Du Quotidien l’orient-le-Jour, ’Liban, Beyrouth, du mardi 1er septembre
« »« »"
Le groupe Etat islamique (EI) a rasé le joyau de l’Humanité que représentait
le temple de Baal dans la cité antique de Palmyre en Syrie, et les experts sont
convaincus que la rage destructrice des jihadistes se poursuivra.
"Ils
ont tué Palmyre", s’est lamenté mardi le directeur des Antiquités de Syrie,
Maamoun Abdelkarim, après la diffusion dans la nuit de photos satellitaires de
l’Onu confirmant la destruction du plus grand temple du site. "Il s’agissait du
plus beau symbole de toute la Syrie. Et nous l’avons perdu à tout jamais",
a-t-il ajouté, en y voyant "le dernier acte avant la destruction complète de
Palmyre".
Lundi soir, l’Institut des Nations unies pour la formation et
la recherche (Unitar) a déclaré pouvoir "confirmer la destruction du bâtiment
principal du temple de Baal ainsi que celle d’une rangée de colonnes qui le
jouxte", après avoir comparé des images satellite avant et après
l’explosion.
Sur une image datée du 27 août, une structure rectangulaire
entourée de colonnes est clairement visible, alors que sur un autre cliché pris
lundi, on ne distingue plus que quelques colonnes, en bordure du site.
Ce
temple érigé il y a 2.000 ans est le plus connu des monuments de la ville
antique, qui figure au Patrimoine mondial de l’Humanité de l’Unesco et qui était
visité avant la guerre par 150.000 touristes chaque année.
(Lire aussi : Pour l’Unesco, l’EI a commis à
Palmyre « un crime de guerre »)
« Faire la une »
L’EI, qui a profité de la guerre
civile pour s’implanter en Syrie, s’était emparé le 21 mai de Palmyre, à 205 km
à l’est de Damas, après en avoir chassé les forces gouvernementales, suscitant
aussitôt la crainte pour l’avenir du patrimoine syrien. Le 23 août, les
jihadistes avaient détruit à l’explosif le temple de Baalshamin. Quelques jours
plus tôt, ils avaient mutilé le corps de l’ex-patron des Antiquités de Palmyre,
Khaled al-Assad, 82 ans, après l’avoir exécuté.
Palmyre recèle les plus
beaux trésors de Syrie, notamment "des dizaines de tombeaux à étage, le théâtre
et le temple de Nabu dont il ne reste que les fondations", a précisé Maamoun
Abdelkarim.
Le grand théâtre romain, datant du IIe siècle, n’a pas été
jusqu’à présent endommagé, mais l’EI y a procédé à des exécutions publiques de
soldats par des enfants de membres du groupe jihadiste.
En s’attaquant
aux monuments, l’EI savait qu’il allait susciter l’indignation internationale,
ce qui était son objectif, estiment des experts. Il agit ainsi pour "faire la
une de l’actualité et malheureusement nous tombons dans ce piège", a regretté
Cheikhmous Ali, directeur de l’Association pour la protection de l’archéologie
syrienne (Apsa), basée en France. "Je pense qu’il ne faudrait pas donner ces
informations car plus nous médiatisons leurs actes sauvages, plus ils vont
recommencer", explique cet expert en archéologie et opposant au régime. Pour
lui, « ces barbares n’ont aucune culture » et ils cherchent à "faire pression pour
torturer la population« en supprimant »sa mémoire collective" alors que le
tourisme historique est « la première ressource à Palmyre ».
Pour la
directrice générale de l’Unesco, Irina Bokova, cette destruction "constitue un
crime intolérable contre la civilisation". Elle assure toutefois, dans un
communiqué, que « ce crime n’effacera jamais 4.500 ans d’histoire ».
( Lire aussi : "Avec Baalbeck, Baal est le plus beau
temple du Moyen-Orient" )
« Puissance symbolique »
L’EI agit ainsi sur les
territoires de ce qu’il considère comme son « califat » à cheval entre l’Irak et
la Syrie. Il a ainsi déjà détruit en Irak des statues, des mausolées et des
manuscrits, notamment à Mossoul, et démoli les anciennes cités de Nimroud et de
Hatra.
Pour Charlie Winter, analyste à la Quilliam fondation basée à
Londres, ces destructions "ont une réelle signification dans la vision du monde
des jihadistes car elles représentent le symbole de polythéisme. Ils s’agit
d’œuvres préislamiques et elles sont donc considérées par eux comme ne méritant
pas d’exister".
Mais il s’agit aussi pour eux de continuer à faire parler
d’eux au moment où leurs exécutions sauvages ne suscitent plus la même attention
des médias.
"Les vidéos de l’EI d’hommes brûlés vifs ne font plus la une de
l’actualité à l’inverse de Palmyre ; et l’EI sait distinguer la puissance
symbolique de la destruction des ruines", assure M. Winter.
L’EI peut aussi
se sentir coincé alors que l’armée syrienne se rapproche de la ville. "Plus l’EI
aura le sentiment qu’il risque de perdre Palmyre, plus grande est la possibilité
qu’il détruise ce qui reste", avertit le chercheur.
Lire aussi
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Baalchamine est purement mercantile »
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L’EI va-t-il détruire Palmyre ? : «
Avec leur petit côté sadique, ils peuvent très bien faire traîner les choses
»
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