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Commentaire de Christian Labrune

sur Le droit de mourir dans la dignité doit être reconnu


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Christian Labrune Christian Labrune 27 juin 2014 09:54
Christian ! « mourir dans la dignité » c’est mourir quand on le décide parce que chacun doit être maître de ses choix.

@Chalot
Chacun doit être maître de ses choix, certes, mais le choix de la plupart des vivants qui s’intéressent au monde et sentent qu’ils ont quelque chose de positif à y faire, ce serait plutôt de ne pas mourir. « Il faut vivre comme si on ne devait jamais mourir » écrit Vauvenargues. Aucun homme n’a choisi de naître, aucun homme n’a jamais choisi non plus d’être génétiquement programmé pour la mort. Parler de « maîtrise » lorsqu’il s’agit de la mort, c’est proprement un caprice d’enfant qui veut la lune, ou se chatouiller pour se faire rire.
Je n’ai absolument rien contre le suicide lorsqu’il résulte, à la manière des stoïciens romains, d’une délibération de la raison pure que n’entache aucun de ces affaiblissements momentanés d’un psychisme devenu dépressif et qui sont la cause de la plupart des morts volontaires. C’est Valerius Asiaticus, sous le règne de Claude, ayant décidé d’en finir, qui fait donner un festin pour prendre congé de ses amis avant de s’ouvrir les veines, et ordonne de déplacer le bûcher funéraire élevé dans son parc pour que le feu qui doit bientôt le réduire en cendres n’abîme pas quelques très beaux arbres. J’admire ! Mais quand vous verriez quelqu’un essayer d’escalader le garde-fou du Pont Neuf au milieu de l’hiver, vous feriez comme moi : vous l’empêcheriez de se jeter dans le fleuve et vous alerteriez les pompiers qui le conduiraient aux urgences. Dans la plupart des cas, ceux qui ont fait une tentative de suicide, qui ont « voulu » mourir, après un traitement et une aide appropriés, cessent évidemment de le vouloir. Le type sur un lit d’hôpital qui souffre après une opération et dit qu’il préfèrerait mourir, on ne peut jamais être sûr qu’il le veuille vraiment. Celui qui se balance déjà au bout d’une corde et tire une langue de vingt centimètres, on peut être sûr qu’il a réellement voulu mourir : tout ce qu’il a fait était suffisant et on peut à voit sa situation présente juger que c’était efficace. Dans votre logique, la seule chose à faire, ce serait donc de le tirer par les pieds pour accentuer la strangulation et abréger ses souffrances. Et pour le type qui s’agite dans les bouillons glacés du fleuve et qu’on a vu sauter « volontairement », la seule chose que devrait faire le gardien de la paix témoin de la scène, c’est sortir son révolver et l’achever d’une balle dans la tronche. Plus tard, on repêcherait le corps, mais la chose est beaucoup moins urgente.
Le pauvre bougre qui n’a pas le courage de mourir par lui-même et sollicite l’aide d’autrui transforme l’autre en assassin. Le risque de mourir « en légume » est très faible mais pas inexistant. La seule chose à faire pour ceux qui ne supportent pas cette idée, ce serait donc, pour faire droit à leur angoisse, de se tirer une balle dans la tête le plus vite possible, en pleine jeunesse, en pleine santé, afin de ne se trouver jamais en situation d’avoir à exiger d’autrui ce qu’autrui ne peut lui donner sans tomber dans l’indignité des criminels : la mort. Mais n’importe quel psychiatre vous dira qu’on est confronté là au cas pathologique d’une obsession névrotique : l’idée de la mort doit être « apprivoisée », comme dit Montaigne, et l’angoisse de mourir, si elle gangrène la vie, fait de celui qui la subit, une bien misérable créature, et rien de plus qu’une pauvre bête.
D’où il résulte que les partisans de la « mort dans la dignité » relèvent au premier chef des services spécialisés de l’hôpital Sainte-Anne. Qu’on les enferme, qu’on les soigne, et qu’ils nous foutent la paix.

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