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Il
n’est pas possible de prendre notre modèle de démocratie
parlementaire représentative que vous et moi qualifions d’ailleurs
d’incomplète pour l’imposer comme modèle universel à des pays qui
n’ont pas un socle solide prêt à l’accepter. La déstabilisation
islamiste est une réalité en Syrie depuis des décennies. Elles
est importée par un grand pays voisin plein de pétrodollars et
elle a été amplifiée par une énorme puissance mondiale qui était
dirigée par un certain Georges W Bush quand il a amené le chaos en
Irak. Pour instaurer une démocratie du même type que chez nous en
Syrie, il faudrait que soit ces islamistes reconnaissent que des
lois votées et contraires à leurs préceptes religieux doivent
être reconnues, soit les contraindre par la force comme l’ont fait
l’Algérie, la Tunisie, l’Égypte ou la Syrie. Je vous rappelle
que les États-Unis ont restreint leurs libertés fondamentales pour
se protéger du terrorisme. (Patriot Act.) Les libertés
fondamentales sont un luxe que peuvent se permettre des sociétés
postmodernes comme les nôtres mais elles ne sont pas brusquement
transposables dans un pays qui n’y est pas préparé. Rappelez-vous
le chaos que cela a provoqué en Russie dans les années 90 et la
réaction de rejet de notre modèle démocratique qui s’en est
suivi.
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La
démocratie ne dépend pas du ventre. Effectivement ! Mais
avoir des droits fondamentaux, c’est aussi avoir droit à un
logement, à un travail, à une éducation, à des soins de santé,
à la sécurité, à ne pas avoir faim et bien sûr aussi à la
liberté d’expression et à la justice. Aucun pays au monde ne
garantit tout ces droits à ses citoyens. Pour les « nouveaux
philosophes », la liberté d’expression doit être la première
des libertés. En ironisant ; on peut avoir faim, dormir sous
un porche, être malade et sans argent mais libre de dire que c’est
à cause des banques. Et bien, je ne suis pas d’accord ! Le
premier droit fondamental est celui de vivre et le gars de mon
exemple ne vivra pas longtemps.
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On
peut se révolter quand la pression est trop forte, c’est la soupape
de sécurité. Comme vous dites, Bachar al Assad a été plébiscité
sur base d’un programme de réformes. Il a rapidement mis les
réformes économiques en place avec la libéralisation de
l’économie et la conséquence fut des difficultés économiques
dans certaines régions. Les événement du 9/11 ne lui ont pas
permis de mettre des réformes démocratiques en œuvre. Il
s’agissait alors de lutter, avec le soutien des Occidentaux, contre
les mouvements islamistes et cela ne pouvait se faire avec des
moyens démocratiques.
La
première manifestation en Syrie à eu lieu le 15 mars 2011 à Damas
et environ 200 personnes ont répondu à un appel lancé à partir
des réseaux sociaux. Neuf jours plus tard, le 24 mars 2011, la
conseillère du Président, Bousaïana Charbane annonce des mesures
qui seront prises dans les semaines qui suivent. Le 16 avril 2011,
devant les chaînes de télévisions syriennes, Bachar al Assad
annonce de nouvelles lois : l’autorisation de manifester, la
levée de l’état d’urgence ainsi que des mesures sociales pour
les plus pauvres, les laissés-pour-compte des réformes libérales
et de la crise mondiale de 2008. Des
millions de syriens ont alors apporté leur soutien à leur
président en manifestant dans les rue de Damas et d’autres villes
dans le silence le plus total de nos médias de masse. Dites-moi
ce qui justifiait encore une révolte violente. Ce sont les
Occidentaux qui ont mis à ce moment la démission du président
syrien sur la table en préalable à toute discussion avec une
opposition divisée. Une partie de l’opposition a accepté les
propositions de Bachar al Assad et l’autre a choisi de prendre les
armes avec les soutiens de leurs sponsors. Bachar
al Assad a encore essayé de faire cesser la violence dans les mois
suivants mais en vain. Rappelez-vous le retour des militaires
syriens dans les casernes et et les milices d’opposants qui en
profitèrent pour occuper le terrain laissé libre. Bachar
al Assad est moins responsable de la violence que l’opposition.
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Contrairement
à ce que vous affirmez, Bachar al Assad ne bombarde pas massivement
son peuple avec ses avions. S’il le faisait, les victimes se
compteraient par centaines de milliers.
Une
faible proportion de victimes sont civiles. Il y a surtout des
miliciens armés, des militaires, des mercenaires étrangers et
n’oublions pas les minorités chrétiennes, alaouites ou kurdes
massacrées par les tueurs pathologiques au drapeau noir.
Je
répète que l’opposition syrienne armée s’est complètement
décrédibilisée en s’alliant à de tels groupes.
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Les
enfants torturés à Deraa. Il n’y avait pas de journaliste
présents à Deraa. Tous les témoignages viennent de l’un ou
l’autre camps et ils sont ensuite exploités.
Je
n’ai jamais écrit que les services de police syrien ne torturent
pas. Il y a assez de témoignages pour le prouver, notamment celui
de Pierre Piccinin en juin 2012. J’espère que la justice punira
tous ces criminels. Je vous signale ici que Bachar al Assad n’a pas
le contrôle de ces services spéciaux, comme Georges W Bush n’avait
pas le contrôle des tortionnaire d’Abu Ghraib, Obama de la NSA ou
le parlement français de ses services spéciaux. Aujourd’hui, les
deux camps sont à renvoyer dos à dos.
Pour
HRW, soyez circonspect. Cette ONG reçoit des dizaines de millions
de dollars de Georges Soros via Open Society Institute et on
l’accuse d’être directement liée au Département d’État des
États-Unis. Human Rights Watch n’a pas diligenté
d’enquêtes sur de probables exactions commises par les États-Unis
en Afghanistan ou en Irak mais accuse la France d’être responsable
d’exécutions commises par les troupes maliennes. Prudence donc !
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Un
dernier point que je tiens à relever. Il n’y a pas d’exemple de
renversement de dictature par les armées occidentales qui ont amené
plus de démocratie et de bonheur aux gens. Ce ne fut le cas ni au
Kosovo, ni en Irak, ni en Afghanistan, ni en Libye. En revanche,
des transitions pacifiques se sont bien passées en Espagne, au
Portugal, en Afrique du Sud ou en URSS. Imposer la démocratie par
les armes n’amène pas la démocratie.
Mon
analyse de ces événements est que l’instauration d’une démocratie
n’a jamais été à l’ordre du jour pour les Occidentaux. D’ailleurs,
comment peut-on s’allier au Qatar ou à l’Arabie saoudite pour y
arriver. William Hague n’a-il pas dit que ce sera une dictature
militaire qui succédera à Bachar al Assad ! Chaque pays a sa
ou ses raisons d’intervenir en Syrie. Le gaz pour les uns, le
salafisme pour d’autres, une avancée géostratégique pour les
États-Unis, une victoire diplomatique pour le France, une extension
de sa zone d’influence pour la Turquie ou le maintien de son dernier
allié pour la Russie. Ne serait-il pas temps de demander l’avis des
Syriens. C’est à eux de décider si leur avenir doit être avec ou
sans Bachar al Assad.