Oui la vérité fait mal...
« Le temps des premières impostures
Alain Soral
commence sa « formation politique » en traînant dans les milieux
intellectuels parisiens alors qu’il est étudiant aux Beaux-Arts. En
1990, il découvre les écrits de Michel Clouscard qui l’amèneront à se
définir comme « marxiste ». Dans le même temps, il fait sienne la
critique féroce de Clouscard sur Mai 68 et en développe une haine
viscérale pour tous les mouvements d’extrême gauche issus de cette
période.
De 1990 à 1993, Alain Soral affirme avoir été militant au
PCF. Étrange coïncidence : personne ne se souvient de son passage. Selon
Jean-Paul Gautier et les coauteurs de la Galaxie Dieudonné, Soral
déclare « avoir animé pendant cette période, aux côtés de Marc Cohen, le
Collectif communiste des travailleurs des médias (dit aussi « cellule
Ramón-Mercader »), faisant paraître le bulletin La Lettre écarlate ».
Première imposture, car « en réalité, ce collectif était dirigé par
Henri Malberg, membre du comité central du PCF. Lors de nos
investigations, nous n’avons trouvé aucun document qui laisserait
entrevoir qu’Alain Soral aurait joué le rôle qu’il cherche à
s’attribuer. » Pourtant, aujourd’hui encore, c’est ce supposé passage au
PCF qui constitue le faire-valoir de gauche de Soral, le blanc-seing
grâce auquel il fait passer ses idées réactionnaires et racistes pour
des positions « anti-système » !
Du FN à sa petite entreprise
C’est
en 2005 que le masque se fissure : Soral adhère au FN, d’abord de
manière un peu officieuse, puis comme militant « intellectuel » proche
de Jean-Marie Le Pen. Il deviendra par la suite un dissident du parti.
Par opposition aux idées nauséabondes de l’extrême droite ? Non : par
ego, le FN lui ayant refusé la tête de liste en Île-de-France pour les
européennes de 2009. Il entre par ailleurs en conflit avec Marine Le
Pen, laquelle a entrepris de soigner l’apparence de respectabilité
politique de son parti en faisant le ménage des éléments les plus
radicaux (entendez par là ouvertement racistes, homophobes et
antisémites). À ce moment-là, Jean-Marie Le Pen lui-même, bien connu
pour ses côtés modérés, trouve le petit Alain un peu « excessif » (3),
c’est dire ! En 2009, Soral quitte donc le FN et publiera à cette
occasion un texte « antimariniste » sous le titre : « Marine m’a
tuer ! »...
Quelques mois auparavant, en 2007, Soral avait créé son
propre groupe : Égalité et Réconciliation. Il le définit comme « la
gauche du travail et la droite des valeurs, pour une reconstruction
nationale ». Pour bien marquer le véritable ancrage politique de
l’organisation, c’est Jean-Marie Le Pen qui, présent à la première
université d’été du groupe, en prononcera le discours de clôture. En
2011, Soral publie son œuvre phare, qui constitue peu ou prou les
fondements idéologiques d’Égalité et Réconciliation : Comprendre
l’empire : demain la gouvernance globale ou la révolte des nations ? La
construction d’Égalité et Réconciliation n’est pas basée sur la
formation et l’émancipation intellectuelle de ses militants, mais bien
sous « hégémonie intellectuelle » d’Alain Soral, les militants le
définissant eux-mêmes comme leur « maître à penser ». Aujourd’hui, c’est
une coquille vide regroupant peu de personnes, ce groupe servant de
vivier de recrutement, en particulier au FN (4).
Aux sources du fascisme
Officiellement,
Soral et les membres d’Égalité et Réconciliation se défendent d’être
dans une organisation d’extrême droite et se définissent toujours comme
« marxistes ». Le marxisme n’est pas un label : nul n’en est
propriétaire, et il existe de nombreux courants marxistes qui débattent
et font vivre l’extrême gauche. Mais ces courants ont pour la plupart en
commun une critique profonde du système : l’inégalité économique
inhérente au capitalisme ; le fait qu’une minorité, la bourgeoisie et
son personnel, possède l’écrasante majorité de la richesse mondiale et
des moyens de production quand tous les autres, la majorité de la
population, n’ont d’autre choix que de vendre leur force de travail pour
survivre. Une inégalité fondamentale qui est à la source de toutes les
oppressions que vivent les peuples.
Soral, lui, se réinscrit dans la
lignée du fascisme mussolinien. Selon lui, prolétaires et patrons sont
victimes au même niveau du système capitaliste. Il appelle donc de ses
vœux à l’union des classes populaires et de la bourgeoisie nationale :
une rengaine connue, c’était déjà là le vœu, entre autres, du parti
national-socialiste allemand ! Une question demeure, à laquelle Soral ne
daigne pas répondre : comment un système économique peut-il perdurer si
longtemps si personne n’en profite ? Si tous y perdent ? Peu importe
les absurdités de sa théorie, Soral estime qu’il est temps de dépasser
le concept de lutte des classes pour restaurer les « solidarités
nationales ». Sous couvert de discours marxiste, la « pensée
soralienne » met donc fin à la lutte des classes et ne cherche plus qu’à
rendre acceptable les idées nationalistes en direction des classes
populaires.
Imposteur et affairiste
Comme
pour son ami Dieudonné, c’est encore en se penchant sur les moyens de
subsistance de Soral que l’on comprend le mieux toute l’imposture de son
discours : celui qui a bâti sa notoriété sur la critique du système
marchand s’avère être lui-même un brillant commerçant. « Alain Soral
détient en effet 80 % des parts d’une société (SARL Culture pour tous)
qui se subdivise en quatre sites distincts de vente en ligne. Et avec
640 000 euros de chiffre d’affaires l’an passé, on est loin de la charte
d’E&R qui fustige « l’idéologie du monde marchand » » (5). Il
semble que la critique politique de Soral soit sans pitié pour les
autres, mais s’arrête là où commence sa propre « vie privée »...
«
Soral se situe en fait à la rencontre des frères Strasser en Allemagne
et de Mussolini en Italie. Il se place sur son terrain de prédilection
et sa spécialité, le double discours : marxiste et traditionaliste.
C’est ainsi qu’il présente son livre Comprendre l’Empire : "Cet essai
pédagogique récapitule le parcours complet allant de la tradition au
marxisme et du marxisme à la tradition qui seul permet la mise à jour du
processus de domination oligarchique engagé depuis plus de deux siècles
en Occident". Nationaliste avant tout. Pour paraphraser Clemenceau, on
peut dire que Soral est au marxisme ce que la musique militaire est à la
grande musique »