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Commentaire de JeanCorseul

sur Un excellent texte du CFCM


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JeanCorseul 9 juin 2014 01:26
@ Christian,

Je vous remercie pour votre réponse circonstanciée, qui me prouve tout d’abord que vos affirmations procèdent d’une vraie démarche cognitive, enchaînant étude et réflexion. Cela devrait aller sans dire, mais c’est, curieusement, assez rare sur les forums pour mériter d’être souligné, et me pousser au désir de continuer à dialoguer avec vous.

Je constate tout d’abord que nos divergences concernant l’islam pris en lui-même sont plus minimes que je ne l’avais d’abord pensé, et je m’en réjouis.

C’est dans la suite que nous divergeons : Autant vous le dire tout de suite, je suis ce catholique qui, selon vous, n’existe plus, bien que je ne rêve certainement pas de dresser un bûcher pour quiconque, moi qui suis déjà incapable de tuer un malheureux lapin...

C’est donc finalement de l’existence de Dieu que nous devons débattre avant de revenir à la question pratique de l’Islam dans un second temps, puisque nous sommes d’accord en préalable, me semble-t-il, que, si Dieu il y a, le Coran ne peut en aucune façon être l’expression de sa justice : Il restera alors à s’interroger sur le rapport du christianisme à la vérité.

Car si je vous comprends bien, mais vous me détromperez si j’interprète mal, vous vous situez dans la philosophie matérialiste du « sens de l’histoire », que je crois assez bien connaître pour y avoir adhéré depuis l’adolescence jusqu’à ma subite conversion vingt ans plus tard.

Donc, selon cette philosophie, l’esprit humain fait de perpétuels progrès dans toutes les sciences, dont les applications technologiques constituent la preuve extérieure. Par suite, on considère que chaque science ne fait qu’accumuler des connaissances nouvelles, le savant du siècle courant ayant donc un point de vue théorique supérieur à celui du siècle précédent.

Par extension des sciences exactes aux sciences humaines, on considérera par conséquent qu’un philosophe du XVIIe siècle est supérieur à un philosophe du Moyen-âge, et inférieur à un philosophe du XXe siècle : Ainsi Spinoza se place au-dessus de St Thomas d’Aquin, et au-dessus de lui s’étagent de continuels progrès passant successivement par Kant, Hegel, Schopenhauer, Marx, Nietzsche, Bergson, Sartre, Cioran, etc...

A ce point, cependant, je veux réfuter le glissement subreptice qui vise à accorder à la philosophie l’incontestable gradation visible dans les sciences exactes : Car à vrai dire, en matière de philosophie, il n’y a pas de véritable progrès comme en mathématiques, il n’y a que des changements de prémisses, chaque hypothèse nouvelle pouvant engendrer tout un système de pensée en cela qu’elle induit de facto une sous-infinité de syllogismes inédits permettant de remettre en question tous les philosophes précédents : Je veux dire par là qu’en matière de philosophie, il n’y a pas de progrès, mais seulement un « engraissement » du corpus qui ne constitue pas à proprement parler un apport de connaissances nouvelles, mais plutôt un amalgame de méta-connaissances verbeuses sur un corpus cognitif immuable depuis l’antiquité et qui constitue l’ensemble des mécanismes intellectuels du raisonnement exact.

Saint Paul le disait mieux que moi, et de manière plus directe : « Prenez garde que personne ne fasse de vous sa proie par la philosophie et par une vaine tromperie, s’appuyant sur la tradition des hommes, sur les rudiments du monde, et non sur le Christ » (Colossiens, 2:8). Il manifestait par là que, selon son expérience, la révélation qu’il avait reçue du Christ avait infiniment plus de force que tous les syllogismes qu’il aurait pu trouver par le raisonnement philosophique.

Or, à l’inverse, pour celui qui n’a pas reçu cette immanence de la révélation, seul le raisonnement qu’il tire de son propre fonds lui semble digne de confiance : Comment agréer une connaissance donnée arbitrairement de l’extérieur et non vérifiée par ma propre démarche maïeutique ?

C’est ici que Blaise Pascal nous propose son pari : Soit il n’y a rien au-delà, auquel cas la vie est absurde, et il ne servira à rien, une fois dans le néant, d’avoir eu raison de croire au néant, soit l’au-delà existe et il sera dommageable de l’avoir ouvertement méprisé durant la vie terrestre : Ainsi, le matérialiste peut être perdant. Quant au croyant, il n’y aura pour lui nulle conséquence négative, une fois dans le néant, d’avoir cru à quelque chose qui finalement n’existe pas, mais il y aura tout bénéfice de s’être efforcé de rechercher et d’aimer son Créateur s’il doit finalement passer en jugement devant Celui-ci. Car si l’au-delà est néant, alors la vie est absurde, et si la vie est absurde, peu importe dans ce cas de croire à quelque chose de faux, qui ne sera ni plus ni moins absurde que l’absurdité réelle de l’existence : 

L’athée est donc soit étale, soit perdant, et le croyant est donc soit étale, soit gagnant. D’où l’intérêt, pour chacun, de méditer sur le pari de Pascal, qui pousse à s’interroger sérieusement sur la foi en l’existence de Dieu... Qu’en pensez-vous ?






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