Américains entre politique et foi, et que vos citations ont été maintes et maintes fois reprises, compris par moi dans « American parano » ( http://americanparano.blog.fr ), et qu’il en manque encore, et de bien plus raides.

Je ne comprends pas la reprise des conneries de Huntington sur le choc des civilisations, qui n’ont d’emblée aucun sens vu qu’on ne comprend pas pourquoi il réunit l’Europe et les Etats-Unis alors qu’il sépare l’Europe et l’Amérique latine (s’il existe hors du vieux continent une zone où ses valeurs culturelles et - avec des éclipses - politiques sont partagées, c’est bien l’Amérique latine).

Je voudrais simplement vous faire remarquer que vous mélangez deux choses au commencement : d’une part la séparation des pouvoirs, qui n’a de sens que comme aboutissement d’une longue histoire, et qui ne fonctionne pas aux Etats-Unis comme on le voit actuellement, parce que, contrairement à l’Angleterre et à la France, elle y a été greffée comme une construction éthérée, en apesanteur ; et d’autre part l’origine de la souveraineté.

Or sur ce point, tout est dans la Déclaration d’Indépendance de 1776, qui est l’exact contrepied de nos principes européens établis par la Déclaration française de 1789. Le texte de 1776 est très clair, et tous les discours américains depuis cette date le disent : le pouvoir, les gouvernements, mais surtout les droits sont donnés par Dieu. C’est lui qui créé les hommes égaux, c’est lui qui dispense les droits, la liberté, la vie et ce principe pré-totalitaire qui avait fait hurler Kant de « poursuite du bonheur », c’est lui qui institue le principe de gouvernement, etc... Comme l’a montré Russel Banks, la logique de cette foi en une transcendance du divin sur le politique conduit même les Américains à sacraliser la Déclaration, et c’est tout juste si Jefferson ne l’a pas prise « sous la dictée » comme Moïse sur le Mont Sinaï ou Le Prophère à Médine.

Donc ce qui a suivi dans l’histoire américaine n’est qu’une longue déclinaison du texte de 1776, qui prend le parti inverse de ce qui est à la même époque débattu en France, et en premier lieu du principe de Contrat social de Rousseau. Bien mieux : les Founding Fathers savent parfaitement ce qui se prépare en France, et, Jefferson en tête, le refusent, annonçant qu’ils vont au contraire conserver les vieilles traditions héritées du Mayflower. Nous sommes donc dès le début face à deux révolutions absolument contradictoires et irréductibles l’une à l’autre, ou plutôt une révolution en France, et une contre-révolution en Amérique.

Le choc des civilisations est là, et nulle part ailleurs, et la crise irakienne n’en constitue que le prodrome.


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