• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de jean-jacques rousseau

sur La grande tradition bismarckienne à la rescousse du Code civil


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

jean-jacques rousseau 27 avril 2015 13:20

@Michel J. Cuny
Je doute de la pertinence et de l’utilité de la question de « l’identité réelle » de De Gaulle. Comme chacun sa personnalité présente de nombreuses facettes et une certaine complexité. Ce qui serait plus interessant à observer c’est ce moment où son préjugé social, idéologique ou de doctrine vient interférer avec une rationalité propre à l’action publique. Que ce soit sur le plan de sa carrière comme militaire (théoricien ou tacticien) ou politicien on observe un fort décalage entre ses intentions, les objectifs annoncés et la qualité du résultat final.
Par exemple dans son manifeste Vers une armée de métier en remettant en question l’armée de conscription qui a pourtant donné l’avantage militaire à la France depuis la loi Jourdan dans les guerres révolutionnaires et napoléoniennes, il s’aligne sur un préjugé aristocratique et une vieille rancoeur monarchiste contre ce pilier de la République. Ce qu’il préconise c’est une force blindée et professionelle de manoeuvre. Et en voulant tellement valoriser cette force de cavalerie blindée et mécanisée qu’il juge assez décisive et suffisante, il en vient à négliger voir dévaloriser le rôle de l’infanterie populaire et donc la question défensive en général et celui d’un dispositif défensif dans la profondeur en particulier. Analyse de la profondeur qu’il récuse sous le prétexte que la France serait « privée du nombre et dépourvue d’espaces stratégiques protecteurs ». On croit entendre François Ier se flattant à Marignan d’avoir emporté la victoire par les charges de sa cavalerie alors que les connaisseurs ont compris les rôles décisifs de l’infanterie et de l’artillerie dans l’affaire, rôles laissés dans l’ombre dans les rapports officiels. Ce préjugé lui portant à sous-évaluer le rôle d’une infanterie défensive renforcée par les tirs directs d’artillerie, l’empéchera de voir ce danger auquel il expose son offensive blindée dans le système défensif ennemi. Il sera tout déconfit à Montcornet lorsqu’on lui donnera l’occasion de mettre en pratique sa belle théorie de cavalier, en voyant ses bataillons de chars stoppés et laminés par le dispositif défensif ennemi. Or celui-ci consititué de petits groupes d’infanterie doté de petits canons anti-char abrités dans des batiments, surveillés par les anti-char de 88 mm placés sur les hauteurs : représente le modèle d’une organisation qui a fait défaut dans le système français en 1940. Aucun théoricien, ni aucun tacticien n’a vu ou n’a voulu ni pu mettre en place ce formidable système défensif contre la puissance blindée ennemie, garanti par le canon de 75 modèle 97 français adapté au tir anti-char, protégé par l’infanterie et installé en profondeur. D’ailleurs les services d’espionnage allemands suivaient de près les efforts de modernisation de cette arme anti-char et sur les +5.000 canons français bien peu avaient été déployés et moins encore utilisés contre les petits blindés allemands ou tchèques si vulnérables aux munitions anti-blindage. La plupart seront confisqués sous bache dans leurs hangars et seront acheminés vers le front russe après la défaite française à laquelle il aura contribué par la faiblesse de ses analyses et sa proximité équivoque avec la mouvance réactionnaire pétainiste.
Sur le plan politique on peut aussi citer ce cas évoqué plus haut où le préjugé anti-ouvrier l’emporte sur la question du renforcement du consensus et de la démocratie dans l’entreprise en lui faisant opter pour le gadget de la participation au bénéfice plutot que sur le dispositif auto-régulateur de la cogestion. Même si son intention était de renforcer la puissance industrielle de la France, ses préjugés ne lui permettaient pas de contrer efficacement l’orientation du patronat vers le désarmement industriel qu’il avait lui-même pu entrevoir et vérifier : « Si vous laissez libres les industriels français, au lieu de barres d’acier ils fabriqueront des portes-clés ».
Pour ce qui est du contrôle démocratique des institutions même s’il prétend que « La cour suprême, c’est le peuple français » et qu’il introduit le référendum pour : "tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent« . Finalement on voit bien que l’effectivité de ce contrôle démocratique est conditionnée par »le bon vouloir du prince" qui soumettra ou non à référendum par exemple la question de la privatisation des services publics ou plus grave les modifications du texte constitutionel ou la ratification des traités ! Ce qui pose le controle démocratique au rang d’une simple option facultative voir d’une affaire personnelle qui l’amènera finalement au chantage pour l’approbation et à la démission en 1969 le cas contraire. Laissant les affaires du pays dans les mains d’opportunistes encore moins scrupuleux et les moins du monde attachés à l’avenir de la Nation. Bravo !
Est-ce révélateur qu’il soit emporté sur sa table de jeu avec en mains les cartes d’une partie de réussite qu’il n’a jamais terminée ?   


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès