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Commentaire de Yakov

sur Le sondage, les commentateurs et la mauvaise foi


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Yakov (---.---.197.37) 6 avril 2006 15:02

La confusion sur les termes libéralisme, économie de marché, libre entreprise n’est pas accidentelle, mais a été cultivée pendant la guerre froide.

Pendant cette période le capitalisme (le contrôle privé, non démocratique, des outils de production, inscrit dans les lois et appliqué par les tribunaux) préférait se faire passer pour la « liberté ». Tout le monde est pour la liberté (« free »), sauf qu’en l’occurrence il s’agissait de la liberté du loup dans la bergerie, du propriétaire de licencier ses employés, du patronat d’engranger les profits sans rendre compte.

La pirouette était basée sur le fait qu’en Europe de l’Est il y avait un vrai manque de liberté politique. Une caste bureacratique avait dépossédé les travailleurs de leur Etat, mettant fin au contrôle démocratique par et pour les travailleurs, alors que les entreprises étaient propriété collective. Les capitalistes n’ont jamais réclamé que Staline rende la parole au peuple russe pour faire continuer un système offrant des garanties d’emploi et autres acquis. Les seuls dissidents que l’Ouest a soutenu étaient ceux, comme Solidarnosc ou Eltsine, qui voulaient casser le système collectivisé et leur ouvrir les portes de la bergerie. Au contraire, l’Ouest s’est rejoui de voir les trotskistes et les communistes envoyés en camps à partir des années 1930. Pendant ce temps à l’Ouest la bourgeoisie se réservait le droit de corrompre tout l’échiquier politique. Quand certains parlent de liberté, il faut voir ce qu’il y a derrière.

Un autre aspect de la pirouette c’est de jouer sur un raccourci : oui bien sûr tout consommateur apprécie de pouvoir acheter ce qu’il veut quand il veut. Qui ne souhaite pas vivre dans un de ces pays où on peut facilement acheter des produits abondants et de qualité ? Il se trouve justement que ces pays sont les pays capitalistes avancés. Conclusion facile. Mais il y a un problème quand même : si ces pays sont plus riches c’est parce qu’ils ont fait leur révolution industrielle les premiers et se sont assurés que les autres pays ne pourraient pas les rattraper, au moyen de la colonisation et de guerres (chaudes ou froide). Malgré ça, la socialisation de l’économie a permis à l’Est de rattraper un retard phénoménal dans beaucoup de domaines, et même parfois de faire mieux que l’Ouest. En fait si les pays à l’industrie avancée établissaient un contrôle démocratique des outils économiques et une planification de l’usage des ressources, leur propsérité serait nettement accrue. La « liberté » de consommer serait automatiquement accrue.

Aujourd’hui on voudrait faire croire qu’il y a un bon et un mauvais capitalisme, que l’Etat est au dessu de la mélée. Ce n’est pas vrai. L’Etat n’est pas un acteur indépendant, l’Etat est un outil (tribunaux, police...) qui relaie et stabilise la domination d’une classe. Marx envisageait la disparition des classes après une période socialiste, lorsque les niveaux de vie auraient assez augmenté pour faire disparaître la lutte de classe. Mais pour établir provisoirement un système socialiste il faut un Etat au service des prolétaires, capable entre autres d’empêcher une restauration capitaliste. Tout comme pour que les industriels puissent continuer de fermer une usine quand ça leur plaît il faut des lois et une police pour faire évacuer les grévistes, soit un Etat bourgeois. Lénine a clairement développé la question de l’Etat pour les marxistes dans un livre « L’Etat et la Révolution » (cf URL).

En France on voit très bien que cet Etat est toujours au service de la bourgeoisie. Les partis de droite comme de gauche ne cherchent pas à remplacer cet Etat par un autre, ils ne remettent pas en question la domination de la bourgeoisie, au contraire il veulent garder cet Etat bâti par et pour la bourgeoisie, et en être les gérants. Les candidats les plus avantagés sont ceux qui ont des fortunes par leurs accointances à la grande bourgeoisie, les autres jouent sur leur origine populaire comme capital de trahison. Certains promettent une gestion de capitaliste avisé, d’autres promettent une gestion « régulée ». Aucun ne remet en cause le système capitaliste.

Dans la mesure où l’Etat bourgeois régule quelquechose c’est toujours à court terme, uniquement afin d’assurer la domination de la bourgoisie et ses profits. Par exemple quand Sylvain Reboul dit que l’Etat ne peut plus diriger aujourd’hui, en fait ça veut dire que ce que la bourgeoisie jugeait nécessaire à sa survie pendant la guerre froide n’est plus d’actualité. L’URSS a disparu, les travailleurs sont désorientés, alors inutile de maintenir une sécu, des droits pour les travailleurs, etc. Les accords européens de la période de guerre froide cherchaient à contrôler la compétition capitaliste en Europe, pour maintenir un appuis social minimum. Depuis la fin de la guerre froide, avec la constitution européenne et les nouvelles lois en France comme partout ailleurs en Europe, les capitalistes cherchent à maintenir leurs profits en serrant la vis aux travailleurs. Sur ce point les travailleurs en France ne font pas tant que ça de confusions.


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