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Commentaire de Éric Guéguen

sur 10 thermidor : il y a 220 ans les félons exécutaient sans jugement Robespierre et 104 autres révolutionnaires


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Éric Guéguen Éric Guéguen 30 juillet 2014 12:36

Permettez-moi, quand même, d’être le mieux placé pour savoir ce que j’avais en tête. Après cela, si je me suis mal exprimé, de manière brouillonne ou autre, tant pis pour moi, je serai encore plus saqué que d’habitude (s’il reste des personnes à nous lire).
 
Donc, voici le fond de ma pensée, en quelques points :
 
1. Les révolutionnaires que l’on déterre à gauche sont de purs idéalistes, en tête desquels Robespierre. Ils partagent tous le même rêve d’une humanité confraternelle. À leurs yeux, la France d’après 1789 est la tête de pont d’un mouvement de libération vis-à-vis des siècles d’obscurantisme. Il convient donc à leurs yeux de vouer aux gémonies tout ce qui peut rappeler le passé, et d’étendre à l’avenir la liste des pays promis aux lendemains qui chantent. Le culte des droits de l’homme a vocation à s’imposer sur toute la planète, envers et contre tout.
 
2. Le modèle politique qu’un Robespierre avait en tête était de type républicain. Qu’est-ce qu’une république au sens moderne ? Un État qui refuse le pouvoir arbitraire d’un seul, qui plus est lorsqu’il est héréditaire. Point barre. Les principes républicains sont ancrés dans une communauté, la « chose publique » a beau être telle, elle ne se conçoit qu’appliquée en un lieu et relative à un peuple donnés. En ce sens, une « république mondiale » serait une contradiction dans les termes  ; il s’agirait davantage d’un empire.
 
3. En prétendant avoir décelé les clés de l’amitié entre les peuples, de l’amour dardant par-delà les frontières au travers de ses droits de l’homme, la France lance un avertissement à la planète entière. Fût-ce dans une bonne intention (et j’en suis convaincu), cette idée n’est pas exempte d’hégémonisme. Le combat philosophique qu’elle engendre va bien au-delà de l’établissement d’une République et Robespierre lui-même escomptait bien que la France puisse faire tâche d’huile. Mais l’adhésion de peuples monarchistes à des nouveaux principes exotiques n’est pas spontanée, elle doit être provoquée d’une manière ou d’une autre. D’où le recours à la conscription, première armée de masse, et premier pas vers les massacres de masse (Napoléon n’a rien inventé à ce niveau-là, il a profité de la levée révolutionnaire...) afin, non seulement d’asseoir la république française, mais de répandre ses bienfaits.
 
Par conséquent, il y a contradiction, me semble-t-il, à vouloir à la fois reconstruire une communauté sur de nouvelles bases politiques ET exporter un modèle en chantier chez les voisins. La France d’alors y était peut-être contrainte, après tout, mais lorsque j’entends dire que Robespierre est tout blanc et que Napoléon a trahi les principes de la République, j’ai envie de rigoler. La Terreur était inconséquente, comme le sont beaucoup de gens à gauche, voulant le beurre (en l’occurrence le changement national) et l’argent du beurre (les rêves de grandeur œcuménique). Napoléon, lui, était cynique : on lui a confié la recette d’une omelette, et on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs. Jamais l’Europe contemporaine ne s’est trouvée aussi unie qu’à cette période : d’abord autour de la France (jusqu’en 1808), puis contre elle (retour de bâton espagnol, dans un pays de culs bénits).
 
La Révolution française est à l’origine ET de l’universalisme le plus récent, ET du nationalisme. Lorsque ces deux tendances s’amalgament, le totalitarisme n’est plus très loin.


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