La lecture au premier degré de passages du Coran incite certains jeunes à faire
le djihad. Comment éviter cet usage inapproprié ?
Un livre sacré mais dangereux
Mireille Vallette, présidente de l’Association suisse vigilance islam
(ASVI)
La Tribune de Genève, dans une remarquable enquête parue le 28 août, a
mis en évidence le climat radical et le rôle de promoteur de l’Etat islamique de
la plus grande mosquée de Suisse. Parole est donnée aux accusés, à l’experte, au
président de la plus grande faîtière des organisations musulmanes de Suisse.
Pourquoi alors ce sentiment de frustration ? Parce qu’une fois de plus, ce que
Daniel Sibony appelle, dans « Islam, phobie, culpabilité », « le grand secret » a
été bien gardé : le contenu de la doxa musulmane.
La mère du jeune djihadiste témoigne que son fils « a appris de façon
boulimique le Coran ». Que lui a enseigné ce livre pour qu’il se convainque que
lui être fidèle était de partir en terres de l’EI ? Que contiennent les « dizaines
de sourates » du Coran qu’il a envoyées à son père pour, on l’imagine, expliquer
son combat ? C’est autour du Coran que tournent toutes les activités des mosquées
qui ne cessent de rappeler son caractère parfait, parole de Dieu sans
intermédiaire. Or il s’en prend aux mécréants comme une litanie : plus de 500
occurrences sur 6000 versets selon l’ex-musulman Majid Oukacha dans son
remarquable ouvrage « Il était une foi l’islam ».
Allah rappelle sans trêve que tout non-musulman sera condamné à l’enfer pour
cette seule raison, fût-il l’exemple même de l’homme de bien, et il s’en prend
tout spécialement aux juifs et aux chrétiens. Les mécréants sont qualifiés de
criminels, bestiaux, singes, porcs. Les musulmans sont incités à les attaquer,
les anéantir par le djihad, avec à la clé une place garantie au paradis.
La lutte contre l’intolérance et le combat contre les non-musulmans par le
biais d’un livre qui ne cesse de promouvoir l’une et l’autre, sacré défi ! On
aimerait savoir comment les responsables musulmans le relèvent. Comment
peuvent-ils d’un même souffle assurer de la perfection de ce livre et expliquer
qu’il ne faut surtout pas faire ce qu’il enjoint ?
Il paraît que les prêches de la mosquée genevoise étaient pacifiques. Les
imams faisaient donc le choix de versets inoffensifs. Mais que se passe-t-il
lorsque le croyant s’avise de lire lui-même le saint livre et découvre sa vraie
nature ? Ou il refuse de voir… ou il décide de mettre en pratique le « vrai
islam ».
Le choc du croyant convaincu de l’humanisme de son prophète risque d’être
tout aussi violent lorsqu’il découvre sa vie de chef de guerre, épurateur de
juifs, violeur de captives… Pour ne citer que quelques-uns de ses hauts faits
cités dans la biographie de référence des musulmans. Au moment où nous,
habitants des démocraties, sommes aussi sous la menace d’attentats, ne
sommes-nous pas légitimés à demander aux responsables musulmans de reconnaître
le caractère violent de leurs textes et de nous assurer que ces incitations à
éradiquer l’Autre sont devenues caduques ?
Le Coran doit être interprété
Hafid Ouardiri, directeur de la Fondation de l’Entre-connaissance
Je ferai mon possible pour apporter un éclairage à vos lectrices et à vos
lecteurs, sans prétention aucune de ma part de mettre fin à l’extrémisme
complice de tous bords, qu’il soit religieux, politique, idéologique, et qui se
gave de racisme, d’antisémitisme ou d’islamophobie.
Cela ne veut pas dire que nous musulman(e)s ne tenons pas compte de la peur
que ressentent les gens à voir la barbarie qui frappe le Moyen-Orient, mais
aussi le Proche-Orient, ainsi que les attentats atroces qui ont eu lieu en
Europe et qui nous menacent toutes et tous. Cette peur est aussi la nôtre car
nous sommes aussi les victimes en très grand nombre de ces crimes
abominables.
Des jeunes sont endoctrinés parce que fragiles et trop exaltés et
inconscients, comme le sont et l’ont été beaucoup de jeunes de leur âge tout au
long de l’histoire et partout. Il faut les éduquer à un meilleur avenir pour un
meilleur monde et non pas les laisser entre les mains de ces criminels qui les
trompent au nom de la religion. Les musulman(e)s conscient(e) s de ce grand
péril doivent faire, et très vite, tout ce qu’il faut pour barrer la route à
cette calamité qui défigure notre religion, l’islam.
Les érudits religieux, les penseurs et chacun(e) d’entre nous avons le devoir
d’œuvrer dans l’urgence à ce qu’il y ait une lecture du Coran qui ne laisse
aucune place aux interprétations morbides, violentes et cruelles en son nom et
surtout en ce qui concerne les versets où se trouve le verbe « tuer ». Non pas
pour plaire à Mireille Valette mais pour plaire à Dieu et être conforme à Son
véritable enseignement : le salam, la paix...
N’en déplaise à ses détracteurs passés, présents et futurs, le Coran est ce
qu’il est, comme d’ailleurs les autres Ecritures, c’est à leurs adeptes de les
interpréter comme il conviendrait de le faire en tout temps et en tout lieu,
afin qu’ils puissent atteindre la sagesse et la paix auxquelles elles les
invitent dans leur manière de vivre leur foi en eux-mêmes et avec tous les
autres.
Nous faisons tout ce que nous pouvons pour rendre attentifs les musulman(e)s,
jeunes et moins jeunes, à une lecture éclairée des versets du Coran en leur
rappelant qu’il serait faux et contraire à l’enseignement de l’islam, message
essentiellement d’amour et de miséricorde, que d’interpréter sur les 6300
versets qu’il contient les 5 qui contiennent un appel à tuer hors de leur
contexte historique révolu.
N’oublions pas que dans toutes les Ecritures saintes il y a des versets où la
violence est clairement mentionnée, ce n’est pas une raison pour que les
croyant(e)s en fassent usage contre leurs semblables. C’est ensemble que nous
devons combattre ces fléaux, en agissant sur les vraies causes qui les
engendrent, qu’elles soient dues au fanatisme religieux, politique ou
idéologique. (TDG)
(Créé :
07.10.2015, 18h26)