Bonjour l’auteur,
Bon sur la rencontre, j’ai déjà évoqué ce que j’en pensait : en un mot psschit. ça ne pouvait aller plus loin que cela dès lors que ni les Ukrainiens, ni les Rebelles n’étaient dans ces discussions.
Toutefois, je pense qu’il faut un peu dépasser la simple mathématique des forces en présences, et poursuivre le raisonnement que je vient d’esquisser.
Dans cette réunion, il n’y avait pas non plus les Américains, ni même aucun anglophone, et même pas les différentes aides et traducteurs qui d’habitude peuplent ce genre de réunion et de discussion. Juste les 3 chefs d’état, Merkel, Poutine et Hollande en direct pendant 5 heures, et personne d’autre.
Et ça c’est réellement la chose qui me parait intéressante à remarquer. Je résume cela en 1 phrase :
Merkel avait besoin d’avoir ce que l’on appelle une discussion franche avec Poutine, et n’avait aucune envie que les Américains ne soient informés de ce qu’ils se sont dit.
Elle a donc mis Hollande (qui ne s’est pas fait prier) dans ses bagages, et est allé discuter seul à seul avec Poutine au Kremlin, où l’on peut supposer que les Américains auront du mal à écouter la conversation. Et, secret supplémentaire, aucun assistant n’était également convié, ce qui fait d’autant moins de bavards potentiels.
Je traduit cela par une prise de conscience par l’Allemagne de ce qui est réellement en train de se jouer en Ukraine, et de la volonté de cette dernière d’en arriver à une solution qui soit négociée.
Le véritable trésor de l’Allemagne, c’est son flanc Est, inépuisable vivier de travailleurs pauvres et intégrables, et zone de délocalisation intra-européenne. L’existence d’un conflit permanent dans cette zone est une très mauvaise nouvelle pour les Allemands, et si ils ont cru cet été en la possibilité de Kiev de venir à bout de la rébellion du Donbass, ils savent désormais que l’option militaire ne vaut plus, et qu’il faut d’une manière ou d’une autre arrêter le conflit et renormaliser les relations avec la Russie.
Mais Merkel sait aussi que Kiev est allé beaucoup trop loin, et que Obama ne tient pas son opposition républicaine qui veut redémarrer une guerre froide avec la Russie. Je crois donc qu’elle est en fait venu demander à Poutine de trouver une solution, ce coup çi avec la vrai coopération de l’Allemagne.
Toutefois, il en va loin de la coupe aux lèvres, et plusieurs problèmes sont à régler (en dehors du fait que il y en aura pour au moins une génération pour que l’Est pardonne à Kiev ce qu’ils ont fait) :
* Tant que les Américains feront miroiter l’envoi d’armes en Ukraine, il se trouvera toujours assez de politiciens à Kiev pour dire que ça va permettre de gagner le conflit. Un des problème consiste donc à empêcher les Américains de livrer des armes, autrement dit, de les virer d’Ukraine.
* Eviter l’éclatement de l’Ukraine. Dès lors que l’on reconnait d’une manière où d’une autre l’existence légale des DPR / LPR, d’autres demandes d’autonomie arriveront presque immédiatement. A l’Est Kharkov et Odessa, mais aussi à l’Ouest avec Lvov, ou les dernières élections ont donné un très bon score aux indépendantistes.
En résumé, Merkel et Hollande sont allés voir Poutine car ils ont compris dans quelle merde ils s’étaient mis en soutenant le régime de Kiev et surtout combien ça allait leur coûter. Ils sont arrivés à mon avis sans aucun plan réellement établi, mais avec une réelle intention de changer de politique. En tout cas, la décision a été prise de tenir les Américains en dehors de tout cela, y compris leurs plus fidèles alliés Européens : Anglais et Polonais.
C’est un changement suffisamment encourageant pour le noter.