Contre un attentat barbare et contre ceux qui l’exploitent au nom de « l’unité nationale »
Lutte Ouvrière partage
la profonde indignation provoquée par l’attentat commis le 7 janvier à
Paris. Nous exprimons notre émotion et notre solidarité avec la
rédaction de Charlie Hebdo et avec les proches des victimes, que pour
certaines nous connaissions, ce qui nous touche d’autant plus.
Cet attentat est un acte ignoble. Il a visé des journalistes pour ce
qu’ils ont dessiné et écrit, ainsi que ceux qui les protégeaient. Ceux
qui emploient de telles méthodes ne sont pas seulement des ennemis de la
liberté d’expression et de la liberté de la presse, ils sont par là
même des ennemis des travailleurs, de leur liberté de s’exprimer et de
s’organiser. Quelle que soit l’idéologie dont ils se réclament, leurs
méthodes visent à imposer la dictature sur une population ou une
fraction de population. Le terrorisme, qu’il soit employé par les États
ou par des groupes cherchant à constituer un pouvoir d’État, vise à
faire taire toute expression divergente, et il frappe toujours et
surtout la liberté des opprimés de lutter contre l’exploitation qu’ils
subissent.
En même temps, nous ne pouvons qu’être choqués par l’exploitation
politique qui est faite maintenant de cet évènement par différents
partis politiques et surtout par le gouvernement de François Hollande et
Manuel Valls. En appelant à l’unité nationale à partir de cet
événement, il cherche à restaurer dans l’opinion un crédit qu’il a
largement perdu de par toute sa politique. Il veut en particulier
justifier, par cet attentat attribué à ce qu’on appelle des
« djihadistes », les interventions de l’armée française en Afrique et au
Moyen-Orient.
En agissant ainsi et alors qu’il prétend les défendre, le
gouvernement trahit la mémoire des journalistes assassinés eux-mêmes.
Ils étaient non seulement des ennemis irréductibles des idéologies
religieuses, mais aussi des anti-militaristes opposés à toutes les
expéditions militaires. Mais de plus, par une opération qui au fond est
symétrique de celle que voudraient faire les « djihadistes », le
gouvernement voudrait imposer sa politique comme la seule possible. Or
les manœuvres et les opérations militaires des puissances impérialistes,
menées en Afrique et au Moyen-Orient pour faire prévaloir les intérêts
des grandes sociétés occidentales, portent elles-mêmes une lourde
responsabilité dans le développement de bandes armées sans contrôle qui
agissent dans ces pays, mais qui cherchent aussi à agir ici.
C’est pourquoi Lutte Ouvrière ne participera pas à des manifestations
visant à faire prévaloir une unité nationale dans laquelle pourront se
retrouver différentes forces politiques, du Parti socialiste à la droite
et au Front national. L’instrumentalisation de l’attentat à Charlie
Hebdo de leur part, pour des objectifs auxquels les journalistes
assassinés eux-mêmes étaient opposés, est indécente, sans oublier la
façon dont certains de ces partis chercheront à l’exploiter dans un sens
raciste et xénophobe. Il n’est pas question de nous retrouver au côté
de partis qui portent une grande part de responsabilité dans la
situation de crise et dans la montée de la barbarie à laquelle on
assiste et dont l’attentat à Charlie Hebdo n’est qu’une manifestation de
plus.
Lutte Ouvrière exprime encore une fois toute son indignation, sa
solidarité avec les victimes et leurs proches, et continuera à lutter
pour la liberté d’expression et de critique, à commencer par la liberté
des travailleurs et de tous les exploités de lutter contre cette société
capitaliste d’exploitation et d’injustice, que toute la politique de ce
gouvernement vise à maintenir.