a propos de votre intervention au sujet de la déréliction du sacré, je vous rejoins entièrement. je pense même qu’elle est l’un des vecteurs essentiels de compréhension des transformations sociales à l’oeuvre.
en effet, l’Occident s’est construit et développé sur une conception rationaliste du monde, cherchant dans la science et la connaissance les sources du bien-être humain. l’idéal positiviste du progrès et de la raison devait conduire l’humanité vers une fin de l’Histoire heureuse. or, le XXème siècle a montré les limites de cette conception rationaliste du monde. si la science permet d’expliquer le comment des choses, en rien elle ne répond au pourquoi ? longtemps, on a pensé que la foi en la Science (car en définitive il s’agit bien de cela) arriverait à désenchanter le monde des vestiges de substrat irrationnel, magico-religieux.
or, on a oublié que dans le religieux, il y a du lien. le religieux au sens large est ce qui donne du sens, qui crée du lien entre les individus. le désenchantement du monde a procédé à une déliaison au sens, pour y substituer un lien impersonnel et bureaucratisé.
Pour autant, le sacré semble faire un retour en force depuis quelques années. Occulté par l’Occident rationnel depuis le XVIIIème, on assiste à une sorte de « retour du refoulé ». le renouveau religieux, la multiplication de sectes, la recours au sacré apparaît comme un des éléments majeurs de ce début du XXIème. certes, c’est un sacré modifié, transformé, qui n’a plus rien de « méta-social ». c’est un sacré individualisé où chacun se construit ses propres idoles en y mettant un peu de chrétienté par ci, un peu de bouddhisme par là, etc. dans le but de donner un sens à sa vie (pour ne prendre qu’un exemple : aujourd’hui beaucoup se disent catholiques et croient dans le même temps à la réincarnation).