Cher pierrarnard,
C’est un propos intéressant que vous tenez là, car il pointe du doigt un levier essentiel, celui de « l’affectif imaginaire et social », qui est précisément la raison pour laquelle les 4x4 sont peut-être une cible privilégiée et pertinente pour mener une action écologique.
Car, précisément, il faut « décoloniser l’imaginaire », pour reprendre une tournure chère aux objecteurs de croissance, dont je déclare parfois faire partie. Sans cela, une réelle prise de conscience écologique à grande échelle sera très difficile, et les vrais combats écologiques seront vains.
Le rêve d’acquérir et de posséder un 4x4 ou une Ferrari et l’envie de consommer des fraises en hiver (pour caricaturer) participent de la même logique, d’une certaine manière. En l’occurence, une logique poussée par une volonté de domination (domination des autres - sociale - dans le premier cas, domination - par l’Homme - de la nature et de ses cycles saisonniers dans le second cas), volonté qui ne peut que révéler un mal-être (illustré entre autre par le vieil adage populaire : « grosse voiture, petite bite »). L’épidémie de 4x4 qui sévit actuellement me semble donc être le signe d’une société malade, mal dans sa peau.
Il ne s’agit pas de rallier à la cause écologique le public d’auto-moto ou de turbo, mais d’essayer de détourner ce public de ces centres d’intérêts, de ces sources de fantasmes, de leur donner d’autres rêves. De décoloniser leur imaginaire, donc. Je crois que cette « guerre des valeurs » est nécessaire, même si certains se feront un plaisir de la qualifier de liberticide ou fasciste. Cette démarche ne peut être consensuelle dans la mesure où le problème réside dans ce que nous sommes et ce que nous faisons, et qu’il nous faut donc changer et nous remettre en question.
Ce « combat » (contre les 4x4) peut être efficace grâce à toutes les « externalités positives » qu’il peut engendrer.
C’est donc sur tous les fronts qu’il faut se battre, quitte à s’épuiser. Et ne dites pas « concentrez vous sur des combats efficaces » car ce n’est pas plus mon affaire que la vôtre, nous sommes égaux devant le civisme.
Néanmoins, il me semble évident qu’il faut privilégier le dialogue (avec les propriétaires de 4x4) à toute forme de stigmatisation sans condition (je ne pense pas que rayer un 4x4 ou crever ses pneus ait jamais converti son propriétaire vers une démarche écologique).