A l’auteur,
Cher Youssef, Votre article plein de nuance et d’objectivité vous honore. Cependant, j’aimerais apporter, si vous le permettez, quelques précisions à votre propos.
- Tout d’abord, le sionisme et Israël ne peuvent qu’être associés, l’un étant la finalité de l’autre.Si au départ, Herzl avait oeuvré pour que les juifs aient un territoire à eux, il avait émis plusieurs hypothèses, dont l’Argentine et l’Ouganda. Il est compréhensible que dans le contexte de violence de l’antijudaïsme de ce dernier tiers du XIX ème siècle, Herzl ait pensé à cette éventualité. Très vite, cependant, la thèse de la Palestine s’imposa comme une évidence biblique (et non historique), surtout après sa mort en 1904.
- Le Congrès sioniste mondial se mit alors en demeure, financé par les riches banquiers ou industriels juifs étasuniens, dont Rothschild fut le chantre. Il faut dire que la Palestine était proche du canal de Suez, passage obligé pour gérer toutes les richesses des Rothschild en extrême Orient. Les sionistes comprirent qu’ils auraient besoin des grandes puissances européennes pour mener à bien leur tâche. Ils tentèrent d’abord avec le Kaiser Guillaume II, allié du Sultan ottoman régnant sur la Palestine. Ils espéraient obtenir une entrevue avec le Sultan afin de négocier la cession de cette terre. Mais Guillaume II ne donna pas suite à leur demande. Déçu, le sionisme mondial se tourna alors vers le Royaume-Uni, première puissance maritime et coloniale. De ces transactions opaques sortit la fameuse « Déclaration Balfour » de novembre 1917. En réalité il s’agit d’une lettre adressée par Balfour, ministre des Affaires étrangères britannique, à Lord Lionel Rothschild, dans laquelle il engage son pays dans le projet sioniste de création d’un foyer national juif en Palestine. Le problème de cette déclaration, c’est qu’on ne précise jamais dans quel contexte et pour quelles raisons le RU prit cet engagement, et on oublie de mentionner la condition mise par Balfour, de respecter les populations, quelles que soient leur ethnie et leur religion, déjà présentes. On connaît la suite. La Conférence de la paix qui se tint à Paris en 1919, réunit de nombreux Etats, engagés dans le conflit, et le président étasunien Wilson emmena dans ses bagages, une délégation sioniste de 110 personnes menées par Bernard Baruch. Que venaient-ils faire ? Ils ne représentaient aucun Etat. Et pourquoi Wilson accéda-t-il à cette requête sioniste ?
- La suite, on la connaît. Les juifs émigrant en Palestine n’étaient pas assez nombreux pour justifier la création d’un Etat, et coincés par les Britanniques ayant reçu la Palestine en mandat après la Guerre 14-18, ils commirent des ctes terroristes à leur encontre. Par ailleurs, quand Hitler fut nommé chancelier en 1933, le Congrès juif mondial organisa de grandes manifestations aux Etats-Unis afin de boycotter tout produit allemand. Ce boycott n’arrangeait pas une Allemagne déjà gravement touchée par la crise de 1929. Des négociations eurent lieu entre le IIIème Reich et le Congrès sioniste mondial afin de trouver une solution. C’est ce qui fut appelé l’Accord de transfert (archives du III ème Reich). Il permettait aux Allemands de confession juive d’émigrer en Palestine, contre l’assurance d’acheter des produits allemands. Malgré cela, les candidats au départ ne se bousculaient pas. Après l’annexion de l’Autriche en mars 1938, Roosevelt organisa , en juillet, une Conférence à Evian, invitant tous les Etats à accorder des visas au juifs du Grand Reich, afin de les soustraire au sort qui les attendait. Hélas ! peu de pays répondirent à l’appel, et le Congrès sioniste ne fit pas grand chose pour sa réussite. Il craignait qu’une fois accueillis dans un autre pays, les juifs allemands ne prennent pas la direction de la Palestine.
Vous voyez que le sionisme et Israël sont intimement liés. Le vote de l’ONU en novembre 1947, fut pour le moins, le fruit d’un chantage de Truman à l’encontre des Etats ayant voté « non » au premier scrutin. Israël n’avait pas obtenu le quota requis. Parmi ces pays, la France et le Royaume-Uni avaient voté « non ». Mais Truman avait une arme de poids : le Plan Marshall. Au second scrutin, la France vota « oui » et le RU s’abstint. De nombreux petits pays, menacés par Washington, s’exécutèrent et votèrent « oui ». Voilà comment Israël naquit « démocratiquement.
Depuis ce jour de mai 1948, les Israéliens n’ont pas connu un jour de paix. C’était pourtant l’objectif de Herzl. Peut-être les Israéliens devraient-ils se poser les vraies questions au lieu de s’auto-persuader que cette terre leur revient de »droit".