C’est une horreur : imaginer que la raison profonde de
la crise
du maïs que subit le Mexique depuis ces derniers mois, et que le
gouvernement se garde bien de dévoiler à l’opinion publique, découle de la spéculation
orchestrée par les grandes transnationales de l’agroalimentaire ! Selon Oxfam
Canada, les États-Unis fournissent à leurs producteurs de mais 10,1 Milliards$ par
an et les encouragent à inonder les marchés mondiaux à des prix artificiellement
bas. De nouvelles recherches d’Oxfam démontrent que les États-Unis dépensent
entre 105 Millions$ et 145 Millions$ par an de subventions directes à
l’exportation du mais destiné à saturer le marché mexicain (Communiqué, 17 août
2006).
Vous l’avez très bien démontré Marsu
Je ne cesse de penser au fait que la nourriture dont dépend
tout un peuple pauvre puisse faire l’objet de pareilles spéculations. Bien
évidemment, je vais éviter de lancer tous les poncifs à l’égard de mes voisins,
les Américains. Nous sommes - en Amérique - plongés dans cet Accord de
libre-échange nord-américain. Au Mexique ce fut le maïs, chez nous, au Québec,
la crise du bois d’œuvre. Aussi éloignés l’un de l’autre, le maïs et le bois
ont eu pour propriété d’appauvrir en raison d’une part des augmentations
faramineuses sur le maïs, et, d’autre part, en raison des frais de douanes
exorbitants imposés par nos voisins sud, les États-Unis. Près de 200 forestiers
ont quitté le métier ou ont fait faillite, victimes des droits
compensatoires imposés par le gouvernement américain sur les exportations
de bois d’œuvre canadien. ET voilà que
maintenant on crée une pénurie artificielle, on stocke des tonnes de maïs en
attendant que le prix monte pour pouvoir ainsi le revendre au prix fort
quelques semaines plus tard. Ces compagnies spéculatrices participent à l’augmentation
du prix du maïs et à l’appauvrissement des familles mexicaines.
Le maïs comme symbole
culturel et base de l’alimentation quotidienne : « occupe une
place centrale dans l’imaginaire symbolique, culturel, social et
environnemental de l’ancienne Méso-Amérique. Depuis des millénaires, l’histoire
du maïs et l’histoire de l’homme sont indissolublement liées : selon une des
versions de la cosmologie mexica, les habitants de la
terre voient le jour après que Quetzalcóatl, le Dieu serpent à plume, ait
affronté le seigneur de l’inframonde pour y prendre les grains de maïs rouges,
jaunes, blancs et bleus et les redistribuer ensuite aux hommes. Les mythes se
rapportant à l’origine du maïs associent l’apparition de l’agriculture au
surgissement de la civilisation et créent ainsi la notion d’identité ethnique.
Pour les mexicains aujourd’hui, la culture et la consommation de cette plante
sont une partie intégrante de leur existence : sans elle, leur vie s’appauvrit
et se déforme inexorablement. Quelques 300 millions de kilogrammes de maïs sont
consommés tous les jours au Mexique sous forme de galettes, la fameuse «
tortilla » ; soit une consommation de 9 tortillas par jour et par personne. Il
existe environ une soixantaine de variétés de maïs au Mexique (à l’époque
précolombienne, plus de 250 variétés !!) à partir desquelles sont élaborés les
principaux plats mexicains : l’enchilada, le pozole, les tacos, ... »
Je reprends la conclusion d’Oxfam Canada : « Si
les bénéfices du commerce mondial étaient justement répartis -
ce que tout le monde prétend vouloir - les pays en voie de développement, comme
le Mexique, pourraient protéger les pans les plus faibles de leur économie. Et les
pays riches, comme les États-Unis, devraient mettre fin aux subventions massives
qu’ils investissent dans leurs exportations agricoles.
Et dire que 400 000 mexicains tentent tous les ans de
franchir la frontière nord-américaine, en vue non pas de poursuivre le rêve
américain mais simplement de survivre !
Pierre R.