@JC Moreau
« 1- Vous péchez par omission, en ne faisant aucun cas de l’obligation d’analyse circonstanciée des propos litigieux qui pèse sur le juge. Tout comme la Cour de Cassation, vous n’analysez le propos litigieux qu’en dehors de son contexte »
Bien au contraire. Relisez mon commentaire initial qui indiquait que le contexte montrait bien que les propos de Dieudonné visaient bien les Juifs (en tant qu’individus) et non le Judaïsme (en tant que religion) : « Cette attaque envers des personnes du fait de leur religion est d’autant plus flagrante en replaçant ce propos dans son contexte : »Les musulmans aujourd’hui renvoient la réponse du berger à la bergère« . Il ne parle pas là non plus de l’Islam (en tant que religion, avec ses dogmes, pratiques, croyances) mais des musulmans et de leur comportement supposé. » (et c’est un indiviu qui peut avoir un comportement, pas une une religion).
« 2-Vous occultez totalement les motivations de cet arrêt telles que présentées par la Cour de Cassation elle-même. (...) La Cour de Cassation procède ici à un amalgame flagrant entre la critique du judaïsme et l’antisémitisme. Et c’est bien tout le reproche que je lui fais. »
Bien au contraire, c’est vous qui ici faites l’amalgame entre la critique du judaïsme et antisémitisme en ne voyant pas (ou en refusant de voir) qu’il est fort différent de dire « les Juifs, c’est une escroquerie » et « le Judaïsme, c’est une escroquerie ». La Cour de Cassation fait elle bien la différence, condamnant les propos visant les Juifs et non les propos visant le Judaïsme.
« Existe-t-il à votre connaissance un autre moyen juridique que celui de »l’injure aux personnes du fait de leur religion« pour s’opposer à la critique du fait religieux ? Le délit de blasphème n’existant plus, c’est le délit d’injure qui est employé à des fins de censure religieuse. »
Votre démarche est limpide : au lieu de (logiquement) analyser les actes pour en déduire l’intention, vous présumez sans fondement de l’intention et cherchez à tout prix à faire coller les actes.
Vous présupposez a priori que la Cour veut condamner le blasphème. Partant de cette hypothèse, même lorsque les actes (i.e. la décision de justice) indiquent clairement l’inverse, vous déformez les faits afin de les faire correspondre à votre hypothèse que vous cherchez à faire passer pour une conclusion.
Car pourquoi voudriez vous cherchez « un autre moyen juridique que celui de ’l’injure aux personnes du fait de leur religion’ pour s’opposer à la critique du fait religieux », si ce n’est que vous présupposez que la Cour a cherché a priori à condamner un blasphème et non une injure - et que vous souhaitez voir coïncidez sa décision à votre hypothèse ?
Cette démarche a un nom : le préjugé. Elle ne répond en rien à la raison ou la logique.
« Une fois replacés dans leur contexte, les propos » les juifs, c’est une secte, une escroquerie. C’est une des plus graves parce que c’est la première« renvoient sans équivoque possible la critique de la notion de peuple élu »
Les mots ont un sens.
S’il avait voulu parler de la notion de peuple élu, Dieudonné aurait dit « la notion du peuple élu est une escroquerie ». Or, ceux qu’il a injuriés, ce sont « les juifs » - pas « le Judaïsme » ou « la notion de peuple élu ».
Cela est encore confirmé par le contexte : il fait un parallèle avec les musulmans - pas l’Islam.
La Cour de Cassation ne juge pas ce que Dieudonné aurait pu dire. Elle juge ce qu’il a dit. Tenter de faire croire que la Cour de Cassation a jugé non les propos tenus mais ceux-qu’il-voulait-en-fait-dire-mais-qu’il-n’a-pas-dits, c’est déformer la décision de la Cour de Cassation.
Ce n’est pas la Cour qui confère aux propos de Dieudonné un caractère antisémite : ces propos de Dieudonnés SONT antisémites du fait qu’ils injurient les individus au lieu de s’en prendre aux idées (i.e. à la religion). Et la Cour ne réduit pas champ d’un débat public sur les causes de l’antisémitisme - car elle n’empêche absolument pas la critique du Judaïsme tant que cette critique s’en prend à la religion et non aux religieux.
Il ne faudrait tout de même pas laisser libre cours au propos racistes et antisémites pour peu qu’ils soient précédés d’une ou deux phrases de critique (légale) de religions, de pratiques ou d’idées.
« S’agissant des »privilèges« , avez vous connaissance de jurisprudences où des individus auraient été condamnés pour avoir dit que » l’Eglise catholique était une secte qui avait réussie« ? »
Cette remarque illustre parfaitement le fait que vous ne voyez (ou ne voulez pas voir) la différence entre s’en prendre à une religion ou à des individus.
La phrase « l’Eglise catholique était une secte qui avait réussie » n’est en rien illégale. Comme ne serait pas illégale la phrase « le Judaïsme était une secte qui a réussie ».
Mais si vous cherchiez un parallèle avec le propos de Dieudonné, vous auriez dû demandé si la phrase « les chrétiens, c’est une escroquerie ». Et là, comme pour « les juifs », cela aurait été illégal et à mon sens condamné (cf. ma réponse à autrepseudo du 27/02/2007 21h00).
Mais, pour répondre à votre question sur une condamnation par la justice française de propos critiquant l’Eglise catholique, vous en fournissez vous-même un exemple : « par un arrêt du 28 avril 1998, la Cour de cassation avait également condamné pour « diffamation raciale envers la communauté chrétienne » le journaliste Paul Giniewsky, également sociologue et historien. Dans un article mis en cause par l’AGRIF (8), intitulé « A propos de l’encyclique »Splendeur de la Vérité" - L’obscurité de l’erreur », l’auteur considérait que :
« L’Eglise catholique s’auto-institue seule détentrice de la vérité divine, (...)« . Cette condamnation - comme vous le rappelez - a été cassée par la CEDH car ici - contrairement à ce qu’à dit Dieudonné en visant »les juifs" - la critique vise l’Eglise et sa doctrine (religion) et non les catholiques ou les chrétiens (individus).
Il n’y a donc nullement « privilège » envers les Juifs. Votre propre article fournit les faits qui le prouvent - votre accusation est donc à la limite de la diffamation.