« On nous a donc montré une grande vague dite « républicaine », l’union
nationale contre le terrorisme. Des Français fiers d’être Français, qui
aiment leurs policiers, les applaudissent et les embrassent, unis comme
jamais – et attention, hein, pas racistes, au contraire, pas
d’amalgame ! – dressés contre la monstruosité terroriste, pour les
libertés démocratiques, pour la liberté d’expression. Unis avec le chef
de l’Etat et ses prestigieux invités internationaux. Drapeaux tricolores
et marseillaises à gogo, mêlés aux hommages à Charlie.
C’est ce que Le Monde, dans une de ces Unes éminemment idéologiques dont il nous accable souvent, a appelé « L’esprit du 11 janvier ». Ce sont les images de cette France-là que nous ont montré ad nauseam
les télévisions : un peuple qui dit des choses généreuses, mais au
garde-à-vous derrière ses chefs qui eux n’ont rien de généreux. Le
gouvernement veut ainsi reprendre la main, et fait comme si ces millions
de gens, qui ont juste défilé, plus ou moins confusément, « contre le
terrorisme » ou « pour la liberté », avaient manifesté pour le pouvoir.
Et d’invoquer cet « esprit du 11 janvier » pour justifier tout et
n’importe quoi…
« Esprit, es-tu là ? »
En
réalité, la « vérité » de ces manifestations est bien évidemment
contradictoire. Il y a cependant quelques évidences, à rappeler pour
empêcher les mythes de s’enraciner.
Dans beaucoup de villes, à
commencer par Paris, les manifestations étaient étonnamment (vu le
nombre considérable de gens concernés) peu « interclassistes ». Elles
ont souvent donné l’impression d’être des manifestations de la
petite-bourgeoisie blanche, de gauche et de droite. A Paris, dans
certains coins de la gigantesque manifestation, celle-ci prenait même
des airs de « manif pour tous » (un paradoxe pour Charlie Hebdo !), et là se concentraient le délire patriotique et les ovations à la maréchaussée. »
http://www.npa2009.org/idees/sur-les-manifestations-du-11-janvier