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Commentaire de Sylvain Etiret

sur Euthanasie et présidentielle


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Sylvain Etiret 6 mars 2007 00:27

La Mouche,

Merci de me rappeler à l’ordre si mes explications sont confuses.

Je ne sais pas si je vois les choses de trop haut. Je tente au contraire de m’appuyer sur une pratique quotidienne. C’est de cette pratique que naissent les réflexions que j’ai essayé de synthétiser, et non d’un a priori théorique auquel je tenterais de faire coller la réalité.

Néanmoins, pour répondre aux deux étapes de vos questions :

- vous évoquez « ce moment où l’on ne peut et ne doit plus faire durer cette situation ». Toute la question est dans le « faire durer ». Il n’y a aucune difficulté, aux termes de la loi Léonetti, à ne pas « faire durer », à cesser tout soin de prolongation artificielle. Le problème réel est de savoir s’il faut « laisser durer », c’est-à-dire faire un geste pour abréger la vie (non plus cesser de faire un geste qui l’entretien artificiellement). Il ne s’agit là ni d’une question religieuse ni d’une argutie, mais d’une très concrète différence au pied du lit du patient.

- vous évoquez le fait de « vivre sans bouger d’un lit avec un tuyau dans le nez ». Je pourrais vous citer de nombreux patients qui, dans ces conditions, n’en demandent pas pour autant à mourir. La question n’est donc pas celle de l’apparence de technique dans les soins ou de l’absence d’autonomie. Elle est plus dans le vécu que le patient (ou ses proches) en a. Elle est donc plus dans ce qui fait que pour certains cette situation n’a plus de sens alors qu’elle en conserve pour d’autres. Il n’y a donc aucune raison de mettre la barre à « lit + tuyau dans le nez ». On peut la mettre à « lit + perfusion » ou « fauteuil + perfusion » ou « fauteuil + incontinence » ou à bien d’autres niveaux encore. C’est d’ailleurs la réalité de la plupart des demandes d’euthanasie, loin des images caricaturales qu’on imagine. Pour prendre un exemple vécu, un patient encore autonome et lucide malgré une grande fatigabilité, porteur d’un cancer dépassé mais physiquement confortable et sans aucun tuyau, me disant : « Puisque je ne vais plus guérir, pourquoi attendre ? Autant en finir tout de suite. Allez-y ». Les situations de souffrance physique persistante relèvent quant à elles plus d’une réticence alors injustifiée à prendre le risque de hâter la fin (non à décider de hâter la fin).

- vous demandez qui peut décider que c’est le moment et « arrêter la bécane ». Si arrêter veut dire couper le contact, je réponds : « Je ne sais pas. En tout cas pas un soignant » (Quelle est cette série de raisons qui vous fait voir l’infirmière dans ce rôle ?). Si arrêter veut dire laisser s’éteindre le moteur sans chercher à l’entretenir ou à le faire redémarrer, je réponds : « C’est déjà prévu dans la loi Léonetti ».

Même si je suis encore un peu long, j’espère que cette réponse sera plus claire que mes interventions antérieures. Pour résumer en quelques mots :

- les demandes réelles d’euthanasie sont le plus souvent éloignées de l’image qu’on en a,

- elles sont généralement sous-tendues plus par une démarche « spirituelle » que par une souffrance physique,

- elles sont adressées à des soignants qui n’ont aucune légitimité pour y répondre favorablement.

Cordialement.


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